LE NOUVEAU STATUT DE MEMBRE DE LA PALESTINE AUX NATIONS UNIES: UNE PERSPECTIVE LATINO- AMÉRICAINE

Publié le 27/12/2012 Vu 2 254 fois 0
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Le 23 septembre 2011, la Palestine a sollicité officiellement son admission auprès des Nations Unies. A la date d´aujourd´hui, le Conseil de Sécurité ne s´est pas prononcé sur cette demande. L´annonce du recours au droit de veto des Etats-Unis écarte pour le moment la reconnaissance de la Palestine comme Etat membre de plein droit des Nations Unies et reconnu comme tel ; mais cela ne signifie pas que la Palestine ne puisse agir en tant qu´Etat sur bien d´autres volets du droit international. Du point de vue juridique c´est tout le droit international public qui s´ouvre désormais à la Palestine après le vote de cette résolution du 29 novembre 2012. D´un point de vue politique, il est intéressant de noter que la référence dans le texte adopté le 29 novembre de la résolution 181 de 1947 (qui opère le Plan de Partition de la Palestine et suppose l´existence de deux Etats, l´un juif, l´autre arabe) n´est pas anodine. Tout au contraire, elle est en tout point remarquable.

Le 23 septembre 2011, la Palestine a sollicité officiellement son admission auprès des Nations Unies. A la

LE NOUVEAU STATUT DE MEMBRE DE LA PALESTINE AUX NATIONS UNIES: UNE PERSPECTIVE LATINO- AMÉRICAINE

Par: Nicolas Boeglin (*)

 

Lors d´une session fort suivie, l´Assemblée Générale des Nations Unies a finalement adopté le 29 novembre  2012 le projet de résolution A/67/l.28 portant sur le nouveau statut de la Palestine au sein des Nations Unies, présenté par 60 Etats (Note 1). Suite aux considérants, on y lit que:

« L´Assemblée Générale des Nations Unies... 

1.  Réaffirme le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à l’indépendance dans un État de Palestine sur le territoire palestinien occupé depuis 1967;

 2.  Décide d’accorder à la Palestine le statut d’État non membre observateur auprès de l’Organisation des Nations Unies, sans préjudice des droits et privilèges acquis et du rôle de l’Organisation de libération de la Palestine auprès de l’ONU en sa qualité de représentante du peuple palestinien, conformément aux résolutions et pratiques pertinentes;

 3.  Exprime l’espoir que le Conseil de sécurité examinera favorablement la demande présentée le 23 septembre 2011 par l’État de Palestine, qui souhaite devenir membre de plein droit de l’Organisation des Nations Unies;

 4.  Affirme sa détermination à contribuer à la réalisation des droits inaliénables du peuple palestinien et à un règlement pacifique de la question du Moyen-Orient qui mette fin à l’occupation remontant à 1967 et corresponde à la solution prévoyant deux États, avec un État palestinien indépendant, souverain, démocratique, d’un seul tenant et viable vivant dans la paix et la sécurité côte à côte avec Israël, sur la base des frontières d’avant 1967».

 

On notera que parmi les 60 Etats proposant le texte, ne figure aucun Etat membre de l´Union Européenne (Note 2). Par contre, l´Amérique Latine y participe avec l´Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Chili, Cuba, l´Equateur, le Nicaragua, le Pérou, l´Uruguay et le Venezuela . L´Afrique quand à elle avec:  l´Afrique du Sud, l´Algérie, les Comores, Djibouti, l´Égypte, la Guinée-Bissau, le Kenya, la Libye, Madagascar, le Mali, le Maroc, la Mauritanie, la Namibie, le Nigéria, le Sénégal, la Sierra Leone, la Somalie, le Soudan, la Tunisie et le Zimbabwe.    


ENSEIGNEMENTS TIRÉS A PARTIR DE VOTES RÉCENTS  AUX NATIONES UNIES:

Le résultat du vote obtenu à l´Assemblée Générale  (138 votes pour, 9 contre et 41 abstentions)  du 29 novembre 2012 doit être comparé à la première tentative menée en 1989 para la Palestine auprès d´une institution spécialisée des Nations Unies: à l´époque la demande d´admission auprès de l´OMS fut rejetée par  83 votes contre, 47 pour  et  20 abstentions. Une seconde demande d´admission présentée la même année auprès de l´UNESCO cette fois (voir texte de la demande d´admission)  fut finalement remise à plus tard, les Etats-Unis menaçant de ne pas se réintégrer à l´UNESCO (qu´ils avaient quittée en 1984) au cas où la Palestine obtiendrait gain de cause (Note 3).

