CONFERENCE DÉBAT
FACULTE DE DROIT DE L’UNIVERSITE DE MBANDAKA
Samedi 14 mai 2022
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Monsieur le Recteur ;
Monsieur le Doyen de la Faculté de Droit ;
Chers étudiants et étudiants ;
Aussitôt contacté pour participer à la conférence de ce jour, ma curiosité scientifique s’est totalement orientée sur un fait sociétal qui possiblement, demeure sans nul doute, et sans être contredit, un véritable enfer, mieux casse-tête pour les hommes, il s’agit de l’infraction de viol sur mineur qui a pris de l’ascenseur cette dernière décennie.
Sujet intéressant et largement vaste, nous avons décidé pédagogiquement de le circonscrire afin de l’adapter au vécu quotidien pour ne pas se perdre dans un labyrinthe de pensées, c’est pour cette raison, nous avons décidé juridiquement de l’intitulé « viol sur mineur : un véritable fonds roulant et fonds de commerce : plaidoyer pour une réforme urgente de la loi du 10 janvier 2009 ».
Le choix fait à cette thématique se justifie pour bien compacter avec l’évènement du jour, celui du procès fictif de nos chers et distingués étudiants de la faculté de droit organisés en cassation toge noire que je tiens à remercier infiniment pour cette marque de confiance et de considération.
En effet, d’aucun n’ignore que, la République démocratique du Congo est considérée comme la capitale mondiale de violences sexuelles. En vue de mettre fin à cette étiquette, le législateur de 2006 avait modifié et complété le code pénal et le code de procédure pénale, d’une part, en prévoyant des sanctions sévères à l’égard de toute personne présentée comme auteur des violences sexuelles, et d’autre part, en donnant trop de droits aux victimes et en dérogeant aux règles de l’administration de la preuve ainsi qu’en réprimant spécialement les agressions sexuelles dirigées contre les enfants de moins de dix-huit ans.
Malheureusement et contre toute attente, ces nouvelles lois ont été l’appât de certaines personnes animées de mauvaise foi qui en ont fait un véritable fonds de commerce, un moyen de règlement des comptes, d’escroquerie organisée et presqu’institutionnalisée, de contrainte, de discréditation, de vengeance privée, etc. Cela est la base de la recrudescence de « fausses victimes » et plaintes abusives et en matière de violences sexuelles.
En lisant DOUMA et HILHORST (dans leur article intitulé, « Fonds de commerce ? Assistante aux victimes de violences sexuelles en République démocratique du Congo », Rapport des travaux de Wageningen University, 2012, p.51), vous serez d’accord avec moi que la mauvaise foi, l’intention de nuire et le recours à l’arbitraire sont éventuellement présents dans certaines plaintes injustifiées et abusives en matière de violences sexuelles. En effet, un des problèmes qui s’est intensifié au cours de ces dernières années est la présence de fausses victimes : les femmes et filles qui font semblant d’être violées. Il s’agit d’une nouvelle forme de délinquance qui est au centre de notre réflexion et que le législateur congolais est dans l’impérieuse nécessité d’éradiquer en adoptant des solutions idoines surtout en ce qui concerne le viol sur mineur.
Nous partageaons les mêmes avis avec le Professeur Télesphore KAVUNDJA N. MANENO et Me RITA RUBAYI SALAMA (respectivement Professeur à l’Université de Goma et Avocat au Barreau de Gombe, Assistante à la même Université, dans leur article intitulé « La recrudescence de fausses victimes et plaintes abusives en matière de violences sexuelles en RDC. Que faire pour y remédier en droit judiciaire congolais ? », publié dans la Revue de la Faculté de Droit, Unigom, n°3, 2018) lorsqu’ils estiment que, la fausse victime de violences sexuelles est celle qui, en vue de gagner un quelconque avantage, prétend avoir été victime des infractions relatives aux violences sexuelles. En cette matière, ces outrances (abus) se manifestent à travers des plaintes injustifiées et abusives en justice.
A notre avis, il s’agit de l’escroquerie sexuelle qui est comme l’usage du sexe dans le but de s’approprier un quelconque avantage de la victime en faisant naître à celle-ci la crainte d’une plainte en justice contre elle, plainte qui pourrait entraîner des conséquences plus fâcheuses que l’arrangement, c’est-à-dire l’octroi de l’avantage recherché.
Alors que, il faut bien le souligne en rouge, les filles mineures in specie casu, constitue surtout pour la tranche d’âge qui varie entre 15 à 17 ans, un véritable problème pour la société. Ainsi donc, le problème du manque de consentement pour ces filles constitue un dilemme dans la répression du viol et victimise les hommes.
Alors, comment mettre fin à l’exploitation des filles comme fonds roulant et fonds de commerce à travers la RDC en général et la Province de l’Equateur en Particulier ? Que faire pour remédier à cette situation ? Comment faire finalement pour dissuader ces nouveaux escrocs qui abusent de la largesse de ces lois à l’égard des victimes ?
