Des personnes imprudentes, pour ne pas dire inconscientes, ont cru devoir me demander de leur recommander des films ou des livres en lien avec la justice.
En principe seuls mes enfants (dans le temps) et mes stagiaires (je me venge sur elles) ont à subir ce traitement, pour la simple raison que eux n'ont pas le choix.
Mais bon, puisqu'on a insisté, je ne me ferai pas davantage prier et je propose ci-dessous quelques références qui peuvent, à mon humble avis, présenter un intérêt et à tout le moins occuper ce temps de confinement en joignant un peu l'utile à l'agréable.
Avertissement : ces modestes conseils sont purement subjectifs (donc d'un goût excellent) et ne prétendent à aucune exhaustivité, il y manque évidemment nombre de films que j'aurai oublié ou tout simplement pas vus.
Commençons par un constat : le procès français étant ce qu'il est, c'est à dire peu spectaculaire et sans rebondissements à l'audience, les films de procès et les personnages d'avocats sont assez rares dans le cinéma français, alors que c'est un genre cinématographique à part entière de l'autre côté de l'Atlantique.
Ainsi qu'on le verra dans les suggestions ci-dessous, les américains arrivent à rendre passionnant un procès civil, d'assurance ou de responsabilité... essayez ça en France, vous m'en direz des nouvelles.
Lorsque j'ai emménagé dans mes locaux actuels, j'ai voulu les décorer avec des affiches de films d'avocats : tout ce que j'ai trouvé était américain, c'est aussi simple que ça.
Je commencerai donc par les films qui avaient alors retenu mon attention :
Le film judiciaire le plus connu est certainement Douze hommes en colère, film militant et remarquable à tous points de vue. Une référence.
The Verdict, du même Sidney Lumet, avec Paul Newman, Charlotte Rampling et James Mason. Des vrais cas de conscience pour l'avocat, le déséquilibre entre la défense des riches et celle des gens de peu. Un must.
My cousin Vinny. Joe Pesci n'a pas seulement été le Leo Getz (anything you want, Leo Getz) de L'arme fatale, ni le psychopathe de Casino ou Goodfellas, il incarne ici un avocat qui a réussi l'examen au bout de la 6ème tentative (tiens ça me rappelle quelqu'un qui est tombé 9 fois et s'est relevé 10. Enfin c'est ce qu'il dit). Avec Marisa Tomei qui figure également au générique du film suivant.
The Lincoln lawyer. Le fameux Mickey Haller de Michael Connelly, incarné par Matthew McConaughey. On notera la plaque d'immatriculation de la Lincoln Town car dans laquelle il tient son cabinet.
The Rainmaker de Francis Ford Coppola. Outre Matt Damon en avocat débutant, on retrouve avec plaisir Mickey Rourke, Danny De Vito, Danny Glover et Jon Voight. Tiré d'un roman de Grisham qu'on ne retrouvera pas dans la partie littéraire des recommandations (autant j'adore les adaptations de ses livres, autant je trouve ces derniers pénibles à lire).
Cape Fear. La version originale, avec Gregory Peck et Robert Mitchum , ou le remake de Scorsese avec Robert De Niro et Nick Nolte. Dans lequel on apprend que l'avocat ne doit pas se faire le juge de son client : il est son défenseur et on ne défend pas mollement ou avec le frein à main. Soit on défend, sans restriction ni retenue, soit on ne prend pas le dossier.
Fracture, avec Ryan Gosling et Anthony Hopkins. On peut se défendre tout seul, mais est-ce une bonne idée ? Sans être extraordinaire, ce film se laisse regarder.
The Paradine case. Gregory Peck de nouveau, dans ce film de Hitchcock (son seul film de procès ? A part Cary Grant brièvement pour conduite en état d'ivresse dans North by Northwest). Sans spoiler : le cauchemar de l'avocat.
Witness for the prosecution de Billy Wilder, dont tous les films ou presque sont recommandables. Charles Laughton en avocat surnommé Wilfrid the fox (on l'avait vu en juge odieux dans le film précédent), Marlene Dietrich et Tyrone Power, trois grosses vedettes de l'époque mais dont les noms sont totalement inconnus des jeunes gens d'aujourd'hui... Désolé, je le ferai plus.
A Fish called Wanda, parce qu'il faut bien rigoler un peu et garder le moral, avec la bande des Monty Pythons. Le procès est d'un intérêt plus que modeste, mais John Cleese en avocat troublé par Jamie Lee Curtis (qui ne le serait?) est fort réjouissant.
A civil action, avec un inattendu John Travolta et William Macey. Je ne garantis pas le niveau de réalisme mais on y voit l'investissement d'un cabinet dans une cause, et le difficile équilibre entre les chances de gains et les conséquences d'un échec.
To kill a Mockinbird, brièvement évoqué ici (1). L'histoire est centrée sur la jeune Jean Louise « Scout » Finch mais le procès occupe une place assez importante. Gregory Peck dans le rôle d'Atticus Finch, qui prend à l'audience sa "lawyer's voice".
Music box, de Costa Gavras, une avocate défendant son propre père, accusé de crimes contre l'humanité pendant la guerre.
Amistad, de Steven Spielberg, ou comment traiter la question de l'esclavage sous un angle purement juridique... Attention, certaines scènes (le transport des esclaves à fond de cale) sont d'un réalisme insupportable.
Le pont des espions, Spielberg et Tom Hanks : les droits de la défense avant tout et au dessus de tout, quoi qu'il en coûte ou presque. On voit aussi, et c'est une constante dans le système américain, des distinctions que nous ne connaissons pas en France : on est avocat au civil, au pénal, ou en droit des assurances, ou en droits civiques et c'est en principe très cloisonné.
Class action : le père (Gene Hackman) et la fille (Mary-Elisabeth Mastrantonio) plaident l'un contre l'autre.
Runaway jury, avec John Cusack et Gene Hackman, le procès abordé sous l'angle original de la sélection du jury.
Midnight in the garden of good and evil, de Clint Eastwood, avec John Cusack, Jude Law et Kevin Spacey avant qu'il soit crucifié.
Fried green tomatoes : le film est culte pour d'autres raisons. Si ce n'est pas le centre de l'intrigue, il y a bien un vrai procès dedans.
Un film français quand même, sur un épisode historique particulièrement douloureux : Les sections spéciales.
J'aurais pu ajouter Les inconnus dans la maison, version Raimu ou Belmondo, Landru, L'honneur d'un capitaine, En cas de malheur et les films de Cayatte, on m'en fera sans doute le reproche mais je rappelle que cette sélection est subjective (donc je fais ce que je veux, compris ?).
Finissons avec les procès militaires, à une époque où on disait que la justice militaire était à la justice ce que la musique militaire est à la musique :
Ouragan sur le Caine, avec Humphrey Bogart et Van Johnson.
Les sentiers de la gloire, de Stanley Kubrick, avec Kirk Douglas : un procès pour l'exemple dans les tranchées de 1917 (à rapprocher d'Un long dimanche de fiançailles).
Plus récent, Des hommes d'honneur, avec Tom Cruise, Demi Moore et Jack Nicholson.
Je m'arrête là car même si le confinement dure, il y a là de quoi occuper pas mal de journée.
Bon courage à tous et surtout, restez chez vous !