Lorsque les dirigeants de société demandent l’octroi d’un prêt bancaire ou une autorisation de découvert bancaire pour leurs sociétés, les banques leur demandent, de manière quasi systématique, de se porter personnellement caution du remboursement de la dette, en leur faisant conclure un cautionnement.
Dans certains cas, les banques exigent même la signature de l’épouse, l’époux, le compagnon et/ou la concubine, la mère et/ou le père, la belle-mère et/ou le beau-père du dirigeant, jouant ainsi au « jeu des 7 familles ».
En cas de défaut de règlement par la société débitrice, la banque assigne en remboursement de sa créance l’une ou toutes les cautions tenues solidairement sur leur patrimoine personnel.
Concrètement, le cautionnement solidaire permet à la banque de demander directement à chacune des cautions, ensemble ou séparément, le paiement des sommes dues par la société, sans avoir à poursuivre au préalable cette dernière.
Les cautions disposent, en tout état de cause, de la possibilité de se défendre utilement lorsqu’elles sont assignées en justice par les banques en faisant valoir soit l’un des 20 moyens de « défense au fond », soit la mise en cause de la responsabilité de la banque au titre des manquements de celle-ci à ses obligations de conseil, d’information et de mise en garde.
A cet égard, le 13 décembre 2017, la cour de cassation a jugé que :
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« poursuivie en paiement par le créancier, la caution qui demande à être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par celui-ci à son encontre, sans prétendre obtenir un avantage autre que le simple rejet, total ou partiel, de la prétention de son adversaire, peut procéder par voie de défense au fond ;
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qu’elle peut aussi, par voie de demande reconventionnelle, demander à être déchargée indirectement en sollicitant des dommages-intérêts puis la compensation entre le montant de sa dette et celui des dommages-intérêts » (Cour de cassation, chambre commerciale, 13 décembre 2017, N°13-24057)
En l’espèce, une banque a consenti à une société un prêt d’un montant de 25.000 euros, garanti par le cautionnement personnel et solidaire de son gérant.
Compte tenu des difficultés financières de la société emprunteuse à rembourser son crédit, la banque a prononcé la déchéance du terme du prêt et assigné la caution en garantie.
Dans ce contexte, la caution s’est défendue en faisant valoir que la banque a commis plusieurs fautes dans le cadre de l’octroi du prêt et de la souscription du cautionnement litigieux.
A cet égard, la caution a demandé aux juges, de manière reconventionnelle, l’octroi d’une indemnisation en réparation des préjudices subis, couvrant notamment le montant impayé du prêt.
Les juges ont donc été amené à trancher la question de savoir si la caution pouvait invoquer en défense les fautes de la banque pour échapper à son obligation de garantie.
Pour mémoire, l’article 64 du Code de procédure civile dispose que :
«Constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire ».
Concrètement, la demande reconventionnelle est la demande formulée par la partie assignée en justice (partie défenderesse ou défendeur) contre celle à l’origine du procès (partie demanderesse ou demandeur).
La demande reconventionnelle permet donc d'inverser la tendance puisque la partie en défense contre-attaque en formulant des incidentes.
Selon la cour de cassation, la demande reconventionnelle constitue une défense au fond dès lors qu’elle ne tend à aucun autre avantage que le simple rejet de la prétention adverse (Cour de cassation, troisième chambre civile, 10 janvier 2001, N°98-44694).
Pour conclure, il conviendra de garder en mémoire, qu’aux termes de l’arrêt du 13 décembre 2017, la caution dispose de deux modes de défense alternatifs ou cumulatifs :
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la caution peut invoquer une faute du banquier dans le cadre d’une défense au fond « classique » pour obtenir la nullité ou l’inopposabilité du cautionnement grâce à l’un des nombreux moyens de défense dont elle dispose au cas par cas ;
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la caution peut chercher , de manière reconventionnelle, à obtenir la mise en jeu de la responsabilité du banquier pour faute et se voir octroyer des dommages-intérêts qui viendront éteindre en tout ou partie sa dette, par compensation.