La diffusion d'extraits d'enregistrements d’une conversation obtenue en violation de l’article 226-1 du Code pénal, caractérise l’atteinte à la vie privée.
Dès lors, aucune justification n’est admise au titre de la liberté d’expression, sur le fondement de l'article 10 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (Liberté d’expression).
Telle est la portée d’un récent arrêt rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation, le 15 janvier 2015.
Un site web d’information a publié des extraits de conversations enregistrés par une personne travaillant au service d’une autre personne, et captés au domicile de cette dernière. La personne enregistrée se plaint d’une atteinte à l'intimité de sa vie privée, infractions prévues et réprimées par les articles 226-1 et 226-2 du Code pénal.
La Cour d’appel a retenu que la diffusion d'enregistrements provenait de l'intrusion dans l’intimité de la victime, caractérisant une atteinte à la vie privée de cette dernière.
Un pourvoi a été formé contre cet arrêt. Les demandeurs soutenaient qu’une atteinte à la vie privée suppose aussi que les propos diffusés portent effectivement atteinte à l'intimité de la vie privée.
La publication dans la presse d'enregistrements ne saurait constituer un trouble manifestement illicite si elle est justifiée au nom de la liberté d'expression.
Les demandeurs soutenaient la nécessité de s’attacher au contenu des informations publiées.
La Cour rejette.
Constitue une atteinte à l'intimité de la vie privée, non légitimée par l'information du public, la captation, l'enregistrement ou la transmission sans consentement des auteurs à titre privé ou confidentiel.
Cet arrêt enseigne que la liberté de communiquer des informations est soumise à des restrictions prévues par la loi, nécessaires dans une société démocratique, à la protection des droits d'autrui afin d'empêcher la divulgation d'informations confidentielles, notamment le droit au respect de la vie privée, fondée sur l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
La Cour de cassation vient confirmer son interprétation de l’article 226-1 du Code pénal qu’elle avait posée de deux précédents arrêts (Cour de cassation, 1 ère chambre civile, 5 février 2014 n°13-21929 et Cour de cassation, 1 ère, 3 septembre 2014 n°14-12200).
La Cour de cassation s’attache dès lors à considérer les atteintes indépendamment des propos enregistrés.
Si les enregistrements ne révèlent pas d’informations privées, l'atteinte est caractérisée par le seul enregistrement clandestin des propos de la personne
Le critère jurisprudentiel « conception-objet-durée » a été mis en place par la Cour de cassation dans son arrêt, 1 ère , 3 septembre 2014 n°14-12200).
La Cour de cassation s’attache désormais à trois critères cumulatifs pour caractériser l’atteinte à la vie privée :
– le caractère clandestin de l’atteinte ;
– la localisation de l’enregistrement ;
– et la durée de l’enregistrement,
En l’espèce, les enregistrements avaient été effectués au domicile de la victime, à son insu et pendant un an.