Il aura fallu attendre 22 ans (octobre 2011) pour que la Palestine obtienne finalement le statut de membre de plein droit à l´UNESCO avec 107 votes pour, 14 contre et 52 abstentions. Le professeur Philippe Weckel  dans son analyse à propos de ce vote d´octobre 2011 indiquait que : «L'Europe des 27 s'est éclatée entre  11 qui ont voté pour l'adhésion, 11 qui se sont abstenus, dont le Royaume-Uni et l'Italie, et 5 qui ont voté contre : Allemagne, Pays-Bas, République tchèque, Suède et Lituanie ».  Une étude systématique permettrait sans aucun doute de déceler des tendances régionales de ces trois votes survenus en 1989, en  2011 et en 2012.  

Une note récente parue dans l´édition du 29 novembre 2012 du Washington Post indique les changements de positions des Etats de l´Union Européenne survenus à l´occasion de ces deux derniers votes : notamment , parmi d´autres replis stratégiques, celui de la Suède (votant contre l´admission de la Palestine á l´UNESCO mais en faveur de nouveau statut auprès des Nations Unies), plusieurs abstentions en octobre 2011 devenues votes en faveur en 2012,  et de l´Ukraine qui a eu recours dans les deux cas à la technique de l´absence de ses délégués dans la salle au moment du vote (« no show »).

Cette même note du The Washington Post, généralement bien informé, fait aussi référence à une proposition  de la diplomatie britannique aux autorités palestiniennes : le Royaume-Uni serait prêt à voter en faveur du texte de la résolution en échange d´assurances de la Palestine de ne pas recourir à la Cour Pénale Internationale (CPI) : « The U.K. suggested that it might vote “yes” if the Palestinian Authority offered assurances that it wouldn’t pursue charges in the International Criminal Court, but apparently came away unsatisfied ».

LA PARTICIPATION DE L´AMERIQUE LATINE :

Le détail du vote du 29 novembre 2012 indique que le Panama du Président Martinelli est le seul pays  de l´Amérique Latine à suivre les Etats-Unis et Israël avec  6 autres Etats pour voter contre le texte (Canada, Iles Marshall, Micronésie, Nauru, Palau et République tchèque).

Au plan hémisphérique, on notera que la décision du Canada de rejoindre ce groupe d´Etats  a été l´objet de vives critiques, y compris de la part d´une ONG juive de droits de l´homme réprimandant publiquement la décision du Premier Ministre Harper. Parmi les 41 abstentions, on y trouve la Colombie et le Guatemala (ce qui n´est  pas une surprise, mais pourrait indiquer un changement d´attitude de leurs autorités par rapport au discours tenus en septembre  2011 à New York)  tout comme Haïti et le Paraguay, ce qui constitue une véritable nouveauté (Note 4).

Il convient de relever qu´en 2011, lors de l´annonce d´une éventuelle demande d´admission de la Palestine en tant que membre de plein droit des Nations Unies, les chefs d´Etats d´Amérique Latine étaient  venus à la tribune des Nations Unies au mois de septembre  pour appuyer sans réserves  cette initiative, à l´exception des présidents de la Colombie, du Guatemala et du Panama. Les résultats d´une  forte offensive diplomatique d´Israël  dans la région, incluant le Costa Rica, ne seront jamais connus puisque le vote au sein de l´Assemblée Générale ne vit jamais le jour, mais pour certains elle provoqua quelques remous, comme par exemple l´indécision soudaine de la Présidente en exercice du Costa Rica lors de son discours prononcé le 22 septembre 2011:  la Présidente du Costa Rica s´était réunie avec le Premier ministre israélien puis  avec les autorités palestiniennes quelques heures avant de prononcer son discours à New York.

