Afin de canaliser le flux des étudiants dans les filières saturées de l’enseignement supérieur, l’article L.612-3 du code de l’éducation a prévu, en cas d’insuffisance de capacité d’accueil, d’investir le ministre de l’enseignement supérieur du soin d’organiser les modalités d’inscription des étudiants.
C’est sans doute pour se conformer à ce texte et combler un vide juridique que le ministère de l’Education Nationale a édicté la circulaire du 24 avril 2017 (1).
Celle-ci, dans les points 1, 2 et 3 reprend les critères énoncés par loi pour les expliciter.
L’article L.612-3 précisant que les règles d’inscription devront prendre en considération la situation de famille du candidat, son domicile et les préférences qu’il a pu exprimer, la circulaire décline les différents critères prévus par le texte législatif pour opérer un classement des candidats et les départager en cas d’égalité.
La circulaire hiérarchise cependant ces critères alors que le texte de l’article L.612-3, leur attribuait une valeur équivalente.
Ainsi, la circulaire du 24 avril 2017, dans une première phase, privilégie les candidats résidant ou ayant obtenu le baccalauréat dans l’académie du siège de l’établissement supérieur qui dispense la formation qu’ils souhaitent intégrer.
Ces candidats sont ensuite classés en fonction de la priorité qu’ils ont donnée dans l’ensemble de leurs voeux à la formation qu’ils entendent suivre en première année de licence.
Les candidats sont ensuite départagés en fonction de la priorité qu’ils ont donnée à la formation désirée en fonction de l’ensemble des vœux formulés lors de la procédure de préinscription.
S’il subsiste entre les candidats des situations d’égalité, la circulaire met en œuvre les critères relevant de la situation de famille en privilégiant les candidats mariés, pacsés, vivant en situation de concubinage, ou ayant des personnes à charge.
Si l’ordre des critères choisis par la circulaire répond à une certaine logique d’efficacité, il reste que le texte de loi ne privilégiant aucun des critères pour décider de l’inscription des candidats, on peut se demander si, sur ce point, la circulaire ne serait pas entachée d’erreur de droit.
En tout état de cause, le point qui fait véritablement problème dans le texte de la circulaire concerne le recours à la méthode du tirage au sort pour départager définitivement les candidats qui se trouveraient encore à égalité après le passage au filtre des différents critères.
Cette méthode, qui avait déjà fait l’objet de critiques de la part de la juridiction administrative (2) laquelle avait censuré une décision de sélection d’étudiants recourant à ce procédé, est reprise par la circulaire qui semble vouloir l’instituer comme un mode normal d’accès à l’enseignement supérieur.
Nul doute que le Conseil d’Etat qui a été saisi d’un recours direct contre la circulaire ne manquera pas de censurer les dispositions sur le tirage au sort.
En effet, le texte instaurant le tirage au sort, est entaché du vice d’incompétence de son auteur dès lors que l’administration, en instituant le tirage au sort, a ajouté une modalité de sélection qui n’était pas prévue par le code de l’éducation.
Pour les étudiants qui seraient sélectionnés par tirage au sort, il n’est pas nécessaire, d’ailleurs, d’attendre l’issue du contentieux du Conseil d’Etat pour faire valoir leurs droits.
Dès maintenant, l’illégalité de la circulaire leur ouvre la perspective de faire annuler tout refus d’inscription fondé sur cette méthode, en invoquant l’illégalité de la décision du président d’université par la voie de l’exception d’illégalité de la circulaire.
Jean-Yves TRENNEC.
Notes :
- Circulaire n°2017-077 du 24 avril 2017 publié au Bulletin Officiel n°17 de l’éducation nationale le 27 avril 2017.
- Tribunal administratif de Bordeaux, 16 juin 2016, req. n°1504236.