I - Les infractions les plus courantes prévues et réprimées par le code de commerce
1.1 - La distribution ou la répartition de dividendes fictifs
L’article L.241-3 2° du Code de commerce dispose que :
« Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375.000 euros (…) le fait, pour les gérants, d'opérer entre les associés la répartition de dividendes fictifs, en l'absence d'inventaire ou au moyen d'inventaires frauduleux ».
Cette disposition vise à sanctionner le gérant qui, sans avoir fait d'inventaire ou sur la base d'un inventaire frauduleux, distribue des dividendes aux associés alors que ces sommes n'étaient pas distribuables.
Pour que cette infraction soit constituée, il est nécessaire qu’il n’y ait pas d’inventaire ou un inventaire frauduleux.
Un inventaire est « le relevé de tous les éléments d’actif et de passif, au regard desquels sont mentionnées la quantité et la valeur e chacun d’eux, à la date de l’inventaire »
A la différence des comptes annuels, ce document n’est pas porté à la connaissance des associés.
L’inventaire frauduleux est constitué d’une inobservation de prescriptions comptables, ayant une incidence sur le résultat, de nature à créer un bénéfice artificiel.
En pratique, les fraudes les plus courantes proviennent de l’inscription à l’actif, sans contrepartie au passif, des plus-values non encore réalisées.
Or, celles-ci ne peuvent être prises en considération pour l’évaluation de l’actif que si elles sont compensées par un compte de provision au passif, afin qu’elles n’exercent aucune influence sur le résultat final des opérations.
Ces plus-values ne peuvent être acquises que lorsque lesdites opérations sont réalisées.
Enfin, l’infraction pénale suppose une répartition de dividendes fictifs entre les actionnaires ou associés, c'est-à-dire « toute distribution hors des règles définies »
1.2 - La présentation de comptes sociaux non-fidèles
L’article L.241-3 3° du Code de commerce dispose que :
« Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375.000 euros (…) le fait, pour les gérants, même en l'absence de toute distribution de dividendes, de présenter aux associés des comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice, de la situation financière et du patrimoine à l'expiration de cette période en vue de dissimuler la véritable situation de la société ».
Cette infraction sanctionne le caractère erroné, l’insuffisance ou l’omission d’information dans le bilan, le compte de résultat ou l’annexe.
Instaurée par la loi comptable de 1983, cette notion d’image fidèle n’a jamais été expressément définie.
Cette notion s’apprécie essentiellement en vérifiant l’application des règles qui encadrent la présentation et le contenu des comptes (le principe de régularité et de sincérité, de prudence, de continuité de l’exploitation, de la permanence des méthodes comptables, de l’annualité et de l’indépendance des exercices).
On peut recenser trois grandes catégories d’inexactitudes :
- les inexactitudes dans la composition du bilan, du compte de résultat ou de l’annexe,
- les inexactitudes dans l’évaluation de leurs éléments (exemples : majoration de l’actif, diminution du passif, minoration de l’actif, majoration du passif),
- les inexactitudes dans la présentation de leurs postes (exemples : comptabilisation à l’actif du bilan de plus-values non acquises ou fictives, défaut de provision ou insuffisance des provisions, défaut d’amortissement des immobilisations, diminution ou surévaluation de stocks, factures fictives)
L’auteur de l’infraction doit connaître l’inexactitude qui vicie les comptes litigieux et avoir agi sciemment.
1.3 - L’abus de bien social
L’article L.241-3 4° du Code de commerce dispose que :
« Est puni d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375.000 euros (…) le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement ».
L'abus de biens social suppose la réunion des conditions suivantes :
- Un usage des biens tel que l’appropriation ou la dissipation de biens sociaux, une omission d’action, les actes sans aucune contrepartie tel que cautionnement, cession, dons, acquisition, prêt etc… ou sans justification économique ainsi que les actes faisant courir à la société un risque disproportionné ou un risque d’une perte ou d’un appauvrissement sans contrepartie ou un usage des pouvoirs ou des voix accordés par la loi ou les statuts aux dirigeants sociaux.
- Un usage à des fins personnelles directes ou indirectes pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle le dirigeant est intéressé directement ou indirectement ». Peu importe l’intérêt personnel : intérêt matériel, politique, relationnel, etc …
- La conscience du caractère abusif et contraire à l’intérêt social de l’acte commis par le dirigeant. Celle-ci peut se matérialiser par une tenue irrégulière de la comptabilité, la non convocation des assemblées etc…
La jurisprudence a jugé qu’il y a abus de biens sociaux lorsque :
- le dirigeant se fait octroyer par la société des rémunérations excessives au regard des capacités de trésorerie de cette société (Cass. crim., 7 mars 1968, Cass. crim., 19 oct. 1971, Cass. crim., 6 oct. 1980) ;
- le dirigeant se fait octroyer par la société des rémunérations injustifiées par rapport aux services rendus à celle-ci (Cass. crim., 20 juill. 1982).
La jurisprudence a jugé qu’il n’y a pas abus de biens sociaux mais complicité d’abus de biens sociaux lorsque le dirigeant facilite ou s’abstient de dénoncer les agissements illicites sans toutefois en avoir personnellement profité (Cass. crim., 5 sept. 1988, Cass. crim., 15 mai 1974).
Pour aller plus loin sur cette infraction, je vous invite à lire : l'abus de biens sociaux : conditions légales, sanctions pénales et moyens de défense
II - Les infractions les plus courantes prévues et réprimées par le code pénal
2.1 - Le délit d’escroquerie
L'article 313-1 du code pénal défini le délit d'escroquerie comme :
« Le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ».
