Les faits : La Cour pénale internationale [CPI], en tant qu’institution judiciaire internationale, s’appuie sur une liste d’avocats qualifiés pour garantir une représentation juridique éthique. Maître X, inscrit au Barreau en RDC, a rejoint cette liste en 2007 avec l’engagement de notifier toute modification de sa situation professionnelle. En septembre 2008, il a été suspendu pour un an par le Conseil de l’Ordre du Barreau, sanction confirmée en appel en février 2009 par le CNO. Cependant, Maître X n’a pas informé le Greffier de la CPI de cette suspension. Ce n’est qu’en février 2009 que le Bâtonnier National de la RDC a notifié la CPI. En réponse, une plainte disciplinaire a été déposée en juin 2009. Après le blâme infligé par le Comité de discipline de la CPI qui a jugé cette omission comme une faute professionnelle grave, la procédure en appel a conduit à la radiation de Maître X de la liste. Cette affaire suscite des débats sur l’équité procédurale et les obligations des avocats.
En Droit : La CPI a pour mission de poursuivre et punir les auteurs des crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. Le Statut de Rome garantit aux victimes, aux accusés et, sous certaines conditions, aux suspects le droit de se faire assister par un conseil - de permanence ou désigné dans le cadre de la règle 74 du Règlement de procédure et de preuve- inscrit sur la liste des conseils. Pour figurer sur la liste des conseils, les candidats doivent satisfaire aux exigences énoncées à la règle 22 du Règlement de procédure et de preuve et à la norme 67 du Règlement de la Cour. En prêtant serment, Maître X s’était engagé à respecter les normes éthiques et à informer la Cour de tout changement dans sa situation. Selon l’article 31-a du Code de conduite professionnelle des Conseils, un avocat commet une faute professionnelle s’il enfreint une obligation éthique ou professionnelle importante. La norme 69-3 du Règlement de la Cour impose aux avocats d’informer immédiatement le Greffier de tout changement notable dans leur situation, y compris des sanctions disciplinaires. Il a été conclu que Maître X avait enfreint ses obligations en omettant d’informer la CPI de sa suspension.
Cette affaire met en lumière un différend sur l’interprétation du respect des obligations déontologiques au niveau international. Il eut une décision de la majorité et une opinion dissidente d’un juge qui illustrent une divergence d’interprétation du droit et des faits. La majorité s’appuie sur l’article 67(2) du Règlement de la Cour, qui interdit toute faute disciplinaire incompatible avec les fonctions de conseil. En adoptant une approche stricte, elle considère que la poursuite de l’activité de Maître X après sa suspension par le Barreau de son pays constitue une violation grave des normes professionnelles. Elle juge que Maître X aurait dû cesser de pratiquer dès sa suspension en RDC. En revanche, l’opinion dissidente défend une approche contextuelle, soulignant que la lettre du Greffier, en avril 2009, était ambiguë et pouvait laisser entendre à Maître X qu’il pouvait continuer à représenter ses clients. Que cette ambiguïté aurait dû être considérée comme un facteur atténuant et que les actions de Maître X ne sont pas intrinsèquement « incompatibles » avec ses fonctions. Qu’il agissait en bonne foi et conformément à une interprétation raisonnable des directives implicites.
Cette divergence met en lumière le défi d’équilibrer rigueur déontologique et flexibilité contextuelle. Cerise sur le « gâteux », le Bâtonnier National d’antan a joué un rôle clé dans cette procédure disciplinaire. A première vue, cette démarche s’inscrit dans ses responsabilités de garantir la transparence et l’intégrité des pratiques professionnelles des avocats inscrits au Barreau. Cependant, il est légitime de se demander si – lui-même conseil - n’avait un intérêt particulier à voir Maître X mis en touche ? Comble de tout, lui-même fut radié en RDC, quelques années après. Cerise sur le « gâteau », les deux sont repris sur la liste des conseils établi le 24 février 2025. [sic] Avocats, demeurons « au garde à vous » de la déontologie !
Me Joseph YAV KATSHUNG