La Cour de Cassation a considéré dans une décision n° 14-23.726 rendue le 22 octobre 2015 que la transcription du jugement de divorce ayant attribué le droit au bail à l’un des époux met fin à la cotitularité du bail tant légale que conventionnelle.
Il convient de décrypter cette décision qui est particulièrement instructive.
Il est utile de rappeler que l’article 1751 du code civil dispose que « Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation de deux époux, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire et même si le bail a été conclu avant le mariage, ou de deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, dès lors que les partenaires en font la demande conjointement, est réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause, par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps, à l'un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l'autre époux. »
C’est ainsi que durant le mariage, les époux sont solidairement responsables du paiement des loyers et des charges, puisqu’étant tous les deux considérés par la loi comme titulaires du bail.
Cette solidarité pour le règlement des loyers et charges et cette cotitularité du bail cessent suite au divorce des époux.
Dans l’arrêt rendu par la Cour de Cassation, une société civile immobilière avait donné à bail en 1991 un appartement à usage d’habitation aux époux X. Le jugement de divorce du 2 septembre 1997 avait attribué le droit au bail à l’épouse. Cette dernière avait été mise en liquidation judiciaire et était décédée le 11 septembre 2010.
La SCI avait entendu assigner notamment l’ex-époux en paiement des loyers dus pour la période d’octobre 2010 au 20 mai 2011, date de restitution des clés.
La SCI justifiait sa demande de règlement auprès de l’ancien conjoint aux motifs que chaque colocataire d’un bail d’habitation demeure redevable du paiement des loyers tant que le bail n’a pas été résilié; que le divorce des époux colocataires d’un bail d’habitation met certes fin au bénéfice de la cotitularité légale du bail prévue à l’article 1751 du code civil à compter de la transcription du jugement prononçant le divorce en cas d’attribution du bail à l’un des ex-époux, mais ne met pas fin pour autant à la colocation résultant de la signature du bail par chacun des époux.
Le bailleur faisait ainsi valoir que si le divorce avait mis fin à la cotitularité légale du bail entre eux, il n’avait pas en revanche mis un terme à la colocation conventionnelle de ce bail, résultant d’une clause les engageant expressément de manière solidaire.
En d’autres termes, malgré le divorce prononcé, l’ex-époux était toujours tenu des loyers faute de congé délivré au bailleur de sa part.
La Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation rejette cette analyse et valide l’appréciation de la Cour d’appel qui a relevé que le jugement de divorce des époux X ayant attribué le droit au bail de l’appartement à Madame X avait été transcrit sur les registres de l’état civil le 7 janvier 1998, ce dont il résultait que Monsieur X n’était plus titulaire du bail depuis cette date.
Cette décision est protectrice à juste titre de l’époux divorcé.
Régine VANITOU
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