En l’espèce, X…, entrepreneur individuel ayant obtenu un prêt bancaire le 3 janvier 2006, avait fait publier une déclaration d’insaisissabilité de sa résidence principale le 3 mai 2010. Par jugement du 7 octobre 2014, l’entrepreneur avait été mis en liquidation judiciaire, la procédure ayant été clôturée le 3 novembre 2015. Les opérations de la liquidation judiciaire n’avaient pas permis, en raison de l’insuffisance d’actif, de régler la créance de la banque : sur autorisation du juge de l’exécution, l’établissement bancaire avait fait inscrire une hypothèque provisoire sur le bien immobilier du débiteur le 9 novembre 2014 ; puis, le 16 novembre suivant, il avait fait assigner le débiteur en paiement de sa créance.
Le débiteur avait opposé l’irrecevabilité de la demande et sollicité la levée de l’hypothèque.
Inopposabilité au banquier de la déclaration d’insaisissabilité
Confirmant l’analyse des premiers juges, la cour d’appel (CA Aix-en-Provence, 10 janv. 2019, n° 18/02358,) :
— a condamné le débiteur à payer la somme de 19 411,76 euros, avec intérêts au taux conventionnel à compter du 10 septembre 2015 ;
— l’a débouté de sa demande en mainlevée de l’inscription d’hypothèque provisoire.
Soulignant que l’immeuble appartenant au débiteur avait fait l’objet d’une déclaration d’insaisissabilité publiée avant l’ouverture de la liquidation judiciaire, les juges du fond ont relevé que la déclaration était par conséquent opposable à la liquidation judiciaire et ne constituait pas un élément d’actif de la procédure collective ; qu’ainsi, l’insaisissabilité n’était pas opposable à la banque dont la créance de prêt était née antérieurement à la publication de la déclaration. La banque bénéficiait donc d’un droit de poursuite sur l’immeuble et était bien fondée à agir individuellement contre le débiteur aux fins d’obtenir un titre exécutoire portant condamnation.
Le débiteur a porté le litige devant la Cour de cassation.
La Haute juridiction approuve la solution donnée par la cour d’appel en ce qui concerne l’inscription de l’hypothèque provisoire ; celle-ci a retenu exactement "qu’un créancier auquel une déclaration d’insaisissabilité d’un immeuble est inopposable peut exercer son droit de poursuite sur celui-ci indépendamment de ses droits dans la procédure collective du propriétaire de cet immeuble". Il en résulte que, tant que sa créance n’est pas prescrite, rien ne lui interdit de faire inscrire une hypothèque provisoire sur ce bien dans les conditions de droit commun, lequel s’applique aussi à la demande de mainlevée d’une telle mesure conservatoire.
En revanche, la Haute juridiction censure la cour d’appel qui, en violation des articles L. 526-1, L. 622-7 et L. 622-21 du code de commerce, a prononcé une condamnation à paiement. En effet, énonce-t-elle : "si le créancier auquel la déclaration d’insaisissabilité d’un immeuble est inopposable bénéficie d’un droit de poursuite sur cet immeuble, il n’en demeure pas moins soumis au principe d’ordre public de l’arrêt des poursuites ainsi qu’à l’interdiction de recevoir paiement des créances dont la naissance est antérieure au jugement d’ouverture. Il en résulte que, s’il doit être en mesure d’exercer le droit qu’il détient sur l’immeuble en obtenant un titre exécutoire par une action contre le débiteur tendant à voir constater l’existence, le montant et l’exigibilité de sa créance, cette action ne peut tendre au paiement de celle-ci".
La cour d’appel aurait dû se borner à constater l’existence, le montant et l’exigibilité de la créance sans prononcer de condamnation à paiement. D’où cassation partielle.
Source : actualitesdudroit.fr
Pour plus d'infos : Déclaration d'insaisissabilité : comment l'effectuer ?
Voir aussi notre guide : Récupérer une facture impayée 2020-2021
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