CA AMIENS, 28 novembre 2022, n° 21/02838 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel d’AMIENS rappelle les obligations pesant sur la CPAM lors de l’instruction d’une maladie professionnelle.
Il était question, en l’espèce, d’une salariée qui avait établi une déclaration de maladie professionnelle pour un canal carpien que la CPAM a pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.
L'employeur a contesté cette décision devant les juridictions de sécurité sociale en invoquant notamment une méconnaissance du principe du contradictoire.
En la matière, dans sa rédaction applicable en la cause, l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, la caisse dispose d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie.
Au cours de son instruction, selon l’article R. 441-14 du même code, la CPAM communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.
Sur le fondement de ces dispositions, la Cour de cassation juge qu’une violation de cette obligation d’information en défaveur de l’employeur est sanctionnée par l’inopposabilité de la décision de prise en charge.
Tel est le cas du non-respect du délai laissé à l’employeur pour venir consulter les pièces du dossier avant la prise de décision (Cass. civ. 2ème, 30 mars 2017, n° 16-11.605).
A cet égard, la méconnaissance par la CPAM de son obligation d’information n’est pas soumise à l’existence d’un grief (Cass. civ. 2ème, 07 juillet 2016, n° 15-20.302)
Au cas présent, après avoir rappelé les textes susvisés, la Cour d'appel d’AMIENS constate que les courriers des 02 avril 2019, 21 juin 2019 et 01er juillet 2019 adressés par la CPAM à l'employeur l'ont été sous le numéro 190311597 au titre d'une pathologie constatée le 11 mars 2019.
La notification de prise en charge a été adressée à l'employeur le 22 juillet 2019, sous le numéro 190107599 pour une pathologie constatée le 07 janvier 2019.
Selon la Cour, s'il n'est pas contestable qu'il s'agisse de l'instruction d'une unique pathologie, à savoir un syndrome du canal carpien au titre du tableau n° 57 C, il n'est pas établi que l'employeur ait été mis en mesure de faire des observations sur la modification de la date de prise en charge de la maladie.
En effet, bien que le rapport d'enquête, consulté par la société, fasse mention d'un arrêt de travail à compter du 07 janvier 2019 au titre de l'assurance maladie, il n'est pas établi par la caisse qu'elle ait sollicité l'employeur ou même attiré son attention sur un éventuel changement de la date de prise en charge de la maladie.
Cette modification n'a donc été révélée de manière certaine à l'employeur que dans la notification de prise en charge de la maladie professionnelle, soit postérieurement à la procédure d'instruction du dossier et de manière non-contradictoire.
Elle prononce donc l'inopposabilité de la décision de prise en charge en faveur de l'employeur.
Cette position de la Cour d’appel d’AMIENS est à rapprocher de celle tenue par la Cour de cassation qui impose à l'organisme social d’informer l'employeur d'un changement de qualification de la maladie initialement instruite (Cass. civ. 2ème, 21 janvier 2016, n°14-29.419).
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.