1) Les deux régimes de responsabilité des sites internet
Le régime de responsabilité des sites internet se distingue selon les deux catégories de sites existant sur internet, selon l’article 6-I-2 de la loi du 21 juin 2004, dite Loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN).
Selon l'application jurisprudentielle de cette loi, il y aurait :
- d'une part, les sites internet qui publient du contenu dont ils sont auteurs ;
- d'autre part, les sites internet qui publient du contenu mis en ligne par des tiers dont ils ne sont donc pas les auteurs, des intermédiaire technique.
Dans le premier cas, la loi considère ces sites internet comme des éditeurs de contenu tandis que dans le second ils sont considérés comme hébergeurs du contenu.
Ainsi, tous les sites internet participatifs tels que les forums de discussions, les blogs, les réseaux sociaux et ceux qui permettent de laisser des avis de consommateurs ou des commentaires de clients sur les marques, les produits, les services en général sont considérés comme des sites hébergeurs de contenu (tels des intermédiaires techniques).
La distinction entre éditeur et hébergeur de contenu sur internet est importante en pratique car elle a pour effet de déterminer le régime de responsabilité des sites internet en cas de diffusion de contenus illicites tels que :
- propos racistes,
- propos de dénigrants,
- propos injurieux,
- propos diffamatoires,
- contrefaçon de droit d'auteur,
- contrefaçon de marque,
- atteinte au droit à l'image d'une personne,
- atteinte au droit au respect de la vie privée,
- violation du nom commercial,
- concurrence déloyale et parasitisme,
- etc ...
En application des dispositions de l'article 6.I.7 de la LCEN, les sites internet hébergeurs de contenu ne sont pas soumis à une obligation de surveillance générale des contenus hébergés sur leurs serveurs.
Ainsi, les sites internet hébergeurs de contenu bénéficient d'une protection juridique particulière par rapport à l'éditeur en ce qu'ils doivent recevoir une notification de retrait de contenu illicite pour que leur responsabilité puisse être engagée.
Autrement dit, sans mise en demeure en bonne et due forme, les sites internet hébergeurs de contenu n'ont, juridiquement, rien à craindre.
En effet, la jurisprudence actuelle exclue la mise en jeu de la responsabilité des sites internet hébergeurs de contenu, à défaut de réception d'une notification conforme aux exigences légales.
Ainsi, l'hébergeur de contenu ne devient responsable de ceux qui sont illicites que si :
- il manque à son obligation retrait sous un prompt délai,
- la notification qui lui a été adressée lui permet clairement d’identifier le contenu et respecte le formalisme légale de la notification.
2) Les conditions de mise en jeu de la responsabilité des sites internet hébergeurs de contenus illicites : une notification de retrait de contenus illicites en bonne et due forme
L'article 6.I.2 prévoit que les sites internet hébergeurs de contenus doivent agir promptement pour retirer toutes données illicites ou en rendre l'accès impossible dès qu’il en a connaissance :
« Les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d'un destinataire de ces services si elles n'avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l'accès impossible ».
Ainsi, la mise en jeu de la responsabilité des hébergeurs de contenus sur internet suppose que la notification délivrée au visa de la loi du 21 juin 2004 comporte l'ensemble des mentions suivantes :
- La date de la notification ;
- Si le notifiant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;
- Les noms et domicile du destinataire ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
- La description des faits litigieux et leur localisation précise ;
- Les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré, comprenant la mention des dispositions légales et des justifications de faits ;
- La copie de la correspondance adressée à l’auteur ou à l’éditeur des informations ou activités litigieuses demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la justification de ce que l’auteur ou l’éditeur n’a pu être contacté.
Sur ce dernier point, la Cour de cassation considère que :
« la notification délivrée au visa de la loi du 21 juin 2004 doit comporter l’ensemble des mentions prescrites par ce texte ; que la cour d’appel, qui a constaté que les informations énoncées à la mise en demeure étaient insuffisantes au sens de l’article 6-I-5 de cette loi à satisfaire à l’obligation de décrire et de localiser les faits litigieux mise à la charge du notifiant et que celui-ci n’avait pas joint à son envoi recommandé les constats d’huissier qu’il avait fait établir et qui auraient permis à l’opérateur de disposer de tous les éléments nécessaires à l’identification du contenu incriminé, a pu en déduire, sans encourir le grief du moyen, qu’aucun manquement à l’obligation de promptitude à retirer le contenu illicite ou à en interdire l’accès ne pouvait être reproché à la société Dailymotion ».
Ainsi, outre le respect des formalités légales de la notification la jurisprudence exige la réalisation préalable et la communication à l’hébergeur d’un constat d’huissier relatif à la preuve de la diffusion du contenu litigieux sur son site internet.
A défaut de comporter l’ensemble des mentions légales précitées, la notification de retrait de contenus illicites ne sera pas opposable à l’hébergeur (Civ. Civ. I, 17 février 2011, n° 09-13202, n° 09-67896 et n° 09-15857).
Par ailleurs, il convient de rappeler que l’abus de l’envoi d’une notification de retrait de contenus illicites est sanctionné pénalement par un an d’emprisonnement et 15.000 euros d’amende en application de l’article 6.I.8. de la LCEN.
Afin d'éviter de courrir des risques inutiles, l'assistance d'un avocat spécialisé en droit de l'internet s'avérera nécessaire.
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Anthony Bem
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