C’est autour de ces questions qu’il est loisible d’aborder le présent thème.
1. Comprendre l’infraction de viol
Le viol est une des manifestations de l’agression sexuelle. Il englobe en son sein des faits qui parfois sont loin de réaliser le simple contact physique.
Il est défini par la loi n°06/018 du 20 juillet 2006 complétant et modifiant le Décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal Congolais (articles 170, 171 et 171 bis) et la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant (articles 170, 171). Cette loi définit le viol comme :
- Le fait d’introduire son organe sexuel, même superficiellement dans celui d’une femme ou pour la femme d’obliger un homme à introduire même superficiellement son organe sexuel dans le sien ;
- Le fait de pénétrer même superficiellement l’anus, la bouche ou un orifice du corps d’une femme ou d’un homme par un organe sexuel, par une partie du corps ou par un objet quelconque ;
- Le fait d’introduire même superficiellement une partie du corps ou un objet quelconque dans le vagin ;
- Le fait d’obliger un homme ou une femme à pénétrer, même superficiellement son anus, sa bouche ou un orifice de son corps par un organe sexuel, par une autre partie du corps ou par un objet quelconque.
Comme on peut le constater, l’infraction de viol (mineur ou majeur) existe depuis l’adoption du décret du 30 janvier 1940 qui date de l’époque colonial (article 170 avant la modification du 20 juillet 2006).
Puni par les textes légaux sus-cités dont le taux de la peine varie de 7 à 20 ans des servitudes pénale et une amende, le viol est distingué, entre le viol sur mineur (personne n’ayant pas atteint 18 ans révolu) et viol sur adulte (personne ayant accompli 18 ans accompli).
Pour les adultes, le viol est perpétré lorsqu’il n’y a pas consentement, par force ou violence. Il doit s’agir normalement des pénétrations illégitimes, obtenues à l’aide de violences (physique, morale), de menaces graves, de ruses ou en abusant d’une personne inconsciente (ivre, en sommeil), atteinte de démence, d’idiotie ou d’imbécillité.
Par contre, pour les mineurs, il y a la présomption d’absence de consentement de la victime. Pour le code pénal, le rapprochement sexuel effectué avec consentement d’une personne, garçon ou fille n’ayant pas dix-huit ans équivaut à l’absence de consentement (article 167, alinéa 2 du code pénal livre II tel que modifié par la loi du 20 juillet 2006).
D’ailleurs, la Cour Suprême de justice a arrêté en 1979 que le consentement de la victime mineure âgée de moins de 18 ans, la circonstance qu’elle était déjà déflorée constituent à coup sûr l’infraction de viol parce qu’aux termes de l’alinéa 2 de l’article 167 du code pénal livre II les relations sexuelles dans ces cas sont présumées commises avec violence (C.SJ., R.P. 17/C.R, 5/04/1978, Bull. 1979, p.57).
Magistrat DIBUNDA KABWINJI MPUMBUAMBUJI dans son fameux ouvrage Répertoire Général de Jurisprudence de la Cour Suprême de Justice, p.230, nous renseigne que, la Cour Suprême de justice a arrêté que, le fait pour la victime d’avoir des mœurs faciles et d’avoir entretenu des relations sexuelles avec d’autres personnes ne constitue pas des circonstances élusives de l’infraction de viol mais bien une simple circonstance atténuante (C.S.J. 5 mars 1974 MPC/N ; R.J.Z 1974).
2. Viol sur mineur : fonds de commerce et fonds roulant
Comme dit supra, l’infraction de viol a existé depuis l’époque coloniale dans le code pénal de (1940). Cette loi a tenu compte de l’évolution psychologique d’un mineur (enfant) du fait qu’elle a reconnu le viol sans consentement sur mineur que pour les enfants de moins de 14 ans (article 167 et 170 du code pénal avant modification).
La révision du 20 juillet 2006, a modifié cet article en ramenant cet âge de 14 ans à moins de 18 ans, alors que le code de la famille, la loi n°87/010 du 1èr août 1987 avant la promulgation de la loi de 2009, en ses articles 288 et 289, autorisait le mariage par émancipation de plein droit des mineurs âgés de 15 ans (on entre au mariage pour consommer des rapports sexuels).
La mise sur pied de la loi de 2009, ferme la porte au mariage et fiançailles des mineurs (article 48) et vient renforcer les articles 170, 171, 170 bis et 167 al. 2 du code pénal, en ce que le viol commis sur le mineur est accompli sur le simple fait du rapprochement charnel de sexes et réputé avoir été fait à l’aide de violences (consentement ou pas).
Depuis l’adoption de ce texte de loi, le législateur a créé sans nul doute une nouvelle activité économique à travers le pays en général et dans la Province de l’Equateur en particulier. A l’instar de l’Est du pays où selon Professeur Dr Denis MUKWEGE, le viol est une arme de guerre pour terroriser la population civile, à l’Equateur, le viol sur mineur constitue à ce 21ème siècle, un fonds de commerce et un fonds roulant. Il s’agit là, de l’économisation du viol sur mineur.
