L’exercice d’une action en justice constitue, en principe, un droit.
Ainsi, le principe est que chacun a le droit d'agir en justice.
On parle du droit d’ester en justice.
Cependant, comme tout droit, la limite est l'abus de droit.
L’article 32-1 du code de procédure civile sanctionne ainsi l'abus du droit d'agir en justice par le versement d'une amende civile au trésor public et de dommages et intérêt à l'adversaire.
La frontière entre le droit et l'abus est infime.
L'abus suppose la caractérisation d’une faute susceptible de faire, selon la formule jurisprudentielle, « dégénérer en abus le droit d’ester en justice » (Cour de cassation, 3e chambre civile, 11 juillet 2012, pourvoi n° 10-21.703).
L’erreur d’une partie sur le fondement juridique de sa demande ne constitue pas, à elle seule, une faute et abus du droit d'agir en justice.
Concrètement, l'abus implique soit :
- un acte de malice,
- un acte de mauvaise foi,
- une erreur équipollente au dol,
- des agissements simplement téméraires ou dilatoires.
A titre d'exemple, la cour de cassation a déjà eu l'occasion de retenir l'abus du droit d'agir en justice contre un demandeur qui avait exercé une action au mépris des conditions de recevabilité expressément prévues par la loi (cour de cassation, chambre commerciale, 12 janvier 1976, pourvoi n° 74-13.386).
Il existe donc une porosité entre l’attitude processuelle du demandeur en justice et le fond de sa demande.
De même, la cour de cassation a jugé que l’exercice d'une action en justice, sans disposer de la moindre preuve de son bien-fondé était abusif. (Cour de cassation, 3e chambre civile, 18 octobre 2006, pourvoi n° 05-15.179).
Par conséquent, l’exercice sans preuve d’une action en justice est susceptible non seulement de compromettre le succès de l'action, mais aussi d'exposer les demandeurs à une sanction pécuniaire.
Pour pallier le défaut de preuve, certains plaideurs succombent à la tentation d’altérer la présentation de la vérité afin que leur cause l’emporte.
Or, le droit pénal protège la sincérité des preuves produites en justice et sanctionne les manœuvres visant à tromper la religion du tribunal et du juge.
A cet égard, l’article 441-1 du code pénal réprime le faux qui a « pour objet ou peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques ».
Les tentatives d’instrumentalisation de la justice sont sanctionnées par le délit pénal de l’escroquerie au jugement fondé sur celui plus général de l’escroquerie.
Le délit d’« escroquerie au jugement » est jurisprudentielle en ce que la loi ne le prévoit pas spécialement.
Il concerne le cas où une partie à un procès parvient à obtenir une décision de justice qui portera atteinte aux droits d’autrui, en trompant le tribunal par la production d’un faux, d'un faux document ou d'une fausse pièce.
De même, l’article 434-13 du code pénal sanctionne le témoignage mensonger et dispose que :
« le témoignage mensonger fait sous serment devant toute juridiction ou devant un officier de police judiciaire agissant en exécution d’une commission rogatoire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende ».
En outre, l’article 434-15 du code pénal réprime la subornation de témoins qui font des dépositions ou déclarations mensongères.
La subornation est le fait d’user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manœuvres ou artifices au cours d’une procédure ou en vue d’une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s’abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation.
Il faut que les promesses ou offres, faites pour déterminer un témoin à des dépositions ou à des déclarations mensongères, lui soient adressées personnellement (Cass. Crim., 20 octobre 1999, pourvoi n° 99-80.088).
A cet égard, il convient de souligner qu'il importe peu que les dépositions ou déclarations de témoins soient suivie d’effet ou non pour être sanctionnées.
La jurisprudence a ainsi condamné du chef de subornation de témoins des dirigeants de société qui ont sciemment sollicité des témoignages de salariés, en les menaçant de licenciement, dans le dessein d’en faire état dans le cadre d’une instance prud’homale intentée par un autre salarié licencié, qui avait préalablement produit des attestations émanant de ces salariés (Cass. Crim., 28 juin 2011, pourvoi n°10-88.795).
Je suis à votre disposition pour toutes informations et actions en cliquant sur "Services" en haut de page.
Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com