« Puissance paternelle » exercée par les père et mère, une incongruité du droit sénégalais de la famille ?

Publié le 06/04/2025 Vu 438 fois 0
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L’appellation de « puissance paternelle », bien qu’elle inclue juridiquement le père et la mère au Sénégal, peut être perçue comme une incongruité. Qu’en dire de plus ?

L’appellation de « puissance paternelle », bien qu’elle inclue juridiquement le père et la mère au Sé

« Puissance paternelle » exercée par les père et mère, une incongruité du droit sénégalais de la famille ?

Les faits : Dans le cadre de la législation sénégalaise, la question de l’autorité parentale a été soulevée par la députée MBACKE, qui a interrogé le Ministre de la Justice, sur les problèmes liés à la puissance paternelle dans le Code de la famille. Dans sa réponse du 19 mars 2025- qui circule sur les réseaux sociaux - ce dernier répond que « le concept d’autorité parentale n’existe pas dans le cadre juridique sénégalais. Seule la notion de puissance paternelle est reconnue, conformément à l’article 277 du Code de la famille, qui attribue conjointement cette puissance au père et à la mère... Une révision législative est donc jugée inutile » [Sic]. Cela fait débat et mérite une brève comparative avec le droit congolais de la famille.

 

En Droit : On a depuis longtemps conscience du pouvoir des mots. Ils ne sont jamais anodins ; le vocabulaire du législateur encore moins. Ils ont des conséquences importantes car on sait tous qu’il existe un lien étroit entre les pensées, les mots et les actes. Sans avoir toujours besoins d’interprétation, ils sont révélateurs d’une réalité. Ainsi, de par la notion de « puissance paternelle », patria protestas, issu du droit romain régit au XVIIe siècle, le législateur sénégalais exclue-t-il d’emblée la mère si ce n’est juridiquement du moins « notionellement ».

 

En effet, la notion de « puissance paternelle » dans le droit sénégalais, comme mentionné dans la réponse du ministre, est une particularité qui diffère de l’autorité parentale ou de la puissance parentale adoptée dans de nombreux systèmes juridiques modernes. En droit sénégalais, la puissance paternelle est attribuée conjointement au père et à la mère, mais son exercice est souvent réservé au père, sauf en cas de divorce où le parent ayant la garde de l’enfant en devient le détenteur.

 

En RDC, le Code de la famille, tel que modifié par la loi n°16/008 du 15 juillet 2016, met davantage l’accent sur l’autorité parentale, qui est exercée conjointement par les deux parents, sans privilégier un sexe sur l’autre. Ainsi, en droit congolais, l’autorité parentale est conçue comme une responsabilité partagée entre les parents, visant à garantir le bien-être et les droits de l’enfant. Mais tout n’est pas encore parfait.

 

Ainsi, l’usage du terme « puissance paternelle » dans le droit sénégalais à son article 277 du code de la famille, combiné à une répartition genrée des responsabilités parentales, peut effectivement être perçu comme une incongruité. En effet, l’appellation même de « puissance paternelle », bien qu’elle inclue juridiquement le père et la mère au Sénégal, peut être perçue comme intrinsèquement patriarcale. Elle semble privilégier la figure paternelle sur le plan sémantique et symbolique, ce qui va à l'encontre des évolutions sociétales prônant l’égalité entre les sexes.

 

En comparaison, des termes comme « autorité parentale », qui favorisent une approche égalitaire sans biais genré apparent. La réponse du ministre mentionne que, durant le mariage, l’exercice de la puissance paternelle est exclusivement attribué au père. Cela crée une disparité entre les parents, remettant en cause l’égalité des responsabilités parentales. Cette disposition est en contradiction avec les engagements internationaux, tels que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ratifiée par le Sénégal et le Protocole à la charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique, communément appelé « Protocole de Maputo ». Deux textes internationaux qui l’obligent juridiquement à corriger les discriminations basées sur le genre.

 

Bien plus, le ministre conclut que la révision du Code de la famille n’est pas nécessaire, malgré les implications sociales et juridiques de ce cadre. Cela est tout simplement une résistance institutionnelle à aligner le droit national sur des principes modernes de justice et d’égalité, tel qu’encouragé par le droit international et à la pressante demande de sa population. Un peu de courage, cher Ministre !

 

Me Joseph YAV KATSHUNG

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