La loi du 10 juillet 1965 pose un principe de répartition des charges générales proportionnelle à la valeur relative de chaque partie privative par rapport à l'ensemble des valeurs desdites parties.
Pour autant la méthode de répartition, figurant au réglement de propriété, nourrit un contentieux abondant notamment en raison de réglements non conformes aux réformes successives de la loi du 10 juillet 1965 mais aussi du fait de l'évolution de la situation des lots de copropriété. Pour parer à ces ventilation de charges obselètes et inéquitables, la loi a prévu des voies de recours.
Retour sur la décision de la Cour de cassation rendue dans un arrêt du 28 janvier 2016 qui vient réaffirmer les principes gouvernant le mode de répartition des charges générales et spéciales.
Le contexte de l'affaire est le suivant : un règlement de copropriété établi en 1956 et modifié en 1999 avait créé, dans un immeuble en copropriété, quatre nouveaux lots provenant de la division et de la transformation de parties communes. Ces lots avaient été cédés à un couple de nouveaux copropriétaires qui avait divisé un de ces lots en deux nouveaux lots constitués de combles. Ils avaient ainsi transformé leur appartement en un duplex comportant plusieurs pièces supplémentaires. Un copropriétaire dans l'immeuble avait fait porter à l'ordre du jour de l'assemblée générale une résolution visant à la nomination d'un géomètre expert aux fins d'établir un modificatif au règlement de copropriété, car les calculs des quotes-parts de charges générales et de charges d'escalier et d'ascenseurs devaient être révisés à la suite des modifications des valeurs relatives actuelles et de l'usage des parties privatives des lots nouveaux avec celles des autres lots de l'immeuble. L'assemblée rejeta la résolution.
Afin d'obtenir la modification du réglement de copropriété, le copropriétaire saisit le tribunal pour faire juger que les clauses du règlement d'origine étaient réputées non écrites sur la base de l'article 43 de la loi du 10 juillet 1965.
La cour d'appel déboute ce dernier de sa demande en nullité en considérant d'une part, que l'estimation de la valeur relative des parties privatives s'opère « lors de l'établissement de la copropriété » et que la clause de répartition des charges générales ne peut pas être déclarée non écrite sur le fondement de l'article 43, et, d'autre part, que la demande de modification de la répartition des charges relève, le cas échéant, des articles 25 f et 42 de la loi du 10 juillet 1965, et non pas de l'article 43 de la même loi.
L'affaire ci-présente soulève le problème de la modification de la répartition des charges établie dans le réglement lors de l'établissement de la copropriété.
Sous le visa des articles 5, 10 et 43 de la loi du 10 juillet 1965, la haute juridication censure la décision rendue en appel en considérant que "tout copropriétaire peut, à tout moment, faire constater l'absence de conformité aux dispositions de l'article 10, alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965, de la clause de répartition des charges, qu'elle résulte du règlement de copropriété, d'un acte modificatif ultérieur ou d'une décision d'assemblée générale et faire établir une nouvelle répartition conforme à ces dispositions."
Cette solution mérite d'être saluée sur deux points.
En premier lieu, l'arrêt revient sur les principes régissant le mode de répartition des charges générales et de services en opérant une distinction entre la détermination des quotes-parts de propriété des parties communes, fixée de manière intangible lors de la mise en copropriété, et la répartition des charges de copropriété pouvant évoluer dès lors qu'elle est en contradiction avec l'article 10 al 1er et 2 de la loi du 10 juillet 1965.
S'agissant des charges générales, l'arrêt fait application de la méthode posée à l'article 10 al 2 qui renvoit à l'article 5. Rappelons que la répartition de ces charges a un caractère d'ordre public auquel le réglement ne peut déroger.
Ainsi doit être considérée comme non écrite la clause de répartition des charges générales prévue au réglement lorsque la transformation d'un appartement a eu des répercussions sur la consistance, la superficie et la situations des lots en augmentant la valeur relative de ceux-ci par rapport à celle de l'ensemble des parties privatives de l'immeuble.
Concernant le mode de calcul des charges relatives aux services, l'article 10 al 1er, également d'ordre public fait référence au critère d'utilité. Ainsi, en cas de changement de consistance, de superficie ou de situation des lots d'origines, tout copropriété est fondé à demander une nouvelle répartition des charges en conformité avec les critères légaux.
En second lieu, l'arrêt rappelle que l'action en nullité d'une clause du réglement contraire aux modes de répartition légale des charges n'est pas encadrée par un délai de prescription. Ainsi, tout copropriétaire, à tout moment, peut faire déclarer non écrite tout clause d'un réglement non conforme à l'article 10.
En revanche, lorsque la répartition des charges est conforme à la loi mais présente un caractère lésionnaire à l'égard d'un copropriétaire, l'action en révision est soumise à la prescription quinquennale.
En conclusion, soulignons que tant que les clauses incriminées n'ont pas été déclarées non écrites par le juge, elles doivent recevoir application. Par ailleurs, la nouvelle répartition ne valant que pour l'avenir, toute somme versée par les copropriétaires en application des clauses annulées demeurent acquises au syndicat.