Clause de non-concurrence : délai de paiement de la contrepartie financière et liberté du salarié

Publié le Modifié le 19/03/2014 Vu 43 308 fois 15
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Le non-paiement d’une contrepartie financière dispense-t-il le salarié de son obligation de respecter une clause de non-concurrence ?

Le non-paiement d’une contrepartie financière dispense-t-il le salarié de son obligation de respecter une

Clause de non-concurrence : délai de paiement de la contrepartie financière et liberté du salarié

Pour mémoire, la clause de non-concurrence est une clause insérée dans un contrat de travail, qui interdit au salarié, après son départ de l’entreprise, d’exercer une activité professionnelle concurrente, susceptible de porter atteinte aux intérêts de l’employeur.

Les clauses de non-concurrence sont particulièrement appréciées par les employeurs en ce qu’elles permettent de se prémunir contre les risques de divulgation de leur savoir-faire ou de perte de clientèle résultant du départ d’un salarié.

En empêchant ainsi un salarié d’exercer une activité professionnelle concurrente, la clause de non-concurrence apporte une restriction à sa liberté du travail.

Or, cette liberté permet à tout salarié dont le contrat de travail a été rompu d’être engagée immédiatement par un autre employeur, même concurrent de son ancien employeur, ou d’exercer à titre de travailleur indépendant une activité concurrente.

C’est ainsi que la jurisprudence soumet la validité des clauses de non-concurrence à plusieurs conditions, afin notamment d’assurer un équilibre entre les intérêts légitimes de l’employeur et la liberté du travail du salarié.

D’abord, la clause de non-concurrence doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, c’est-à-dire qu’il faut que l’activité concernée concurrence réellement l'entreprise.

Deuxièmement, elle doit être limitée dans le temps et dans l'espace. Autrement dit, la clause de non-concurrence doit s'appliquer uniquement dans un secteur géographique où la nouvelle activité du salarié pourrait concurrencer l'entreprise et l'interdiction ne doit pas être permanente.

Ensuite, la clause de non-concurrence doit être limitée quant à la nature des activités dont elle interdit l’exercice.

Enfin, la clause de non-concurrence doit prévoir une contrepartie financière versée au salarié et dont le montant ne peut être dérisoire.

En effet, il a été jugé qu’une « contrepartie financière dérisoire à la clause de non-concurrence contenue dans un contrat de travail équivaut à une absence de contrepartie ». (Cass. Soc., 15 novembre 2006, n° 04-46.721)

Toutes les conditions précitées doivent être respectées cumulativement.

En cas de non-respect de l'une d'elles, la clause de non-concurrence est déclarée nulle, ce qui ouvre droit au paiement de dommages et intérêts au profit du salarié. 

Ainsi, si l’employeur ne verse pas une indemnité financière au salarié après la rupture de son contrat de travail, le salarié sera en principe libéré de son obligation de non-concurrence.

Toutefois, ce principe est à nuancer, dans la mesure où la Cour de cassation a récemment jugé que le salarié n’est pas forcément libéré de son obligation de non-concurrence malgré le non paiement d’une contrepartie financière par son ancien employeur après son départ effectif de l’entreprise. (Cass. Soc., 20 novembre 2013, n° 12-20074)

En l’espèce, un ingénieur commercial a été engagé par une société selon un contrat de travail comportant une clause de non-concurrence qui lui faisait interdiction de travailler en cette qualité pour une entreprise concurrente pendant une durée d'un an.

Lorsque le salarié a démissionné, l'employeur lui a rappelé son obligation de non-concurrence.

Onze jours après avoir été dispensé de son préavis, le salarié a été engagé en qualité de directeur par une société concurrente de son ancien employeur.

Ayant été informé de l’embauche de son ex-salarié par une entreprise concurrente, l’employeur a alors suspendu le paiement de l'indemnité contractuelle en raison de l'inexécution par le salarié de ses obligations et a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir, notamment, le paiement d'une indemnité pour violation de la clause de non-concurrence.

La cour d’appel a accueilli les demandes de l’employeur et a condamné le salarié à payer à ce dernier une somme à titre de dommages-intérêts pour violation de la clause de non-concurrence. 

