dommages et intérêts pour un policier victime des agissements de son administration

Publié le 21/02/2018 Vu 1 380 fois 0
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Publication des extraits d'un jugement du tribunal administratif de Paris en date du 1er février 2018 qui condamne le ministère de l'intérieur à indemniser un policier victime des agissements de son administration tout au long de sa carrière.

Publication des extraits d'un jugement du tribunal administratif de Paris en date du 1er février 2018 qui con

dommages et intérêts pour un policier victime des agissements de son administration

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PARIS

N°1605340/5-1

M.  G

 

 
  1. Buron Rapporteur

 

 

Mme Baratin Rapporteur public

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Paris (5ème Section - 1ère Chambre)

Audience du 18 janvier 2018 Lecture du 1er février 2018

 

 

36-06

36-09-04

36-07-04

36-07-07

D

Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance du 1er avril 2016, le tribunal administratif de Versailles a transmis la requête de M. D G au tribunal administratif de Paris.

Par  une  requête,  un   mémoire   et   des   pièces   complémentaires,   enregistrés   le  1er avril 2016 et le 14 juin 2017, M. G, représenté par Me Trennec, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite de rejet de la demande préalable indemnitaire reçue par l’administration le 29 février 2016 ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que l’attitude de l’administration est fautive dès lors que :

  • la décision de mutation de la circonscription de sécurité de proximité de Sartrouville vers le commissariat du 20ème arrondissement de Paris à compter du 14 décembre 2012 est une sanction déguisée ;
  • l’administration a délibérément baissé sa notation annuelle et a découragé toute velléité d’avancement ;

  • il a été l’objet d’une procédure disciplinaire arbitraire ;
  • les missions confiées au commissariat du 20ème arrondissement étaient sans corrélation avec son grade ;
  • l’administration s’est abstenue de communiquer son dossier administratif et de saisir la commission de réforme à la suite de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle ;
  • le refus de l’administration de lui accorder la protection fonctionnelle est illégal.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2016, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête de M. G.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. G ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier. Vu :

  • la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
  • la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires ;
  • le décret n° 2005-716 du 29 juin 2005 portant statut particulier du corps de commandement de la police nationale ;
  • le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 modifié fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires de la police nationale ;
  • le décret n°86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;
  • l’arrêté du 6 juin 2006 portant règlement national d’emploi de la police nationale ;
  • le code de la justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

  • le rapport de M. Buron,
  • les conclusions de Mme Baratin, rapporteur public,
  • et les observations de M. G.

Une note en délibéré présentée par M. G a été enregistrée le 19 janvier 2018.

(…)

En ce qui concerne la communication du dossier administratif :

  1. Considérant qu’aux termes de l’article 18 de la loi du 13 juillet 1983 : « (…) Tout fonctionnaire a accès à son dossier individuel dans les conditions définies par la loi (…) » ;

  1. Considérant  qu’il  résulte  de  l’instruction  que  M.  G  a,  par  courrier  du     12 octobre 2015 versé au dossier, sollicité la consultation de son dossier administratif individuel ; qu’en l’absence de réponse de l’administration, il a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) qui a émis un avis favorable le 8 septembre 2016 ; qu’en s’abstenant de communiquer son dossier administratif individuel et en se bornant à soutenir que le courrier du 12 octobre 2015 n’a jamais été reçu, alors que le requérant a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 septembre 2016, réitéré sa demande en y joignant l’avis susmentionné rendu par la CADA, l’administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

En ce qui concerne la reconnaissance de maladie professionnelle :

  1. Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : « Le fonctionnaire en activité a droit : (…) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (…) Toutefois, si la maladie provient (…) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (…) » ; qu’aux termes de l’article 12 du décret du 14 mars 1986 : « Dans chaque département, il est institué une commission de réforme départementale (…) » ; qu’aux termes de l’article 13 de ce décret : « La commission de réforme est consultée notamment sur : (…) 2. L'imputabilité au service de l'affection entraînant l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 34 (4°) de la loi du 11 janvier susvisée ; (…) » ; qu’aux termes de l’article 26 de ce même décret : « Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, les commissions de réforme prévues aux articles 10 et 12 ci-dessus sont obligatoirement consultées dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 34 (2°), 2° alinéa, de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. (…) La commission de réforme n'est toutefois pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. » ; que la combinaison de ces dispositions et de celles de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984 n’impose pas la consultation

préalable de la commission de réforme dans les cas où le défaut d'imputabilité au service de la maladie ou de l’accident est manifeste ;

  1. Considérant cependant qu’il résulte de l’instruction et notamment des certificats médicaux établis par les docteurs Bensoussan, psychiatre près la cour d’appel de Versailles et Goldenberg, du service de médecine statutaire et de contrôle de la préfecture de police, que l’affection dont souffre M. G n’est pas dénuée de tout lien avec ses conditions de travail ; qu’en outre, par courrier en date du 31 août 2015 reçu le 4 septembre 2015, M. G a demandé à l’administration d’imputer au service l’affection dont il souffre ; que dès lors, M. G est fondé à soutenir que l’administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ne saisissant pas la commission de réforme ;

En ce qui concerne le refus d’accorder la protection fonctionnelle :

  1. Considérant que la décision de refus d’accorder la protection fonctionnelle à

M. G a été annulée par jugement n°1413371 du 22 avril 2015 du tribunal de céans au motif qu’un harcèlement moral pouvait être présumé au sens des dispositions précitées de l’article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 ; que dès lors, M. G est fondé à soutenir que l’administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en refusant de lui accorder la protection fonctionnelle ;

Sur le préjudice :

  1. Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l’administration a commis des fautes de nature à engager la responsabilité de l’Etat ; que, cependant, M. G n’établit pas l’étendue du préjudice financier et de la perte à venir des droits à pension du fait de la stagnation de sa carrière qui résulteraient directement de ces illégalités fautives ; que ces préjudices qu’il invoque sont, dès lors, sans lien de causalité directe avec ces illégalités fautives ;

  1. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit aux points 14 et 15, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral, des troubles dans les conditions d’existence et de l’atteinte à la réputation professionnelle subis par le requérant en allouant à ce dernier une indemnité globale d’un montant de 6 000 euros, tous intérêts compris au jour de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. G et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’Etat est condamné à verser à M. G la somme de 6 000 euros en réparation du préjudice subi.

Article 2 : L’Etat versera à M. G la somme de 1 500 euros au titre de l’article

  1. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. D G et au ministre de l’intérieur.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2018, à laquelle siégeaient : Mme Viard, présidente,

  1. Charzat, premier conseiller,

M. Buron, conseiller,

Lu en audience publique le 1er février 2018.

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