Les demandes de raccordement aux réseaux des résidences mobiles ou caravanes posent d’épineuses questions aux maires des communes qui ne savent pas toujours quelle solution adopter face à des requêtes insistantes.
Le droit en la matière est délicat à manier dès lors que, selon la nature de la demande, ce raccordement est de droit ou soumis à appréciation.
L’article L.111-12 du code de l’urbanisme autorise un maire, au titre de ses pouvoirs de police spéciale destinés à faire respecter les règles d’utilisation du sol à s’opposer à un raccordement définitif aux réseaux d’une résidence mobile ne disposant pas de l’autorisation à laquelle elle est soumise. En revanche, dès lors que la demande d’autorisation de raccordement est provisoire, le maire ne peut la contrarier.
Il est dès lors déterminant de savoir identifier une demande de raccordement provisoire d’une demande de raccordement définitif, les apparences pouvant en cette matière se révéler trompeuses.
La notion de raccordement provisoire n’est en effet pas précisée par les textes en termes de durée en sorte que sa définition est laissée à l’entière appréciation des exécutifs locaux.
La Cour administrative d’appel de Paris a été confrontée à cette situation à propos d’une demande de raccordement au réseau d’électricité émanant de personnes appartenant à la communauté des gens du voyage.
Dans un premier temps, elle a rejeté l’appel dont elle était saisie par la commune avant finalement de se ranger à la solution dégagée par le Conseil d’Etat devant lequel la commune s’était pourvue en cassation (1) (2).
Propriétaires d’un terrain, les intéressés souhaitaient y installer une caravane à demeure et avaient demandé en conséquence l’autorisation d’un raccordement qu’ils avaient pourtant présenté comme provisoire à ERDF. La décision de raccordement relevant des pouvoirs de police du maire, ERDF, avait naturellement transmis la demande au maire qui s’y était opposé.
Le tribunal administratif de Melun saisi du litige avait donné raison aux propriétaires de la caravane en soulignant que la demande présentait un caractère provisoire et que par suite le maire n’avait pas le droit de la refuser.
La Cour administrative d’appel de Paris saisie de l’affaire adopte sur le dossier un point de vue différent.
Se défiant de l’apparence, elle examine non seulement le texte de la demande de raccordement, mais également le contexte qui l’éclaire.
Au cas particulier, la cour relève qu’une demande de raccordement pour une courte période, mais qui présente un caractère avéré de récurrence et d’habitude ne peut être qualifiée de provisoire, mais doit être regardée comme définitive.
La cour approuve ainsi le maire de la commune qui, constatant l’illégalité du stationnement dans une zone dangereuse car inondable s’était opposé au raccordement au réseau d’électricité de la commune.
La notion de raccordement provisoire ou définitif se trouve ainsi affinée par la jurisprudence.
Dans un arrêt du 9 novembre 2004, le Conseil d’Etat avait déjà eu l’occasion de préciser ce qu’il convenait d’entendre par demande de raccordement provisoire en censurant une opposition à raccordement présentée seulement pour la durée de l’hiver. Il est vrai que les rigueurs du temps combinées aux conditions précaires de vie des habitants avaient aussi guidé dans ce cas particulier la solution adoptée (3).
En réalité, le critère le plus fiable pour différencier une demande de raccordement provisoire d’une demande de raccordement définitif réside non pas tant dans sa durée que dans son objet.
Autrement dit, la demande de raccordement provisoire doit pouvoir indiquer sa raison d’être : durée d’un chantier, période de l’hiver, reconstruction d’une habitation détruite, etc). Un jugement du tribunal administratif de Melun en date du 23 juin 2023 considère ainsi une demande de branchement comme définitive dès lors que le chantier provisoire n’est pas caractérisé et que les installations d’habitations légères de loisirs ont été édifiées depuis 2016 démontrant ainsi la volonté des propriétaires de s’installer définitivement sur le terrain (3).
La leçon que l’on peut retirer des exemples qui précèdent est que dès lors que l’objet du raccordement n’est pas clairement précisé, et que les données de fait contredisent les termes de la demande provisoire, il y a tout lieu de penser qu’est dissimulée une demande de raccordement définitif !
Notes :
1 CAA Paris, 12 sept 2023, req. n° 220569.
2 CE, 23 nov. 2022, req. n° 459043.
2 CE, 9 avril 2004, req. n° 261521.
3 TA de Melun, req