La Cour de cassation a approuvé les juges du fond sur ce point en jugeant que :

« la cour d'appel, qui a constaté qu'il ne s'était écoulé que quelques jours entre le départ du salarié de l'entreprise, à la suite de la dispense d'exécution du préavis, et la décision de l'employeur de ne pas verser la contrepartie financière, a pu en déduire que ce délai ne suffisait pas à libérer le salarié de son obligation, qu'il avait aussitôt méconnue en passant au service d'une entreprise concurrente. »

En d’autres termes, le délai de quelques jours entre le départ effectif du salarié, dispensé d'effectuer son préavis, et le non-versement de la contrepartie financière ne suffisait pas à libérer le salarié de son obligation de non-concurrence, de sorte que ce dernier a été considéré comme ayant violé cette obligation en acceptant des fonctions identiques chez un concurrent.

La solution ainsi dégagée par la Cour de cassation peut sembler discutable, dans la mesure où elle donne gain de cause à l’employeur malgré le fait qu’il n’ait pas versé au salarié une indemnité financière, qui, pourtant, constitue une condition de validité de la clause de non-concurrence.

Cependant, force est de constater que l’arrêt tient essentiellement compte des circonstances de l’espèce, car la Cour de cassation s’est fondée sur le fait que le délai de 11 jours entre la rupture du contrat de travail par le salarié et la décision de l’employeur de ne pas verser la contrepartie financière était très court.

En conséquence, ce bref délai ne suffisait pas à caractériser un manquement de l'employeur à son obligation de payer la contrepartie financière, ni à libérer le salarié de son obligation de non-concurrence.

Il en résulte donc que le retard de quelques jours dans le paiement de la contrepartie financière n’était pas suffisant pour autoriser le salarié à s’estimer immédiatement libéré de la clause de non-concurrence.

Pour autant, on se gardera d’interpréter cette décision comme permettant à l’employeur de retarder le paiement de l’indemnité de non-concurrence, car celle-ci reste tout de même une condition nécessaire à la validité de la clause de non-concurrence.

Enfin, il convient de garder en mémoire que les parties liées par une clause de non-concurrence doivent faire preuve d’une grande vigilance, notamment en faisant appel aux services d’un avocat spécialisé qui saura les conseiller utilement.   

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris

01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1435 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Visiteur
09/09/2016 11:13

bonjours je souhaiterai savoir si je peu demissionner de mon entreprise pour aller chez une entreprise concurente mais pas avec le meme statut.
Exemple actuellement vendeur conseil et chez le concurent magasinier( aucun contact commercial avec le client)
Coordialement

2 Publié par Maitre Anthony Bem
09/09/2016 19:47

Bonjour ludis86,

Aucun obstacle juridique s'oppose à votre prise de travail à un autre poste chez un concurrent, sous réserve de la clause de non concurrence que vous avez dans votre contrat de travail et à condition quelle soit valable.

Cordialement.

3 Publié par Visiteur
17/11/2016 19:17

Bonjour,
Je suis comptable depuis 1 an dans un cabinet d'expertise comptable et j'ai eu une proposition alléchante d'un autre cabinet dans la même ville.J'ai une clause de non concurrence valable (rémunération de 25% par mois pendant 12 mois, temps : 12 mois et le département pour la limite géographique). Je ne pense pas que de leur demander de levée cette clause soit judicieux. J'ai proposé à mon nouvel employeur de me faire un contrat avec une de leur agence dans un autre département pendant une quinzaine de jours afin de laisser passer la date habituelle de paiement du salaire et revenir ensuite dans mon département. Pensez vous que cela soit suffisant pour annuler la validité de cette clause ?
Je vous remercie pour votre retour.
Bien cordialement.

4 Publié par Maitre Anthony Bem
17/11/2016 23:14

Bonjour VG,

Je pense en effet que le fait de faire un contrat dans un autre département permettra d'éviter l'application de la clause de non concurrence pendant le temps contractuel mais pas de l'annuler.

Le fait de laisser passer la date de mise en jeu de la clause de non concurrence permettrait de la faire annuler à défaut de paiement par l'employeur de l'indemnité due durant ce laps de temps.

Bien cordialement.

