L’institution des immunités juridictionnelles et d’exécutions se situe à la croisée des chemins du droit international et du droit interne. De par leur fondement conceptuel, intimement lié à la notion typiquement internationaliste d’égalité souveraine des États, elle occupe une place centrale dans la géographie de l’ordre juridique international. Mais par leur mise en œuvre et les conséquences pratiques qu’elles peuvent avoir pour les justiciables, les immunités se manifestent avant tout devant et par le biais des juridictions internes.
Suite aux développements dans le domaine de la protection internationale des droits de l’homme, le principe même de l’immunité subit actuellement une remise en cause face à l’affirmation du droit à l’accès au juge et à l’exécution des décisions. Un passage par ces aspects nous semble ainsi nécessaire pour rendre compte de manière circonstanciée de la pratique Congolaise en matière d’immunités d’exécution.
Traditionnellement, en République Démocratique du Congo [RDC] comme à l’étranger, il est admis que certaines personnes échappent à la juridiction des tribunaux d’un Etat déterminé. Cette limitation de pouvoir de juridiction que l’Etat confère normalement à ses tribunaux s’explique par des raisons tirées du Droit International Public. Elle paraît souvent se confondre avec l’incompétence internationale des tribunaux.
En vertu, semble-t-il, d’une idée de courtoisie internationale , les tribunaux d’un pays ne peuvent reconnaître, en principe, les actions dirigées contre :
1. les Etats étrangers pour des actes de puissance publique ou pour ceux accomplis dans l’intérêt d’un service public ;
2. les Souverains et Chefs d’Etats (ou Chefs de gouvernement, ministres en déplacement) du moins pour les actes de leur vie publique ;
3. des agents diplomatiques dans des pays où ils exercent leurs fonctions. Il s’agit d’une véritable immunité personnelle, même pour des questions purement privées, car, pour remplir leur mission, ils doivent être affranchis de toute dépendance à l’égard des juridictions locales. Aux agents diplomatiques, on y ajoute le personnel officiel des ambassades y compris l’épouse du diplomate et , d’après une certaine jurisprudence la suite privée des ambassadeurs (chauffeurs, domestiques étrangers ).
4. des nombreux d’organismes internationaux ;
5. des consuls, dans une faible mesure, parce qu’ils ne font pas partie du personnel diplomatique sauf, bien sûr les consuls de carrière .
Ces derniers bénéficient en RDC d’un privilège limité en vertu duquel les autorités congolaises ne peuvent, sous aucun prétexte, pénétrer dans la chancellerie d’un consul de carrière sujet du pays qui l’a nommé et n’exerçant aucun commerce, excepté si le consul a donné asile à des personnes tombant sous le coup des poursuites criminelles. Dans la pratique, notons que les autorités congolaises ne traquent pas les présumés criminels qui s’y refugient.
Par ailleurs, « sous cette réserve, les biens personnels des consuls sont toujours saisissables ; en outre, lorsqu’un consul exerce une profession ou un commerce, sa chancellerie n’est pas inviolable et, à condition d’éviter de toucher aux papiers officiels qui seraient tenus dans un local spécialement affecté à cette fin ; les autorités congolaises peuvent toujours y perquisitionner .
Enfin, il faut noter que les bénéficiaires de l’immunité de juridiction sont également protégés par une immunité d’exécution qui fait échec, dans les cas où l’immunité de juridiction aurait été écartée, à la réalisation du droit reconnu par une juridiction.