Le droit de propriété ainsi que le droit au respect de la vie privée constituent des principes à valeurs constitutionnelles.
Plusieurs droits découlent de ces principes dont celui de la protection du domicile.
Dans le but de protéger le domicile, le législateur a établi le délit pénal de la violation du domicile.
En effet, selon l’article 226-4 alinéa 1er du code pénal, constitue une violation de domicile, l’introduction ou le maintien dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes, hors les cas où la loi le permet.
Ce délit est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.
Pour rappel, la jurisprudence définit le domicile comme le « lieu où, que l’intéressé y habite ou non, a le droit de se dire chez lui, quel que soit le titre juridique de son occupation et l’affectation donnée aux locaux » (Cour de cassation, chambre criminelle, 4 janvier 1977, N° 76-91105).
Sur le fondement de l’article 226-4 du code pénal précité, le 13 avril 2016, la chambre criminelle de la cour de cassation a cassé et annulé un arrêt d’appel qui n’avait pas caractérisé à l’encontre de chacun des prévenus l’existence d’une introduction illicite, à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte dans la propriété et ne s’était pas expliqué sur leur degré respectif d’implication en qualité d’auteur ou, le cas échéant, de complice. (Cour de cassation, chambre criminelle, 13 avril 2016, N° 15-82400)
En l’espèce, le propriétaire d’un bien immobilier a appris que celui-ci était occupé par deux familles immigrées de l'étranger.
De nouvelles serrures avaient été installées par des membres de l'association Droit au Logement, de sorte que les juges d’appel les avaient déclarés coupables du délit de violation de domicile.
Pour ce faire, la cour d'appel a relevé qu’ils avaient participé à l’installation des familles étrangères en établissant notamment un inventaire des biens présents et avaient apporté leur soutien actif à cette action en la revendiquant tant dans un communiqué qu’auprès de certains représentants municipaux.
La cour de cassation a fait droit aux prétentions des prévenus car la cour d'appel n'avait pas constaté que les prévenus s’étaient introduits dans la propriété et ce faisant caractérisé l’infraction de violation de domicile en ses éléments constitutifs.
En effet, pour mémoire, le délit de violation du domicile implique la preuve de l'existence d’un élément matériel, d’un élément intentionnel et d’un élément juridique :
- L'élément matériel du délit de violation du domicile :
L’élément matériel est établit en cas d’introduction illicite ou de maintien dans le domicile d’autrui, à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes.
Les juges vérifient les modes de pénétration dans le domicile ou les modalités d'accès au domicile violé.
Ainsi, les juges ne retiennent pas l'existence d'une introduction illicite quand la porte du local violé n'est pas fermée à clés (tribunal correctionnel de Lyon, 16 janvier 1974).
Les manœuvres favorisant l’introduction illicite ou le maintien dans le domicile recouvrent tout procédé astucieux ou ruse.
Les menaces sont des comportements inquiétants ou des paroles d’une personne prête à accomplir des actes de violence.
La voie de fait est un acte de violence à l’encontre de biens ou de personnes.
La contrainte correspond à une situation dans laquelle l’occupant ne serait pas libre.
- L'élément intentionnel du délit de violation du domicile :
L’élément intentionnel de la violation du domicile se déduit des actes de violences ou des voies de fait commis par l’auteur et de sa conscience qu’il n’a aucun droit d’entrée ni de se maintenir dans les lieux.
La jurisprudence estime que l’introduction avec violence dans le domicile d’autrui induit l’intention délictueuse des auteurs de telles violences (cassation criminelle, 22 septembre 1930).
De même, les juges ont pu considérer que le gérant d’une SCI propriétaire d’un appartement qui avait pénétré dans le logement donné en location, alors que le locataire s’était engagé à libérer les lieux à une date déterminée et déménagé ses affaires afin de permettre l’emménagement de nouveaux locataires avait commis le délit de violation de domicile (Cour d'appel de Paris, 9 septembre 1997).
- L'élément juridique du délit de violation du domicile :
Le délit pénal de violation de domicile est exclusif des situations admises par la loi, telles que les actions commises par des personnes dépositaires de l’autorité publique.
Dès lors, le délit de violation de domicile commise par une personne dépositaire de l’autorité publique ne peut valablement être invoquée contre les perquisitions, les visites domiciliaires, les droits d’entrée, les droits de contrôle et les procédures civiles d’exécution des huissiers de justice.
Ainsi, les huissiers de justice ont la faculté de pénétrer dans un domicile, en l’absence de l’occupant ou si ce dernier refuse l’accès de son local, à condition qu’ils soient accompagnés du Maire de la commune, d’un conseiller municipal, ou d’un fonctionnaire municipal délégué par le maire, ou d’une autorité de police ou de gendarmerie, ou encore, à défaut, de deux témoins majeurs, indépendants du créancier et de l’huissier.
Cependant, l’article 432-8 du code pénal est une exception à l'exception en ce qu'il prévoit que :
« Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, agissant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, de s'introduire ou de tenter de s'introduire dans le domicile d'autrui contre le gré de celui-ci hors les cas prévus par la loi est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende ».
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Anthony Bem
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