5 Publié par Visiteur
25/12/2016 02:24

Bonjour,
J'ai travaillé pendant 4 mois en tant que commerciale chez un courtier en prêt immobilier.
J'ai démissionné, mon contrat s'est donc arrêté le 23/12. Il y a une clause de non concurrence où il est écrit " MLLE X s'interdira de s'interesser à quelque titre que ce soit ( salarié ou autre) directement ou indirectement, à toute activité d'intermédiation et de courtage en prêt immobilier." Je me rends compte que mon patron ne m'a pas libéré de la clause de non concurrence le jour de mon entretien (le 23/12) ni par écrit ni par oral. AUCUNE mention n'est spécifiée sur le solde tout compte. Il ne me l'a pas payé sur ma dernière fiche de paie reçu le 23/12 lors de l'entretien. Dans la clause de non concurrence il est également indiqué que la société se réserve le droit de libérer totalement ou partiellement Mlle X de son obligation de concurrence sans que celle ci puisse prétendre au paiement d'une quelconque indemnité, notification sera alors faite par lettre recommandée avec AR, au plus tard à la date effectif du salarié de l'entreprise. Je pars du principe donc qu'il ne m'a pas libéré : bien que je pense qu'il a oublié...
J'ai une proposition pour travailler en tant que conseiller bancaire dans une banque. Est ce que mon employeur peut considérer que si je deviens conseiller dans une banque, je ne respecte pas la clause de non concurrence? Je vais forcement faire des crédits immobiliers en tant que conseiller. Mais évidemment plus de courtage.
Quand doit-il me payer l'indemnité mensuelle?
Bien cordialement,

6 Publié par Maitre Anthony Bem
25/12/2016 10:23

Bonjour marjo,

Le paiement de la clause de non concurrence doit intervenir dès la rupture du contrat de travail, selon la jurisprudence, et aurait dû figurer sur votre dernière fiche de paye le cas échéant, indépendamment des termes du contrat.

Vous pouvez donc considérer que vous êtes libre de tout engagement de non concurrence vis à vis de votre employeur en l'absence de règlement de votre indemnité de non concurrence par ce dernier.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
20/01/2017 16:01

Bonjour,

Actuellement notre société est en plein licenciement économique. De ce fait un CSP nous a été proposés. Par ailleurs l'employeur nous informe que nous sommes déliés de toute obligation concernant notre clause de non-concurrence. Ils nous proposent une indemnisation pendant 3 mois ce qui contredit le dernier avenant a notre contrat de travail. Dans notre avenant au contrat de travail il est noté: l'employeur qui dénonce un contrat de travail prévoyant une clause de non concurrence peut, avec l'accord de l'intéressé, libérer par écrit, au moment de la dénonciation, le salarié de la clause d'interdiction'. Pouvez vous me confirmer que si je m'oppose l'employeur sera obligé a me verser la rémuneraton correspondante aux conditions notés dans l'avenant au contrat du travail (dans ce cas 12 mois) et non pas pendant uniquement 3 mois?

8 Publié par Visiteur
16/02/2017 14:42

Bonjour, j'ai découvert après 17 ans que la Ste avec laquelle j'avais signé un e clause de non concurrence a omis de me payer 1/2 mois de salaire pendant 1 an à la suite de mon départ en retraite , de même j'ai oublié de faire valoir cet accord . Aujourd'hui puis je demander le paiement de cette clause . Merci .

9 Publié par Visiteur
01/03/2017 11:24

Bonjour,
Le salarié que nous embauchons a une clause de non-concurence, il a posé sa démission le 31 janvier 2017 pour arrêter le 31/03/2017, si son employeur souhaite payer la clause, dans quel délai doit elle le faire? SVP

10 Publié par Visiteur
31/05/2017 18:34

Bonjour
Directeur d'une agence bancaire, j'ai démissionné de mon poste pour travailler chez un concurrent. Ayant jouer la carte de la transparence, mon ancien employeur m'a annoncé oralement l'activation de cette clause. J'ai donc quitté mon poste le 18/05 dernier après un préavis réalisé de 3 mois.
Étant payé tous les 25 du mois, celle ci doit être déjà être payée pour la période du 18 au 25/05 ?

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1435 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles