Pour mémoire, l’évolution des contentieux liés à l’internet a conduit les juges à établir un véritable droit jurisprudentiel relatif aux conditions de validité des constats dressés pour rapporter la preuve d’un contenu litigieux sur internet.
Il ne suffit donc plus à l’huissier de justice d’allumer son ordinateur et de réaliser des captures d’écran pour bénéficier d’une preuve irréfutable de la publication ou de la suppression de contenu illicite sur internet.
Désormais, la preuve internet doit respecter un certain nombre de pré-requis techniques qui permettent de s’assurer de sa fiabilité.
De manière constante, à défaut de respecter les mesures techniques listées par la jurisprudence, le constat d’huissier est sanctionné par le défaut de force probante (TGI Paris, 4 mars 2003).
Ainsi, selon la jurisprudence, l’huissier instrumentaire doit notamment décrire le cheminement qu'il a lui-même effectué pour accéder à la page Internet contenant l'infraction.
Le constat doit pour ce faire "établir l'existence préalable de liens hypertextes" aux fins de s’assurer que le cheminement doit pouvoir être effectué par n'importe quel Internaute sans "intime connaissance de l'organisation du site". (TGI Paris, 4 mars 2003).
Il en découle que la simple impression d’écran n’est pas suffisante pour être produite en justice comme élément de preuve de la diffusion de propos attentatoires à la réputation sur internet car elle peut avoir été modifiée ou être issue de la mémoire cache de l’ordinateur utilisé.
Ainsi, le 10 avril 2013, le Tribunal de grande instance de Paris a jugé que la production d'une simple impression écran est insuffisante pour établir la réalité de la publication de propos diffamatoires sur un site internet (TGI de Paris, 17ème chambre, 10 avril 2013)
En l’espèce, la société X reprochait à la société Factosoft, prise en sa qualité d’éditrice du site consoglobe.com, d’avoir laissé sur son site des commentaires d’internautes qui sont constitutifs d’actes de dénigrement à son encontre, en ce qu’ils portent atteinte à sa réputation, à ses services et à ses méthodes commerciales.
La société X a donc assigné la société Factosoft aux fins de l’enjoindre notamment à retirer de son site des messages constitutifs de dénigrement sous astreinte et en paiement de dommages et intérêts.
La société Factosoft répliquait en indiquant qu’elle a fait retirer le nom de la société X des propos des internautes et donc que la demande était devenue sans objet.
En cours d’audience de plaidoiries, le Président du Tribunal s’est donc connecté à son ordinateur afin de constater personnellement la suppression de l’indication de l’identité de la société X dans les messages litigieux diffusés sur le site internet de la société Factosoft :
« à l’audience, avec l’accord des parties, le site a été examiné contradictoirement ; qu’il a pu être constaté que la société X n’était plus nommément désignée ».
Attendu que la société X conclut de cet examen que celui-ci ne peut pas être probant, dès lors que la preuve du retrait des propos en cause n’était pas rapportée par huissier de justice, la constatation par le magistrat, le greffier et les parties étant insuffisante ;
Mais attendu qu’il est acquis que les commentaires litigieux ont été supprimés du site internet édité par la société Factosoft ; que le tribunal et les parties ayant pu constater à l’audience que la mention de la société X avait été retirée des commentaires des internautes, il est indifférent qu’un huissier de justice n’ait pas lui-même examiné le site pour parvenir à la même constatation ».
Il découle de cette décision qu’il est inutile de recourir à un huissier de justice en matière de preuve sur internet lorsqu’un juge peut lui-même constater personnellement la diffusion ou la suppression de contenus illicites sur internet.
Ainsi, tous à vos Smartphones pour faire l’économie d’un constat d’huissier de justice en ligne, afin de prouver en cours d’audience de plaidoiries la publication ou la suppression de propos dénigrants, attentatoires à la réputation, diffamatoires ou injurieux sur internet que le juge n’aura pas le choix de constater lui-même le cas échéant.
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Anthony Bem
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