Crise sanitaire liée au Covid19 et délais stipulés dans les promesses de vente immobilière

Publié le 07/04/2020 Vu 1 710 fois 0
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Questions autour des délais dans les promesses de vente de biens immobiliers : Quid du délai de rétractation ? De la réalisation des conditions suspensives ?

Questions autour des délais dans les promesses de vente de biens immobiliers : Quid du délai de rétractatio

Crise sanitaire liée au Covid19 et délais stipulés dans les promesses de vente immobilière

Le Monde se trouve bouleversé par un élément de la taille d’une poussière : le Covid19.

 

En cette période de pandémie, au-delà des préoccupations sanitaires, d’aucuns s’interrogent sur le sort des délais stipulés dans leur promesse de vente et les questionnements fusent autour du devenir de leurs avant-contrats.

 

L’acheteur va-t-il pouvoir se rétracter ?

Qu’en est il de la condition suspensive stipulée dans la promesse (comme par exemple celle liée à l’obtention d’un prêt) ?

 

Les réponses à ces interrogations se trouvent tant dans la Loi d’urgence sanitaire que dans l’une des ordonnances prises par le Gouvernement.

 

Avant de rentrer dans le « vif du sujet », il est important de « décrypter » les délais qui figurent dans les textes récemment publiés.

 

 

1) Les délais fixés par la Loi d’urgence et par l’ordonnance relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire :

 

L’état d’urgence a été déclaré pour une durée de deux mois par la Loi n°2020-290 du 23 mars 2020, publiée au Journal Officiel du 24 mars 2020.

 

Concrètement cette Loi autorise le gouvernement à prendre par ordonnances, avant le 24 juin 2020, certaines mesures, relevant du domaine de la loi (article 11 de la Loi du 23 mars 2020 précitée : « le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure, pouvant entrer en vigueur, si nécessaire, à compter du 12 mars 2020, relevant du domaine de la loi »).

 

C’est dans ces conditions que le Gouvernement a pris 25 ordonnances (parues au Journal Officiel du 26 mars 2020) en application de la loi d’urgence n°2020-290 du 23 mars 2020.

 

Celle qui est susceptible de présenter un intérêt dans le cadre du présent billet est l’Ordonnance n°2020-306 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période.

 

Cette ordonnance prévoit en son article 2 :

 

« Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. »

 

 

 

 

La période mentionnée à l’article 1er concerne les délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire, c’est-à-dire un mois après l’état d’urgence déclaré le 24 mars 2020, soit le 24 juin 2020 (puisque l’état d’urgence dure deux mois) sous réserve de la prolongation de l’état d’urgence.

 

 

En d’autres termes, cette ordonnance vise toutes démarches qui seraient susceptibles d’avoir des conséquences juridiques entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020.

 

 

2) Les démarches concernées par l’ordonnance n°2020-306 :

 

Il est légitime de penser que les termes « acte, recours, action en justice, formalité… » visés par l’ordonnance, concernent les promesses unilatérales comme synallagmatiques de vente.

 

L’article 4 de cette même ordonnance prévoit notamment pour les promesses « que les astreintes, les clauses pénales, les clauses résolutoires, ainsi que les clauses prévoyant une déchéance, lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé, sont réputées n’avoir pas pris cours ou produit effet », si ce délai a expiré pendant la période ci-dessus visée.

 

Concrètement, est ce que cela signifie que tous les délais sont suspendus ? Qu’il ne peut y avoir de sanction durant la période définie par l’Ordonnance ?

 

 

3) Les conséquences sur les promesses de vente :

 

a) Les délais suspendus :

 

Aux termes de l’ordonnance, les délais suivants stipulés dans les promesses de vente se trouvent suspendus :

 

-          délai de rétractation de 10 jours prévu par l’article L.271-1 du code de la construction et de l’habitation ;

-          délai imparti à la commune pour faire valoir son droit de préemption urbain

-          délai minimum d’un mois prévu par le code de la consommation (article L.313-41) pour la condition suspensive de l’obtention d’un ou plusieurs prêts.

 

Exemple : l’acheteur (non professionnel d’un bien à usage d’habitation) signe une promesse de vente le 3 mars 2020. Le délai de rétractation expire par conséquent le 13 mars 2020. Compte tenu de l’état d’urgence, cet acheteur bénéficiera d’un nouveau délai de 10 jours pour se rétracter à compter du 24 juin 2020 (sauf à ce que l’état d’urgence soit prolongé) c’est-à-dire qu’il aura jusqu’au 3 juillet 2020 pour se rétracter.

 

Il convient de préciser que le report afin de purger ce droit est une faculté offerte par l’ordonnance et non une obligation imposée.

L’acheteur qui ne souhaite pas user de cette faculté pourra y renoncer afin d’éviter de rallonger inutilement la réalisation de la vente.

 

 

En revanche, il apparaît judicieux de formaliser la renonciation du bénéficiaire à se prévaloir de ce délai complémentaire.

En effet, la renonciation, en droit, ne se présume pas, elle doit se matérialiser par un acte qui exprime clairement la volonté de l’acheteur de ne pas user de la faculté qui lui est offerte.

 

Toutefois, si l’acheteur ne souhaite pas y renoncer, il conviendra d’attendra la fin du délai à compter du 24 juin 2020.

 

 

b) Les délais non suspendus :

 

Ainsi qu’il a été indiqué précédemment, les délais suspendus sont ceux qui entraînent des conséquences juridiques telles que « nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité… ».

 

En revanche, les autres délais tels que les délais de réalisation des conditions suspensives (on pense notamment à celle afférente à l’obtention du prêt par l’acquéreur) ne sont pas visés par l’ordonnance.

 

Sachant que le dépassement du délai de réalisation de la condition suspensive entraîne la caducité de la promesse, il est extrêmement important de veiller à reporter ce délai.

 

Par conséquent, pour les compromis déjà signés, les parties veilleront à régulariser un avenant à la promesse afin de proroger le délai de réalisation de la condition suspensive à l’issue de la période de crise sanitaire.

 

 

Vous l’aurez compris, l’état d’urgence ne signifie pas que les avant-contrats ont perdu leur efficacité juridique.

Si certains pourront « profiter » du contexte pour reporter l’expiration du délai de rétractation, ce ne sera qu’à la condition que ce délai expire entre le 12 mars et le 24 juin 2020 (sous réserve que l’état d’urgence ne soit pas prorogé).

En revanche, afin d’éviter la caducité de la promesse de vente, acheteurs et vendeurs auront tout intérêt à faire régulariser un avenant afin de reporter le délai de réalisation des conditions suspensives.

 

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