 

LE CAS DU COSTA RICA:

Le Costa Rica constitue à bien des égards un cas à part en Amérique Latine. Traditionnellement  lié aux intérêts des Etats-Unis et à ceux d´Israël, ses votes aux Nations Unies, notamment à la Commission des Droits de l´Homme ou à l´Assemblée Générale ou au Conseil de Sécurité  (Note 5) témoignent de son alignement  depuis de longues décennies sur les positions de Washington concernant  la question du conflit au Moyen Orient. Cet Etat ne s´est décidé à transférer son Ambassade de Jérusalem Est à Tel-Aviv qu´au mois d´août  2006, afin de rectifier  son  « erreur historique » (selon l´expression du Président Oscar Arias Sánchez, dont le second mandat  débuta  en mai 2006 pour 4 ans), provoquant  immédiatement la profonde  « déception » des autorités israéliennes

 

Ce faisant, le Costa Rica devint l´avant dernier Etat à transférer son ambassade de Jérusalem-Est vers Tel-Aviv (le dernier Etat à procéder de la sorte fut le Salvador quelques mois plus tard). Dans la foulée,  les autorités du Costa Rica redéfinissaient leur position vis-à-vis du monde arabe (Note 6) et tout particulièrement à l´endroit de la Palestine.  Au mois de février 2008,  le Costa Rica  décidait de reconnaître la Palestine comme entité étatique  et d´établir des relations diplomatiques avec ses autorités. La surprise fut totale pour les  autorités israéliennes, mais aussi, et surtout, pour les Etats-Unis: une dépêche diplomatique de l Ambassade à San José  rendue publique par Wikileaks indique : « On February 5, GOCR (Government of Costa Rica) Permrep Jorge Urbina exchanged  notes in New York with Palestinian representative Riyad  Mansour, formalizing Costa Rica,s recognition of the ""state""  of Palestine. The MFA in San Jose issued a release eight  hours later confirming the news, which came as a complete  surprise to most local diplomatic missions (including Post)“  (Voir texte complet).

La réaction israélienne à cette reconnaissance mérite d´être citée car elle réapparaîtra dans bien d´autres enceintes et discours officiels d´autres Etats et se lit ainsi. « Etablir des relations avec un Etat qui n´en est pas un compromet le développement d´accords définitifs entre Israéliens et Palestiniens, va à l´encontre de la Feuille de route, des activités du Quartette et d´autres efforts pour la paix.

Ces agissements vont à l´encontre des accords, y compris ceux de la communauté internationale, et pourraient nuire aux efforts de paix entre les deux parties” (Traduction libre de l´auteur de : “Establecer relaciones con Estado que no existe compromete el desarrollo de los acuerdos definidos entre israelitas y palestinos, va en contra de la Hoja de Ruta, actividades del Cuarteto y otros esfuerzos para la paz. Estos acontecimientos van en contra de los acuerdos, incluso, de la comunidad internacional y, podrían dañar los esfuerzos para alcanzar la paz entre ambas partes” » (tiré de l´entrevue dans la presse costaricienne  d´ Ehud Eitam, ambassadeur d´Israël au Costa Rica).  

Le communiqué officiel du ministère des Relations Extérieures du Costa Rica en date du 5 février 2008  se lit quand à lui de la façon suivante: “Le Costa Rica a reconnu l´Etat de Palestine le 5 février 2008, honorant ainsi une dette historique, en particulier celle d´avoir été l´un des 33 Etats ayant avoir voté en faveur du plan de partition de la Palestine. En ce sens, le Costa Rica est d´avis que la communauté internationale doit contribuer de façon active à la solution du conflit palestino-israélien, en généralisant  cette reconnaissance”  (Traduction libre de l´auteur:  « Costa Rica reconoció al Estado de Palestina el 5 de febrero del 2008, honrando una deuda histórica, especialmente por haber sido uno de los 33 países que votaron a favor de la resolución que aprobó el Plan de ParticiónEn este sentido, Costa Rica es del criterio de que la Comunidad Internacional debe contribuir activamente a la solución del conflicto palestino- israelí, generalizando ese reconocimiento”.  

S´agissant d´un Etat désireux d´honorer sa dette et ayant délaissé depuis de très longues années ses relations avec le monde arabe, bénéficiant de fonds de coopération et de programmes israéliens en matière de sécurité, … tout portait à croire qu´il ne s´agissait là que d´une simple mise à jour diplomatique des autorités du Costa Rica (durant le mandat  présidentiel 2006-2010 d´un ancien Prix Nobel de la Paix) et que leur appel à la communauté internationale n´aurait que peu ou pas d´échos.

 

UN EFFET INATTENDU :

Nonobstant, l´établissement de relations officielles avec la Palestine par le Costa Rica constitue le point de départ d´une reconnaissance récente de l´Etat palestinien par bien d´autres Etats: lors de sa demande d´admission en 1989 auprès de l´UNESCO, les autorités palestiniennes recensaient 92 Etats les reconnaissant en tant qu´entité étatique (voir liste inclue dans la demande d´admission).

