L'article 179 du code de procédure pénale (CPP) est intégré dans une section du code intitulée « Des ordonnances de règlement. » Il intervient donc en toute fin de procédure, lorsque que le juge d'instruction estime que l'information judiciaire qu'il a menée arrive à son terme.
Pour autant, ces dispositions sont particulièrement variées et peu intelligibles pour des profanes. Car en effet, l'article 179 CPP concentre à lui seul plusieurs difficultés procédurales.
Il convient donc d'en préciser le sens, pour chacun des six alinéas.
I/ Le premier alinéa
"Si le juge estime que les faits constituent un délit, il prononce, par ordonnance, le renvoi de l'affaire devant le tribunal correctionnel. Cette ordonnance précise, s'il y a lieu, que le prévenu bénéficie des dispositions de l'article 132-78 du code pénal."
Le premier alinéa de l'article prévoit les dispositions relatives au renvoi du ou des mis en examen devant le Tribunal correctionnel territorialement compétent. En effet, une fois l'information judiciaire achevée, le juge d'instruction doit trancher : soit les éléments du dossier ne permettent pas de dire que le ou les mis en examen ont commis, tenté de commettre ou participé au délit visé – dans ce cas le non-lieu s'impose - , soit il estime que les éléments dont il dispose caractérisent un délit et donc il rend une ordonnance de renvoi devant le Tribunal correctionnel. Dans l'un ou l'autre des cas, il s'agit d'une ordonnance dite de règlement.
Par ailleurs, le juge d'instruction peut prévoir dans son ordonnance que le mis en examen bénéficie des dispositions relatives à l'exemption ou à la réduction de la peine encourue. Ce sont les dispositions de l'article 132-78 du code pénal. Elles sont applicables dès lors que la personne mise en examen a permis, par son action, ses informations, de faire cesser une infraction ou d'éviter la commission d'un crime ou d'un délit. En réalité il s'agit d'une atténuation de la peine lorsque le mis en cause apporte son concours à la procédure.
II/ Le deuxième alinéa
« L'ordonnance de règlement met fin à la détention provisoire, à l'assignation à résidence avec surveillance électronique ou au contrôle judiciaire. S'il a été décerné, le mandat d'arrêt conserve sa force exécutoire ; s'ils ont été décernés, les mandats d'amener ou de recherche cessent de pouvoir recevoir exécution, sans préjudice de la possibilité pour le juge d'instruction de délivrer un mandat d'arrêt contre le prévenu. »
Dans ce deuxième alinéa, le texte précise que l'ordonnance de règlement prise par le magistrat instructeur – quel que soit son sens – met fin aux mesures de restriction ou de privation des libertés prises au cours de l'information judiciaire : détention provisoire, assignation à résidence avec surveillance électronique ou contrôle judiciaire.
En revanche, lorsqu'une personne qui devait être arrêtée dans le cadre de la procédure dirigée par le juge d'instruction, n'a pu l'être car elle demeure introuvable, alors le magistrat instructeur, à tout moment de la procédure, délivre un mandat d'arrêt. Ce mandat d'arrêt est toujours applicable lorsque la personne n'a pas été interpellée au moment de la délivrance de l'ordonnance de règlement – en fin d'information -.
Toutefois, les mandats de recherche et d'amener cessent leurs effets. On rappelle que le mandat de recherche vise à ordonner à la force publique de rechercher et de place en garde à vue la personne à l'encontre de laquelle il est décerné – contrairement au mandat d'arrêt qui ordonne à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la conduire à la Maison d'Arrêt indiquée en vue de sa détention. Le mandat d'amener, pour sa part, est l'ordre donné à la force publique de conduire immédiatement la personne à l'encontre de laquelle il est décerné devant le magistrat qui l'a émis.
Ainsi, aux termes de l'alinéa 2 de l'article 179 CPP, le mandat d'arrêt conserve ses effets postérieurement à la délivrance de l'ordonnance de règlement, ce qui n'est pas le cas du mandat d'amener ou de recherche.
