« Comment un viol sur mineur peut-il être rétrogradé de crime à simple délit puni de 10 ans d'emprisonnement par le gouvernement dans son projet de loi sur les violences sexistes et sexuelles ? » se demandait sur Twitter un certain Benoit Hamon, ci-devant député, ministre, député frondeur, candidat à la présidentielle et actuellement responsable d'une start-up qui peine à décoller (ceci explique peut-être cela : il faut bien exister).
Eh bien Monsieur Hamon, soyez rassuré, cela ne se peut pas.
L'histoire récente du droit ne donne pas (sauf erreur qu'on voudra bien me signaler et je promets de faire amende honorable) d'exemples de faits dont les qualifications aient été « rétrogradées ».
Je parle bien entendu des qualifications juridiques et non de la pratique de la correctionnalisation, qui sera l'objet d'un prochain billet.
Ce serait plutôt tout le contraire et on a vu des faits délictuels devenir plus ou moins artificiellement criminels, par l'ajout de la circonstance aggravante de « bande organisée », bien commode notamment à l'ouverture du dossier (intérêt de la manœuvre : ouvrir un dossier au criminel, ce qui permet d'allonger la durée d'achèvement de l''information et surtout du mandat de dépôt. Il sera toujours temps ensuite de correctionnaliser, car la cour d'assises... non vraiment ça coûte trop cher).
Par ailleurs, « un simple délit puni de 10 ans d'emprisonnement » est une sorte d'oxymore et il fut un temps (bien lointain il est vrai) où ce qui caractérisait le délit, c'était que la peine ne pouvait pas dépasser 5 ans d'emprisonnement.
Dans ce domaine aussi, les plafonds ont eu tendance à monter et dans certains cas on encourt, en correctionnelle, par le jeu des circonstances aggravantes et de la récidive, des peines de 10 ou 20 ans.
A l'inverse, il n'existe pas d'exemple (sauf erreur, cf. supra) d'infractions dont la peine encourue ait été diminuée : le sens de l'histoire est à l'augmentation, dans à peu près tous les domaines.
Il est possible que le gouvernement s'y prenne mal pour traiter le problème réel du consentement à la relation sexuelle avant 15 ans, mais la question est très épineuse et difficile à traduire juridiquement.
Il est également permis de s'étonner que la question soit portée par la pétulante mais peu juriste Marlène Schiappa, plutôt que par la Garde des Sceaux, mais c'est un détail par rapport à l'enjeu.
En revanche, il paraît pour le moins audacieux de prêter à l'exécutif une quelconque complaisance sur les infractions sexuelles au sens large et encore plus de laisser croire qu'il veut transformer le viol, qui plus est sur mineur, en un délit.
On comprend bien la préoccupation de ceux qui s'inquiètent pour les enfants et personne de sensé ne peut entendre sans frémir qu'une fillette de 11 ans a consenti à une relation sexuelle avec un jeune homme de 28.
L'exécutif essaye de combler ce vide, peut-être maladroitement, mais il faut une certaine souplesse (j'allais dire malhonnêteté...) intellectuelle pour questionner ses intentions.