Entre 1998 et févier 2008, seuls 4 Etats avaient procédé à reconnaître la Palestine comme Etat  (Malawi, Timor oriental, le Turkménistan et le Monténégro). Après le mois de févier 2008 on assiste à une cascade de reconnaissances en Amérique dans l´ordre qui suit : Venezuela (avril 2009), République Dominicaine (juillet  2009), Bolivie, Brésil, Equateur  et  Paraguay (décembre  2010), Pérou et Chili (janvier 2011), Argentine (février 2011), Uruguay (mars 2011), El Salvador et Honduras (août 2011), auxquelles  il faut ajouter les reconnaissances de Cuba (1988)  et du Nicaragua (1988), ainsi que celle du Mexique qui héberge une représentation de la Palestine depuis 1975 à Mexico. On notera au passage  qu´outre les Etats anglophones de l´hémisphère américain - tels que le Guyana (janvier 2011), Suriname (février 2011), Saint Vincent-et-les-Grenadines (août 2011), Belize et la Dominique (septembre 2011) -  d´autres Etats qui n´appartiennent pas à l´Amérique Latine reconnaissent l´Etat de Palestine après févier 2008, à savoir le Liban (novembre 2008), le Lesotho (juin 2011),  la Syrie (juillet 2011), l´Islande (décembre 2011) et la Thaïlande (janvier 2012).

 

ETATS-UNIS: UN APPAREIL DIPLOMATIQUE QUELQUE PEU DÉPASSÉ 

Nul doute que d´autres facteurs peuvent expliquer cette augmentation du nombre de reconnaissances de la Palestine comme Etat, notamment les alliances politiques qui animent le sud du continent depuis quelques années et l´activité diplomatique palestinienne dans la région.. Un autre facteur dont il faut tenir compte est le désintérêt profond de l´administration étasunienne durant l´administration du président  Bush pour l´Amérique Latine: les indiscrétions des câbles Wikileaks sont  sans ambigüités à propos de la perception des responsables politiques à l´ambassade des Etats-Unis à San José transmises à leurs supérieurs à Washington quant au bien fondé de la position du Costa Rica: « a well-reasoned rationale for recognizing “State” of Palestine, taking into account Costa Rica´s yes vote on UN Resolution 181 and the GOCR (Government of Costa Rica) desire to give a strong show of support to Abbas, in the face of Hamas” :  il s´agit  d´une source diplomatique citée directement par Bruno Stagno (qui fut ministre des relations extérieures du Costa Rica  pendant la période 2006-2010,) lors de son intervention à un colloque célébré par les Nations Unies à Montevideo fin mars 2011 portant sur l´appui des Etats d´Amérique Latine et des Caraïbes au processus de paix israélo-palestinien . Ce texte est de lecture obligatoire pour bien comprendre les motivations profondes du Costa Rica sur le sujet et la ferme volonté des autorités de l´époque de marquer la différence.  

On y lit notamment que. “Je crois que nous avons tous eu l´occasion d´écouter un quatuor et que nous pouvons tous faire la différence entre des maîtres et des amateurs de musique de chambre. Le Quartette pour le Moyen Orient  est le seul quatuor dans lequel trois de ses musiciens jouent chacun une partition musicale différente pendant que le quatrième cherche désespérément la sienne » (Traduction libre de « Creo que todos hemos escuchado un cuarteto y podemos diferenciar entre maestros y aficionados a la música de cámara. Pues el Cuarteto para el Medio Oriente es el único cuarteto en el cual tres de los integrantes tocan partituras diferentes mientras el cuarto integrante busca desconsoladamente la suya”  (voir texte de Bruno Stagno en espagnol),

Quelques semaines auparavant, au début du mois de mars 2011, les câbles Wikileaks mis à disposition de l´opinion publique du Costa Rica témoignent  de l´effet surprise des décisions prises par les autorités du Costa Rica en 2006 et en 2008 et de l´incapacité des diplomates  israéliens et étasuniens de les anticiper ou de déceler  à temps des signes annonciateurs. Ces mêmes sources officielles étasuniennes rendues publiques  mettent aussi en évidence  la politique du « fait accompli » menée sans  aucun complexe par les diplomates du Costa Rica. Dans l´une des dépêches diplomatiques confidentielles du conseiller politique de l´ambassade des Etats Unis à San José à ses supérieurs, on y lit que  : « The  no-notice, no-consultation way this decision was announced is  also in keeping with the foreign policy decision making style  of this second Arias administration » (Câble Wikileaks du 19/02/2008 reproduit ici). Il est clair que les diplomates israéliens et étasuniens  n´ont rien vu venir. Ce  qui, d´un  point de vue strictement  politique, s´agissant d´un Etat situé en Amérique Centrale, constitue en soi un véritable tour de force (remarquable et peu remarqué).

