Depuis la création de la Sécurité sociale à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l'Aide sociale est au fondement de notre système démocratique et le socle de notre devise républicaine " liberté, égalité, fraternité ".
Le Préambule de la Constitution de 1946 qui fait partie du Bloc de Constitutionnalité consacre un certain nombre de droits économiques et sociaux au rang desquels il a érigé le droit à la santé et à la solidarité pour toutes les générations.
L'aide sociale découle de ces grands principes et, de nos jours, on trouve parmi ces aides : les aides permettant l'autonomie des personnes handicapées comme l'APA, les aides sociales à l'hébergement ou encore les aides permettant de lutter contre la précarité de l'emploi comme le revenu de solidarité active remplaçant depuis 2008 le RMI et l'allocation parent isolé.
Le contentieux de l'aide sociale a connu une évolution importante avec la réforme issue de la loi du 18 novembre 2016 dite loi de modernisation de la Justice du XXIème siècle.
En effet, depuis cette réforme et le décret d'application n° 2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la Sécurité sociale et de l'Aide sociale et entré en vigueur le 1er janvier 2019, le contentieux de l'aide sociale est réparti entre d'une part, les Tribunaux de Grande Instance où exsitent un pôle social spécialement mis en place pour ce type de contentieux et, d'autre part, les Tribunaux Admnistratifs qui connaissent des litiges se rapportant à des prestations sociales spécifiques comme le RSA ou l'APA.
Dans tous les cas, la technicité de ce contentieux impose désormais de saisir préalablement au juge compétent, des Commissions de recours amiables (CRA) qui sont chargées d'instruire les demandes pré-contentieuses présentées en vertu de l'article L. 142-1 du Code de la sécurité sociale dont le champ comprend, à la fois, le contentieux de l'admission aux aides mais aussi celui du recouvrement de ces aides.
Ces recours préalables quelle que soit leur nature imposent à l'autorité saisie préalablement de respecter les dispositions régissant les relations entre le Public et l'Administration qui se trouvent désormais codifiées et reprises dans le Code de la sécurité sociale.
Une circulaire de la Direction de la sécurité sociale en date du 30 octobre 2018 dispose :
" Il est tout d’abord rappelé que, sauf disposition contraire prévue par le code de la sécurité sociale, les règles relatives aux recours préalables obligatoires prévues par le code des relations entre le public et l’administration (CRPA) sont applicables à ceux concernant les décisions des organismes de sécurité sociale.
Il s’agit notamment :
-
de l’inopposabilité des délais de recours préalables lorsque la décision contestée n’a pas
indiqué les voies et délais de recours (article L. 412-3 CRPA, réaffirmé au nouvel article
R. 142-1-A du code de la sécurité sociale) ;
-
de l’obligation de transmettre le recours préalable à l’autorité compétente, en cas d’erreur
de l’auteur (articles L. 114-2 à L. 114-4 CRPA) ;
-
de l’obligation d’accuser réception du recours (articles L. 112-1 à R. 112-20 CRPA) en y
mentionnant les voies et délais de recours (y compris le délai à compter duquel la demande doit être considérée comme rejetée), à peine d’inopposabilité de ces délais en cas de recours contentieux à l’encontre d’une décision implicite de rejet, comme rappelé à l’article R. 142-1-A CSS précité ;
-
de l’obligation de se prononcer sur le recours formé à l'encontre d'une décision sur le fondement de la situation de fait et de droit prévalant à la date de la décision de la commission chargée d’examiner le recours préalable (article L.412-5 CRPA) ;
-
de l’obligation de notifier les décisions prises suite à un recours préalable par tout moyen conférant date certaine (courrier recommandé avec accusé de réception, recommandé électronique) en y mentionnant là encore les voies et délais de recours ;
-
de l’obligation de motiver une décision de rejet ".
En matière de contentieux de l'aide sociale relevant de la compétence du Juge administratif (qui nous intéresse ici) est instauré, comme devant les juridictions judiciaires, un recours préalable qui doit être exercé auprès du Président du Conseil Départemental, autorité compétente pour statuer sur l'attribution ou non de ces aides.
Le Président du Conseil Départemental peut prendre l'avis de la commission de recours amiable en application de l'article L. 262-47 du Code de l'action sociale et des familles mais il peut ne pas procéder à une telle saisine quand l'objet du litige ne s'y prête pas.
S'agissant plus spécifiquement de toute demande de réclamation concernant l'attribution du RSA, le recours préalable devant le Président du Conseil Départemental est obligatoire avant toute saisine du Juge administratif à peine d'irrecevabilité de la demande.
Une exception est cependant prévue s'agissant des demandes de remise gracieuse ou de réduction du montant de la créance en cas de récupération par le Département d'un trop-perçu. Dans ce cas là, la demande se prescrit au bout de deux ans.
A noter que ce recours préalable obligatoire n'est pas régularisable en cours d'instance comme cela peut-être le cas pour d'autres types de contentieux dès lors que le délai de deux mois pour effectuer ce recours est toujours applicable dans le délai de recours contentieux.
Dans tous les cas, il est prévu que la saisine obligatoire de l'autorité administrative compétente doit s'effectuer, comme tout recours administratif, dans le délai de deux mois ce qui a pour effet de proroger le délai de recours contentieux de deux mois en attendant la réponse de l'autorité saisie.
Pour ce type de contentieux, il n'est pas prévu que le silence gardé par l'autorité compétente soit équivalente à un rejet puisque l'autorité chargé d'instruire la demande devra motiver sa décision en fait et en droit, décision qui se substituera à la décision rendue en premier lieu par les organismes sociaux.
Par ailleurs, le recours exercé devant le juge administratif est un recours de plein contentieux que cela concerne l'attribution ou la non attribution de l'aide mais aussi le remboursement ou la remise gracieuse du trop-perçu.
Le Conseil d'Etat l'a rappelé dans un arrêt du 7 juillet 2010 (req n° 337411) où il précise que :
"Il en résulte qu'il appartient au tribunal administratif, saisi d'une demande dirigée contre une décision suspendant le versement de l'allocation de revenu de solidarité active ou radiant l'intéressé de la liste des bénéficiaires de cette allocation, non seulement d'apprécier la légalité de cette décision, mais aussi de se prononcer sur les droits du demandeur à cette allocation jusqu'à la date à laquelle il statue, compte tenu de la situation de droit et de fait applicable au cours de cette période".
Je me tiens à votre disposition pour toutes précisions ou renseignements concernant mon activité et mes domaines de compétence.
Me Laurent JOURDAA : laurent.jourdaa.avocat@gmail.com ou 06. 47. 94. 48. 05.