En l'absence de disposition à cause de mort (testament, donation entre époux) le Code civil organise la dévolution successorale légale du défunt. La dévolution et la répartition des droits varient selon que le défunt laisse ou non un conjoint survivant. Sera ici abordé uniquement la dévolution successorale légale en l'absence de conjoint survivant. Au préalable, il est nécessaire de déterminer l'aptitude d'une personne à héritier.
L'aptitude à hériter
La qualité d'héritier se prouve par tous moyens (art. 730-1 du Code civil). Le plus souvent, la qualité des héritiers est constatée dans un acte notarié : l'acte de notoriété. Cet acte constitue une preuve parfaite, il est réputé exacte et s'applique de plein droit en l'absence de preuve contraire.
Un héritier peut également demander que sa qualité d'héritier soit reconnue en justice, c'est ce qu'on appel une action en pétition d'hérédité. Cette hypothèse se présente principalement dans des contextes litigieux (exemple : enfant naturel que le défunt n’a pas officiellement reconnu au moment de sa naissance).
Pour qu'un héritier vienne à la succession du défunt, il doit remplir plusieurs conditions :
- Il doit exister au jour du décès, c'est-à-dire être né vivant et viable. Ce principe connaît une exception, celle de l'infans conceptus. Le Juge peut en effet décider de faire rétroagir la personnalité juridique d'un enfant in utero afin que celui-ci soit apte à hériter, alors même qu'il n'est pas encore né. L'enfant doit par la suite naître vivant et viable (ne pas être mort né).
- Il ne doit pas être frappé d'ingratitude ou d'indignité. Les causes d'indignité de plein droit sont prévues à l'article 726 du Code civil. Les causes d'indignité prévues à l'article 727 sont facultatives, elles ne peuvent être prononcées que par un Juge. Les descendants de la personne frappée d'indignité ou d'ingratitude sont aptes à hériter en son nom par le biais du mécanisme de la représentation (cf infra).
Les ordres et degrés de successibles
Les héritiers succèdent par ordre et par degré. La présence d'héritiers dans un ordre préférable exclue automatiquement ceux présents dans un ordre subséquent (ex : la présence d’héritiers du premier ordre exclue de la succession les héritiers des ordres 2, 3 et 4). De même, dans un même ordre les héritiers les plus proches en degré excluent les suivants (ex : si les héritiers de l’ordre 1 sont appelés à succéder, la présence d’enfant du défunt écarte les petits-enfants de la succession), sauf à tenir compte du mécanisme de la représentation.
Les ordres, c'est-à-dire les catégories de successibles, sont prévus à l'article 734 du Code civil qui dispose :
"En l'absence de conjoint successible, les parents sont appelés à succéder ainsi qu'il suit :
1° Les enfants et leurs descendants ;
2° Les père et mère [ascendants privilégiés] ; les frères et soeurs et les descendants de ces derniers [collatéraux privilégiés] ;
3° Les ascendants autres que les père et mère [ascendants ordinaires = grands-parents, arrières grands-parents, etc.] ;
4° Les collatéraux autres que les frères et soeurs et les descendants de ces derniers [collatéraux ordinaires = oncles et tantes, cousins et cousines, etc.]"
En cas de pluralité de successibles de même ordre et de même degré la succession est partagée à parts égales entre eux par tête, sans qu'il y ait lieu de distinguer le sexe ou l'origine de la filiation.
L'ordre des ascendants et collatéraux privilégiés
En l'absence d'enfants ou de descendants d'eux (1° ordre), les ascendants et collatéraux privilégiés sont appelés à la succession de la manière suivante :
Lorsque le défunt laisse uniquement ses deux ascendants privilégiés, chacun des père et mère se partage la succession à parts égales soit la moitié chacun.
Lorsque le défunt laisse uniquement des collatéraux privilégiés, chacun des frères et soeurs ou leurs descendants se partage la succession à parts égales par tête, quelle que soit l'origine de la filiation (germaine, utérine, consanguine ou adoptive).
Lorsque le défunt laisse uniquement ses deux ascendants privilégiés en concours avec des collatéraux privilégiés, chacun des père et mère a droit à un quart, les frères et soeurs se partagent l'autre moitié à parts égales par tête.
Lorsque le défunt laisse uniquement un seul ascendant privilégié et des collatéraux privilégiés, le père ou la mère survivant recueil un quart de la succession, les frères et soeurs se partagent les trois quart restant à parts égales par tête.
Lorsque le défunt laisse uniquement un ascendant privilégié en concours avec des ascendants ordinaires de l'autre branche, chacune des branches recueil la moitié de la succession soit la moitié pour le parent survivant et l'autre moitié partagée à parts égales entre ses grands-parents de la branche du parent prédécédé. Il y a ici application du mécanisme de la fente.
Lorsque le défunt laisse uniquement un ascendant privilégié et qu'il n'existe plus d'ascendants ordinaires de l'autre branche, le parent survivant recueil l'intégralité de la succession.
L'ordre des collatéraux ordinaires
La détermination des héritiers dans cet ordre est plus simple que dans l'ordre précédant, il suffit d'appliquer la règle générale : l'héritier le plus proche en degré évince automatiquement les autres. La représentation n'est pas admise dans cet ordre (exemple : si deux oncles d'une même branche sont successibles mais que l'un deux est prédécédé, ses enfants ne pourront pas venir en représentation pour hériter à sa place. L'oncle survivant recueil alors l'intégralité de la succession).
L’ordre des collatéraux ordinaires est dévolu jusqu’au 6eme degré inclus.
N.B : pour compter les degrés, il faut partir du défunt et remonter jusqu’a l’auteur commun (exemple : le défunt laisse pour lui succéder uniquement un neveu, alors : le père prédécédé du défunt constitue le 1er degré, le frère ou la sœur prédécédé(e) du défunt le 2ème degré et enfin le neveu le 3ème degré)
La représentation et la fente
La représentation est un mécanisme prévu par l'article 751 s. du Code civil. C'est une fiction juridique qui a pour effet d'appeler à la succession les représentants d'un successible prédécédé, inapte à hériter ou renonçant à la succession. Le mécanisme de la représentation ne joue pas dans tous les ordres, uniquement en ligne descendante (enfants, petits enfants, etc.) et pour les collatéraux privilégiés (frères et sœurs).
Exemple : si le défunt laisse deux sœurs dont une est prédécédée laissant elle-même deux enfants (nièces/neveux du défunt), alors les nièces/neveux viendront à la succession de leur oncle en représentation de leur mère prédécédée. Les neveux/nièces se partagent les droits que leur mère aurait eu si elle avait été encore en vie. La sœur survivante recueillir alors la moitié et les neveux/nièces se partagent à part égale l’autre moitié soit un quart chacun(e)s.
La fente est quant à elle une résurgence du droit coutumier antérieur au Code civil, le but étant de diviser les biens entre les deux branches (paternelle et maternelle) du défunt afin que le patrimoine ne parte pas dans une seule de ces branches. Elle s'applique essentiellement en ligne ascendante en présence d'ascendants ordinaires seuls ou en concours avec un ascendant privilégié.
Exemple : le défunt laisse sa mère et ses grands parents paternels, alors la succession est divisée en deux, une moitié revenant à la branche maternelle et l’autre à la branche paternelle, soit la moitié pour la mère du défunt, et l’autre moitié repartie à parts égalesentre ses grands parents paternels (un quart pour chaque grand parent paternel)