Convention d’occupation précaire et risques de requalification en bail commercial

Publié le Modifié le 12/05/2016 Vu 15 908 fois 0
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Civ. 3ème, 15 octobre 2014, 13-20085

Civ. 3ème, 15 octobre 2014, 13-20085

Convention d’occupation précaire et risques de requalification en bail commercial

Définie hier par la jurisprudence, la convention d’occupation précaire est caractérisée par le fait que l’occupation des lieux n’est autorisée qu’à raison de circonstances exceptionnelles et pour une durée dont le terme est marqué par d’autres causes que la volonté des parties (voir par exemple Civ. 3ème, 19 novembre 2003).

La loi n°2014-626 du 18 juin 2014, dite « Loi Pinel » a consacré son existence ; l’article L 145-5-1 du code de commerce dispose aujourd’hui que n’est pas soumise au statut des baux commerciaux « la convention d’occupation précaire, qui se caractérise, quelle que soit sa durée, par le fait que l’occupation des lieux n’est autorisée qu’à raison de circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties. »

Elle revêt un intérêt pratique considérable, permettant par exemple l’occupation d’un immeuble voué à la démolition ou, au contraire, en attente d’une construction, tout en excluant les règles contraignantes liées au statut des baux commerciaux ; ou bien encore l’occupation commerciale dans l’attente d’une promesse de vente ou d’un terrain voué à la création d’une zone industrielle.

Naturellement, les tribunaux exercent un contrôle attentif des circonstances ayant donné lieu à la conclusion d’une convention d’occupation précaire, n’hésitant pas procéder à sa requalification si le critère de précarité fait défaut.

L’arrêt rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation le 15 octobre 2014 en est une illustration.

Dans cette affaire, après avoir mis fin prématurément au bail commercial qui les unissait, les parties avaient conclu, pour les mêmes locaux, une convention de deux ans excluant expressément le statut des baux commerciaux.

Les cocontractants s’étaient ensuite accordés pour proroger le bail d’un an, afin de permettre notamment à l’occupant de mener à bien sa mission de dépollution et d’organiser le transfert de son activité.

Au terme de ces trois années d’occupation, s’écharpant notamment pour des problèmes de paiement de loyers, le preneur prétendait que la convention d’occupation précaire, même prorogée, excluait toute application des règles du code de commerce relatives aux baux commerciaux et l’autorisait à donner congé sans formalisme particulier.

Son argumentation n’a été suivie ni par les juges du fond, ni par la Cour de cassation.

En effet, les juges ont raisonné ainsi : le bail convenu entre les parties excluait la soumission au statut mais ne présentait pas de motif de précarité, il ne pouvait alors nécessairement s’agir que d’un bail dérogatoire au sens de l’article L 145-5 du code de commerce.

Or, un tel bail dérogatoire ne peut avoir sa durée prolongée au-delà de deux ans ; le maintien dans les lieux du preneur après cette période biennale soumet automatiquement les parties au statut des baux commerciaux.

Les juges en concluent donc qu’un bail commercial est né entre les parties. Le preneur n’ayant pas donné congé dans les formes requises, il doit être condamné au paiement des loyers jusqu’au terme de la période triennale entamée.

La solution est particulièrement sévère pour l’occupant et permet de rappeler avec quelle précaution le motif de précarité doit être exposé dans la rédaction d’une convention d’occupation.

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