 

PERSPECTIVES POUR LA PALESTINE.

Précisément, dans un article  récent publié dans La República (Costa Rica),  Bruno Stagno, qui présida tout en étant ministre,  la Conférence des Etats Parties à la Cour Pénale Internationale (2005-2008), est  on ne peut plus clair: “Au delà de l´importance de cette décision en ce qui concerne l´autodétermination de la Palestine, elle a aussi des effets juridiques et politiques sur les éventuelles négociations de paix au Moyen Orient. Pour la première fois dans son histoire, la Palestine pourra adhérer à des traités internationaux, y compris le Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale».  (traduction libre de l´auteur de    "Más allá de la importancia que tiene esta decisión sobre la autodeterminación de Palestina, tiene importantes efectos jurídicos y políticos sobre las eventuales negociaciones de paz en el Medio Oriente. En primer lugar, por primera vez en su historia, Palestina ahora podrá suscribir tratados internacionales, incluyendo en particular el Estatuto de Roma de la Corte Penal Internacional." (Note 7). 

 

On relèvera que la Palestine déposa le 21 janvier 2009 une déclaration d´acceptation de la juridiction de la Cour Pénale Internationale, laquelle omet de préciser la nationalité des victimes et des « auteurs et complices d´actes perpétrés sur le territoire de la Palestine depuis le 1er juillet 2002 (traduction libre de : « the Government of Palestine recognizes the jurisdiction of the  Court for the purpose of  identifying, prosecuting and judging the authors and accomplices  of acts commitied on the territory of  Palestine since July 2002 » (Note 8).

 

On lira et relira sûrement après le 29 novembre dans bien des capitales la lettre ouverte signée par d´éminents spécialistes du droit international public concernant « Les effets de la reconnaissance para la Palestine de la compétence de la CPI », datée du mois de mai 2010 (voir document). Le professeur David Ruzié avait signalé, avant les élections françaises de 2012 que les choses pourraient changer  pour les autorités israéliennes: « En revanche, la menace de voir Israël mis en cause devant la CPI serait grande si la France reprenait l’idée émise par le président (actuellement) candidat Nicolas Sarkozy, lors de son discours devant l’Assemblée générale en septembre dernier, visant à accorder à la « Palestine » le statut d’ « Etat non membre », analogue à celui reconnu à la Suisse avant son admission dans l’Organisation. Certes, la « Palestine » ne serait pas « Etat membre », mais sa qualité d’Etat non-membre » impliquerait celle d’ « Etat » avec toutes les conséquences qui en découleraient au regard de la CPI » (voir son article « La CPI et la «Palestine » », d´avril 2012).

On connait l´hostilité affichée et partagée de la part des Etats-Unis et d´Israël vis-à vis de la justice pénale internationale. Il convient de rappeler à ce sujet que ces deux Etats  – ainsi que l´Iran -  ont procédé au dépôt de la signature du Statut de Rome le dernier jour pour le faire : les deux premiers ont procédé ensuite à retirer leur signature  quelques années plus tard  - tout comme le fera le Soudan -, ce qui constitue une véritable innovation en droit international public.  Le premier accord bilatéral d´immunité (BIA en anglais) afin d´écarter la compétence de la CPI au personnel militaire et non militaire étasunien fut signé entre Israël et les Etats-Unis le 4 août 2002. (pour  une étude plus ample, nous renvoyons à notre modeste note concernant le dixième anniversaire de l´entrée en vigueur de la CPI).

Aussi, que la résolution adoptée le 29 novembre 2012 soit ou non du goût d´Isräel, des Etats-Unis et de leurs sept alliés de circonstance ayant voté contre, ou encore de la diplomatie britannique (inélégamment  explicite sur ce point précis  …), la résolution adoptée le 29 novembre 2012 à New York permet désormais à la Palestine de se rapprocher un peu plus, en tant qu´Etat, du système des Nations Unies, et notamment  des traités relatifs aux droits de l´homme et de ceux relatif à la justice pénale internationale.

