Dans le monde entier, les yeux sont tournés vers les manifestations organisées par tous les acteurs impliqués dans la lutte contre l’impunité pour célébrer le dixième anniversaire de l’entrée en vigueur du Statut de Rome en 2002, qui a porté création à la première cour internationale permanente chargée de juger le génocide, les crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Cet anniversaire est une occasion précieuse pour réfléchir sur les réalisations accomplies en matière de la justice pénale internationale au cours de ces 10 dernières années, et pour rappeler que les Etats qui se sont engagés à la justice combien il est essentiel d’assurer un soutien continu au Statut de Rome.
C’est fort de ce contexte que la première décision de la CPI vient d’être rendue. En effet, lors de l’audience de prononcé de sa peine le 10 juillet 2012, la Chambre de première instance de la Cour pénale internationale (CPI) a condamné Thomas Lubanga Dyilo à une peine totale de 14 ans d'emprisonnement.
La Chambre, composée des juges Adrian Fulford, Elizabeth Odio Benito et René Blattmann, a aussi ordonné que le temps écoulé entre la date de sa remise à la CPI, le 16 mars 2006, et le 10 juillet 2012 soit déduit de cette peine. Le 14 mars 2012, Thomas Lubanga Dyilo avait été déclaré coupable des crimes de guerre consistant à avoir procédé à la conscription et à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans et à les avoir fait participer activement à des hostilités du 1er septembre 2002 au 13 août 2003 en Ituri (République démocratique du Congo).
Il ressort du résumé de la décision de la Chambre faite par le juge président, Adrian Fulford, que la Chambre a évalué la gravité de ces crimes dans les circonstances de l’espèce en tenant compte, entre autres considérations, de l’ampleur du dommage causé, et en particulier du préjudice causé aux victimes et aux membres de leur famille, de la nature du comportement illicite et des moyens qui ont servi au crime ; du degré de participation de la personne condamnée ; du degré d’intention ; des circonstances de temps, de lieu et de manière ; de l’âge ; du niveau d’instruction et de la situation sociale et économique de la personne condamnée.
Les crimes pour lesquels M. Lubanga a été déclaré coupable, à savoir la conscription et l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans ainsi que le fait de les avoir fait participer activement à des hostilités, sont indubitablement des crimes très graves, qui touchent la communauté internationale dans son ensemble.
Du fait de leur vulnérabilité, les enfants ont besoin d’une protection particulière, qui ne s’applique pas à la population générale, comme le reconnaissent divers traités internationaux.
Il sied de noter que la Chambre a, cependant, tenu compte de certains aspects du comportement de M. Lubanga, en particulier sa coopération certaine avec la Cour et son attitude respectueuse pendant toutes les procédures.
La juge Odio Benito a rédigé une opinion individuelle et dissidente sur une question particulière. Elle se dissocie de la décision des deux autres juges dans la mesure où elle est d’avis que celle-ci ne tient pas compte du préjudice causé aux victimes et aux membres de leur famille, et en particulier de celui dû aux sévères punitions et violences sexuelles qu’ont subies les victimes de ces crimes.
Cette affaire nous donne donc l’occasion de réfléchir sur les actions passées et faire l’évaluation de l’avenir de la CPI, dix ans après son existence.