Les faits : La Cour Constitutionnelle vient de réhabiliter le Vice-Gouverneur de la province du Haut-Katanga, Martin KAZEMBE SHULA qui fut récemment déchu en janvier 2025 dans l’affaire de désaffectation d’un hectare et 30 ares du lac Tshombe au quartier Baudouin dans la ville de Lubumbashi. Cette affaire rappelle une autre qui avait concerné un autre KAZEMBE, « Jean Claude KAZEMBE MUSONDA » en 2017, lui, Gouverneur de ladite province sans reprendre ses fonctions malgré l’arrêt de la Cour Constitutionnelle en sa faveur, mais qui a souffert de son exécution, et a été – délibérément - ignoré à tous les niveaux du pouvoir, du Gouvernement jusqu’à la Cour d’Appel du Haut-Katanga. En sera-t-il diffèrent avec l’arrêt Martin KAZEMBE ?
En Droit : Les affaires de destitution et de réhabilitation de Jean-Claude Kazembe Musonda et de Martin Kazembe Shula soulèvent des questions fondamentales sur la nature de l’« État » en RDC. La distinction entre un État de Droit, où les décisions de justice sont exécutées sans ingérence politique, et un État Politique, marqué par l’influence des pouvoirs politiques sur les décisions judiciaires et administratives, est au cœur de ce débat.
La non-exécution de l’arrêt R.Const. 469 du 26 mai 2017 par la Cour Constitutionnelle, réhabilitant Jean-Claude Kazembe, illustre les défis persistants pour l’autorité et l’indépendance du système judiciaire en RDC. Bien que la Cour Constitutionnelle ait été instaurée pour renforcer l’État de Droit, la sélectivité et la non-exécution de certaines de ses décisions compromettent la crédibilité du système judiciaire et sapent la confiance des citoyens.
L’article 168 de la Constitution, qui dispose que les arrêts de la Cour Constitutionnelle sont immédiatement exécutoires et obligatoires pour toutes les autorités publiques et les particuliers, souligne l’importance de respecter ces décisions pour maintenir l’État de Droit. Cependant, les pesanteurs politiques ont souvent prévalu, comme le démontre l’ignorance flagrante des décisions de la Cour dans le cas du Gouverneur Kazembe. Le récent arrêt en faveur du Vice-Gouverneur Martin Kazembe par la Cour Constitutionnelle est un nouveau test pour les autorités congolaises. Leur réaction à cette décision sera déterminante pour évaluer leur engagement envers l’État de Droit et la transparence.
Ainsi, pour consolider l’État de Droit en RDC, il est impératif que toutes les décisions de justice soient exécutées de manière transparente et impartiale. La crédibilité du système judiciaire et la confiance des citoyens en dépendent. La question demeure donc : sommes-nous dans un État de droit ou un État de politique ? La réponse à cette question réside dans la capacité des institutions à respecter et à exécuter les décisions judiciaires sans ingérence politique. Qu’en dire si déjà, les signaux sont lancés par la lettre du VPM et Ministre de l’Intérieur adressée à l’Assemblée provinciale du Haut Katanga fustigeant une destitution « cavalière ». Cet activisme semble déjà sonner le glas !
En somme, retenons qu’au regard des dispositions de l’article 168 de la constitution, reprises par l’article 95 al. 2 de la loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 et l’article 37 al. 2 du Règlement intérieur de la Cour, l’autorité de la chose jugée attachée aux décisions de la Cour constitutionnelle, impose une double obligation, à savoir, d’une part, l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision juridictionnelle et, d’autre part, l’obligation de ne rien faire qui soit en contradiction avec une telle décision. Faisons qu’il en soit ainsi et ce, de façon non partisane !
Me Joseph YAV KATSHUNG