Les peines maximales encourues pour escroquerie sont :
- Pour les personnes physiques : 5 ans d'emprisonnement, 375.000 € d'amende et l’interdiction ou la confiscation de certains droits.
- Pour les personnes morales : 1.875.000 € d’amende ainsi que les peines prévues à l'article 131-39 du code pénal.
La tentative est punissable des mêmes peines.
Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 750.000 € d'amende lorsque l'escroquerie est réalisée :
- Par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission (article 313-2-1° du code pénal) ;
- Par une personne qui prend indûment la qualité d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public (article 313-2-2° du code pénal) ;
- Par une personne qui fait appel au public en vue de l'émission de titres ou en vue de la collecte de fonds à des fins d'entraide humanitaire ou sociale (article 313-2-3° du code pénal) ;
- Au préjudice d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur (article 313-2-3° du code pénal).
Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 1.000.000 € d'amende lorsque l'escroquerie est commise en bande organisée.
Pour aller plus loin sur cette infraction, je vous invite à lire : Les conditions et les sanctions du délit pénal d’escroquerie.
2.2 - L'abus de confiance
L’article 314-1 du Code Pénal dispose que :
« Le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter, ou d’en faire un usage déterminé ».
L'abus de confiance est une forme d'appropriation frauduleuse du bien d'autrui par détournement.
Les éléments constitutifs sont le détournement, le préjudice et l'intention.
L'abus de confiance est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375000 euros d'amende.
Les peines maximales encourues pour escroquerie sont :
- Pour les personnes physiques : 5 ans d'emprisonnement, 375.000 € d'amende et l’interdiction ou la confiscation de certains droits.
- Pour les personnes morales : 1.875.000 € d’amende ainsi que les peines prévues à l'article 131-39 du code pénal.
La tentative est punissable des mêmes peines.
Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 750.000 € d'amende lorsque l'escroquerie est réalisée :
- Par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission (article 313-2-1° du code pénal) ;
- Par une personne qui prend indûment la qualité d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public (article 313-2-2° du code pénal) ;
- Par une personne qui fait appel au public en vue de l'émission de titres ou en vue de la collecte de fonds à des fins d'entraide humanitaire ou sociale (article 313-2-3° du code pénal) ;
- Au préjudice d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur (article 313-2-3° du code pénal).
Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 1.000.000 € d'amende lorsque l'escroquerie est commise en bande organisée.
2.3 - Le faux et usage de faux
L’article 441-1 du Code Pénal dispose que :
« Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accompli par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait, ayant des conséquences juridiques ».
Le faux ordinaire est le successeur de l'ancien faux en écriture privée, de commerce ou de banque.
Les cinq éléments constitutifs du faux sont :
- Un document
- valant titre
- contenant une altération de la vérité
- causant un préjudice
- avec une intention coupable
Ce délit est sanctionné par trois d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende au maximum.
2.4 - L’organisation volontaire de l’insolvabilité d’une société
L’article 314-7 du Code Pénal dispose que :
« Les dirigeants de droit ou de fait d’une personne morale, qui auront organisé ou aggravé son insolvabilité, soit en augmentant le passif ou en diminuant l’actif de son patrimoine, soit en dissimulant certains de ses biens, lorsque cette personne morale sera tenue à des obligations pécuniaires résultant d’une condamnation prononcée en matière pénale, délictuelle ou quasi-délictuelle seront punis de trois d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ».
**********
Au delà des condamnations pénales, les gérants peuvent répondre personnellement des préjudices causés par l'infraction qu'ils commettent dans l'exercice de leurs fonctions.
Un gérant doit répondre personnellement de ses agissements délictueux qui sont de nature à causer un préjudice direct non seulement à la société elle-même, mais également à ses associés ou actionnaires (Cass. Crim., 8 novembre 1993).
Lorsque l’infraction constitue un délit, la prescription est de 3 ans à compter de la date à laquelle il a été commis.
En cas de dissimulation, le point de départ de la prescription est fixé au jour où l’infraction a été révélée.
Le point de départ de la prescription peut donc être très éloigné de la date de commission de l’infraction, puisqu’il est fixé au jour de la découverte du délit.
La victime doit déposer une plainte pénale soit auprès des forces de l’ordre soit, idéalement par avocat, auprès du procureur de la république ou le cas échéant du doyen des juges d’instruction afin d'initier une enquête pénale et que l’auteur soit poursuivi devant le tribunal correctionnel.
La plainte pénale adressée au Procureur de la république puis au doyen des juges d’instruction devra comprendre tous les éléments de fait permettant d'initier une instruction pénale contre son auteur, ainsi que toutes les preuves justificatives de la réalité des faits dénoncés.
A défaut de classement sans suite et en cas de poursuite de l'auteur, la victime pourra obtenir outre la condamnation pénale de ce dernier, la réparation de l’ensemble de ses préjudices, à savoir :
- Le remboursement du montant du ou des biens en cause,
- Le paiement d’intérêts de retard,
- Le paiement des frais engagés en raison des conséquences de l’infraction,
- L’indemnisation du préjudice moral,
- Le remboursement des frais d’avocat engagés pour la procédure d'instruction pénale et le procès devant le tribunal correctionnel.
Pour aller plus loin : La responsabilité civile du gérant de SARL ou d’EURL
Je suis à votre disposition pour toute information ou action.
PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01
Email : abem@cabinetbem.com