Le confinement tel qu’il a été décrété :
L’arrêté du 14 mars 2020, impose non pas la fermeture, mais l’interdiction de recevoir du public pour les ERP de certaines catégories (M : centre commerciaux, N : restaurants…etc)
L’arrêté du 15 mars 2020, limite strictement les déplacements de toute personne, pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle et des achats de première nécessité.
Ce confinement a amené, de fait, à la fermeture de nombre de commerces et de manière générale d’ERP (Etablissement recevant du public), à l’exception des commerces alimentaires et des pharmacies.
Les quelques enseignes autres, notamment de matériels de bricolage ou de matériels informatiques, qui avaient tenté de résister, ont finalement décidé, faute de clients, de fermer leurs portes, pendant la période dite de confinement.
La conséquence immédiate de la fermeture de ces établissements, est l’absence de chiffre d’affaires, tout en ayant un maintien des charges fixes, comprenant notamment le loyer commercial.
Certains estiment que les conditions de la force majeure, posées de manière générale par le code civil, seraient réunies (irrésistible, extérieur et imprévisible) et justifieraient que le preneur puisse suspendre son obligation de paiement de son loyer, qui serait dès lors le pendant de la « suspension » de la jouissance paisible du bien loué, résultant pour le bailleur de l’obligation de délivrance du bailleur.
Sans entrer dans l’analyse précise des conditions de mise en œuvre de la force majeure, que d’autres ont pu développer avec talent, il semble que les ERP visés en premier lieu, par les arrêtés relatifs au confinement, ne se sont pas vu imposer la fermeture stricto sensu de leurs établissements.
On se trouve d’avantage fasse à une atténuation du droit de jouissance plutôt qu’à une privation, dès lors que l’établissement n’est pas fermé.
Le preneur peut-il juste suspendre son obligation de payer le loyer ?
En raisonnant pas analogie, lorsqu’un ERP fait l’objet d’un arrêté de fermeture administrative en raison d’un manquement à une obligation de sécurité (incendie notamment) tel que cela est couramment le cas pour les commerces de restaurant, dans l’obligation de respecter les différentes normes en matière d’évacuation des fumées et des graisses, la jurisprudence retient habituellement, selon les clauses du bail, la responsabilité du bailleur et notamment que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance, justifiant la suspension du paiement du loyer.
La situation du confinement est tout à fait différente.
Le preneur n’a pas l’obligation légale de fermer son commerce et de cesser son activité. Il lui est juste interdit de recevoir du public.
Le gouvernement a d’ailleurs appelé à la mise en place du télétravail…
Par ailleurs, le même gouvernement a prévu des contreparties à ces interdictions de recevoir du public :
- Report et étalement du paiement du loyer pour la période concernée par le confinement ;
- Soutiens financiers divers et variés (prêts garantis par l’état, chômage partiel…etc)
On peut encore imaginer que les magistrats qui seraient saisis de demandes en paiement par les bailleurs ou même de demandes de constatation d’acquisition de clause résolutoire pour le non-paiement d’un terme de loyer portant sur cette période, des délais de paiement seraient accordés sans grandes difficultés.
Il me semble donc, dans ces conditions, téméraire de tenter d’opposer au bailleur la force majeure pour justifier la suspension de l’obligation de paiement du loyer.
Mais sans doute, qu’il apparaitra en jurisprudence, le cas exceptionnel qui justifiera que l’exception confirme la règle.
Jérôme BERNS
Avocat à la cour
Spécialisé en droit immobilier
jbernsavocat@gmail.com