Pour Nathalie VUMILIA NAKABANDA, Assistante à l’Université Catholique de Bukavu s’accorde avec le Dr MUKWEGE en soutenant que, la situation est particulièrement dramatique à l'Est, où des groupes armés non étatiques, y compris des milices étrangères, commettent des atrocités sexuelles dans le but de détruire complètement les femmes, physiquement et psychologiquement, ce qui a des répercussions sur la société tout entière. A notre avis, ceci est diamétralement contrairement avec ce qui se vit à l’Equateur.
A vrai dire, il y a inversion des valeurs sexuelles dans la cité équatorienne, les filles s’habillent malhonnêtement et incorrectement sous les auspices et passivité de leurs parents dans l’unique but de rattraper les hommes (c’est une arnaque appelé phishing), surtout les filles qui sont nées entre 2002 et 2005, sont celles caractérisées par une prostitution périlleuse. Nos enquêtes sur terrain nous renseignent que, dans les hôtels de Mbandaka par exemple, la fréquentation des filles mineures (de 15 à 17 ans) est évaluée à 60%.
Pourquoi le viol est qualifié un nouveau fonds de commerce ?
L’article 135 de l’acte uniforme de l’OHADA portant sur le droit commercial général définit le fonds de commerce comme un ensemble de moyens qui permettent au commerçant d’attirer et de conserver la clientèle (installation, aménagements, matériels, mobilier, marchandises en stocks) ....
Le viol est un fonds de commerce à Mbandaka (Equateur) car, nous qui sommes parents, exposons nos filles, les vendons au public (par les tenues et comportements vaporeux) dans le but d’attirer les hommes. C’est un véritable tremplin pour chuter au parquet avec de genre des plaintes sus-évoquées en vue de gagner des parcelles, les grosses sommes d’argent, les véhicules et de ne citer que ceux-là.
Pourquoi le viol est qualifié d’un fonds roulant ?
Sur le plan comptable et fiscal, le fonds roulant n’est rien d’autre que la somme dont dispose l’entreprise pour payer ses fournisseurs, ses employés et l’ensemble de ses charges de fonctionnement, en attendant d’être rémunéré par ses clients.
Les fausses accusations de viols sont devenues source de gain pour quelques familles congolaises. Certains parents misérables apprennent à leurs filles comment séduire des gens qui affichent une aisance financière afin de trouver un moyen à une plainte pour agression sexuelle dans le seul but de gagner.
Oui, le viol sur mineur à Mbandaka, est un véritable fonds roulant. Il est conçu par les parents des filles comme un moyen d’avoir des sommes qui leur permettent de satisfaire leurs besoins familiaux, payer les études des enfants, se faire nourrir et satisfaire toutes les charges familiales.
3. La loi du 10 janvier 2009 ne s’adapte plus à l’évolution de la société : plaidoyer pour sa révision urgente.
Maintenir la rigidité de la loi de 2009, c’est vouloir envoyer les hommes (garçons) en prison bêtement pendant que la moralité des filles mineures est totalement dépravée depuis l’adoption de cette dernière.
Les études faites nous démontrent que, depuis cette date jusqu’à ce jour, la prostitution des filles mineures dont la tranche d’âge varie entre 15 à moins de 18 ans a atteint son point culminant. Alors que, Selon la psychologie de l’enfant et de l’adolescent, à partir de 15 ans, un enfant (mineur) fille ou garçon acquiert une maturé sexuelle et son consentement est toujours volontaire. La croissance de chacun en dépend, car déjà à l’âge de 15 ans, certaines filles, psychologiquement, ont le même niveau que les filles de 25 ans.
Pour éviter de torturer sans raison plausibles les garçons pour des filles immorales et pleines de prostitution, le législateur congolais est appelée, urgemment, à réviser la loi sous examen en ce que, le viol sur mineur dont le consentement est inopérant soit laissé uniquement pour les enfants de moins de 14 ans, comme disposait le code pénal de 1940, et à partir de 15 ans, admettre que si la fille mineure est consentante, il n’y a pas infraction de viol.
Aussi, reconnaitre :
- Un test médical obligatoire à l’égard de l’auteur présumé de l’infraction et la victime.
- Supprimer le principe de « victime-témoin »
- Prévoir des sanctions pénales conséquentes à l’égard de faux plaignants ou fausses victimes en matière de violences sexuelles.
- Instaurer les droits des victimes des plaintes injustifiées ou abusives en matière de violences sexuelles et des mécanismes de réparation.
Mesdames et Messieurs, voilà grosso mode, la teneur de notre exposé et nous vous remercions pour votre particulière attention.
Maitre Edmond MBOKOLO ELIMA
Avocat au Barreau de l’Equateur
Assistant à la Fac de droit de l’Université de Mbandaka
Apprenant de troisième cycle à l'Université de Kinshasa et Université de Kisangani.