Le salarié jouit, dans l'entreprise et hors de celle-ci, de sa liberté d'expression (Cass. soc. 14-12-1999 n° 97-41.995 PB ; Cass. soc. 22-6-2004 n° 02-42.446 F-P). Cette liberté l'autorise, par exemple, à tenir des propos sur l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise (Cass. soc. 4-2-1997 n° 96-40.678 D).
Néanmoins, il peut être sanctionné en cas d'abus de sa liberté d'expression lorsqu'il emploie des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs (Cass. soc. 27-3-2013 n° 11-19.734 FS-PB). En cas de litige, la Cour de cassation vérifie que les juges du fond, ont, le cas échéant, caractérisé un tel abus (Cass. soc. 21-3-2018 n° 16-20.516 FS-D).
En l'espèce, l'employeur reproche au salarié d'avoir tenu des propos inappropriés à l'égard de son supérieur hiérarchique, notamment l'utilisation des termes « soyez plus visionnaire M. Z. » ou encore « je ne sais pas comment vous pouvez écrire de telles calembredaines » ainsi que d'avoir échangé des courriels avec des collègues provoquant un « climat conflictuel » et une « ambiance délétère ». L'employeur licencie alors le salarié pour faute grave.
En appel, les juges du fond admettent la légitimité du licenciement en requalifiant toutefois la faute grave en faute simple constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement et déboutent le salarié de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement abusif.
La Cour de cassation casse l'analyse de la cour d'appel : les magistrats auraient dû caractériser « en quoi les courriels rédigés par le salarié comportaient des termes injurieux, diffamatoires ou excessifs » pour leur permettre d'établir la cause réelle et sérieuse du licenciement. La cassation intervient sur le fondement de l'article L 1112-1 du Code du travail qui prohibe les restrictions injustifiées et disproportionnées aux libertés et droits fondamentaux du salarié et de l'article L 1232-1 du même Code selon lequel le licenciement pour motif personnel doit être motivé.
Sophie ANDRE - EFL
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