III/ Le troisième alinéa
« Toutefois, le juge d'instruction peut, par ordonnance distincte spécialement motivée, maintenir le prévenu en détention, sous assignation à résidence avec surveillance électronique ou sous contrôle judiciaire jusqu'à sa comparution devant le tribunal. L'ordonnance de maintien en détention provisoire est motivée par référence aux 2°, 4°, 5° et 6° de l'article 144. »
Le troisième alinéa consacre la possibilité pour le juge d'instruction de maintenir une personne mise en examen en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement. Il s'agit là d'une atténuation au principe selon lequel le juge des libertés et de la détention (JLD) dispose d'un monopole en matière de détention provisoire (en première instance). Ici, la loi permet au juge d'instruction, en rendant une ordonnance distincte appelée ordonnance de maintien en détention provisoire, de s'assurer que le prévenu renvoyé devant la juridiction de jugement restera en Maison d'Arrêt – à charge pour ce dernier d'interjeter appel de cette décision devant la Chambre de l'Instruction -.
Il est précisé que l'ordonnance de maintien en détention doit être motivée. Sa motivation doit s'appuyer sur au moins l'une des dispositions suivantes, notamment contenues à l'article 144 CPP :
-empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;
-protéger la personne mise en examen ;
-garantir le maintien de la personne mise en examen à disposition de la justice ;
-et mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement.
Outre la privation de liberté, le juge d'instruction peut maintenir la personne mise en examen sous une mesure de contrainte prévue par la loi : assignation à résidence avec surveillance électronique ou contrôle judiciaire.
IV/ Le quatrième alinéa
« Le prévenu en détention est immédiatement remis en liberté si le tribunal correctionnel n'a pas commencé à examiner au fond à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date de l'ordonnance de renvoi. »
Aux termes de cet alinéa, l'ordonnance de maintien en détention provisoire délivrée par le juge d'instruction ne peut excéder un délai de deux mois à compter de son ordonnance de règlement – logiquement une ordonnance de renvoi devant le Tribunal correctionnel ou de mise en accusation devant la Cour d'Assises.
Au-delà de ce délai, la personne mise en examen sera remise en liberté dès lors que la juridiction de jugement n'a pas examiné l'affaire au fond. C'est-à-dire tant que l'affaire n'a pas été évoquée devant cette juridiction.
V/ Le cinquième alinéa
« Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut se tenir avant l'expiration de ce délai, le tribunal peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de deux mois. La comparution personnelle du prévenu est de droit si lui-même ou son avocat en font la demande. Cette décision peut être renouvelée une fois dans les mêmes formes. Si le prévenu n'a toujours pas été jugé à l'issue de cette nouvelle prolongation, il est remis immédiatement en liberté. »
Le cinquième alinéa intervient en tant que tempérament à l'article précédent. Car si le maintien en détention provisoire ne peut pas excéder la durée de deux mois à compter de l'ordonnance de règlement, la juridiction de jugement pourra, si elle n'a pas encore évoqué l'affaire, et par une décision spéciale et motivée, décider de prolonger la détention pour un nouveau délai de 2 mois. Par ailleurs, selon les mêmes formes, un nouveau délai de 2 mois (soit 4 mois au total) pourra être prononcé.
À l'issue de cette ultime prolongation, si le prévenu n'a toujours pas comparu pour l'audience de jugement, alors il devra être remis en liberté – s'il n'est détenu pour autre cause -.
VI/ Le sixième alinéa
« Lorsqu'elle est devenue définitive, l'ordonnance mentionnée au premier alinéa couvre, s'il en existe, les vices de la procédure. »
Enfin, les dernières dispositions de l'article 179 CPP mentionnent le mécanisme automatique de purge des vices qui affectent éventuellement la procédure.
Car si en effet, tout au long de la procédure, les parties ont la possibilité de saisir la Chambre de l'Instruction d'une requête en nullité afin de soulever les éventuelles difficultés, vices, qui pourraient se poser. La loi met en place un mécanisme de purge automatique de ces vices, lorsqu'ils n'ont été préalablement soulevés. Dès lors, le sixième alinéa de l'article 179 CPP dispose que lorsque l'ordonnance de règlement devient définitive, c'est-à-dire lorsque les délais ouvrant les recours sont dépassés, alors le juge d'instruction est dessaisi de l'entier dossier et la procédure sera automatiquement purgée des vices éventuels.
En tout état de cause il apparaît que la compréhension de cet article, qui intervient au terme d'une information judiciaire, est particulièrement importante. En effet elle permet de discerner l'étendue des pouvoirs du juge d'instruction lors de la clôture et donc celle des droits dont disposition le mis en cause.