 

CONCLUSION:

 

Le 23 septembre 2011, la Palestine  a sollicité officiellement son admission auprès des Nations Unies. A la date d´aujourd´hui, le Conseil de Sécurité ne s´est pas prononcé sur cette demande. L´annonce du recours au droit de veto des Etats-Unis écarte pour le moment la reconnaissance de la Palestine comme Etat membre de plein droit des Nations Unies et reconnu comme tel ; mais cela ne signifie pas que la Palestine ne puisse agir en tant qu´Etat sur bien d´autres volets du droit international.

 

Du point de vue juridique c´est tout le droit international public qui s´ouvre désormais à la Palestine après le vote de cette résolution du 29 novembre 2012. D´un point de vue politique,  il est intéressant de noter que la référence dans le texte adopté le 29 novembre de la résolution 181 de 1947 (qui opère le Plan de Partition de la Palestine et suppose l´existence de deux Etats, l´un juif, l´autre arabe) n´est pas anodine. Tout au contraire, elle est en tout point remarquable. Fin connaisseur de la vie internationale, le Professeur Weckel,  l´a immédiatement relevé dans son analyse précédemment citée : « Occupées avec des hochets comme la saisine de la Cour pénale internationale, les délégations n’ont rien vu venir (nous non plus). Elles n’ont pas réagi au surgissement de la résolution 181 de 1947, comme la Statue du Commandeur, un deus ex machina convoqué par un habile sorcier. Le Président Abbas a réussi une véritable prouesse diplomatique : ce qui ne devait être qu’une pauvre compensation à l’échec provisoire de l’admission en tant que membre de l’ONU a été complètement retourné à l’avantage de la partie palestinienne pour constituer un véritable titre comme l’a été la Résolution 181 pour Israël ». Cette référence au texte de 1947  devrait en outre signifier la reconnaissance d´une dette historique envers la Palestine, non pas seulement du Costa Rica ou de l´Amérique Latine, mais de la communauté internationale en tant que telle.  

 

Comme le dit bien le professeur Jean Salmon dans sa conclusion de l´article précité, « reconnaître l´Etat palestinien n´est sans soute rien de plus que l´affirmation du droit du peuple palestinien à créer aussitôt que possible cet Etat, mais c´est surtout poser un acte de solidarité à l´égard du peuple palestinien et de volonté de respect du droit international » (Note 9).

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Note 1: Le projet de résolution a été proposé par les Etats suivants:  Afghanistan, Afrique du Sud, Algérie, Arabie saoudite, Argentine, Bangladesh, Bahreïn, Bolivie (État plurinational de), Brésil, Brunei Darussalam, Chili, Chine, Comores, Cuba, Djibouti, Égypte, Émirats arabes unis, Équateur, Guinée-Bissau, Guyana, Inde, Indonésie, Iraq, Islande, Jordanie, Kazakhstan, Kenya, Koweït, Liban, Libye, Madagascar, Malaisie, Maldives, Mali, Maroc, Mauritanie, Namibie, Nicaragua, Nigéria, Oman, Pakistan, Pérou, Qatar, République démocratique populaire lao, République populaire démocratique de Corée, Saint-Vincent-et-les Grenadines, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Tadjikistan, Tunisie, Turquie, Uruguay, Venezuela (République bolivarienne du), Yémen, Zimbabwe et la Palestine.


Note 2 : On remarquera pour ce qui concerne le continent européen la présence dans ce groupe de l´Islande et de la Turquie,  qui avait  très tôt (juin 2011) annoncé son appui a la reconnaissance par les Nations Unies de l´Etat palestinien : voir note de presse

Note 3 : Les Etats-Unis se sont retirés de l´UNESCO le 1er janvier 1985, et n´y sont revenus qu´en 2003, plongeant l´organisation dans un crise profonde. Voir  M. FLORY  « La crise de l´UNESCO », 31 AFDI (Annuaire Français de Droit International) (1985), pp. 653- 670. Sur le retour des Etats –Unis en 2003, voir article en ligne de D. FRAU-MEIGS. sans indication de date.

 

Note 4 : Dans le cas du Paraguay du Président Franco, le vote du Paraguay aux Nations-Unies semblerait  lié, selon un article de presse paraguayenne, à un contrat de viande bovine avec les autorités israéliennes signé un mois auparavant. Voir  note de presse de E´A

 

Note 5 : A notre connaissance il n´existe pas d´étude systématique sur les votes du Costa Rica sur les questions du Moyen Orient au sein des diverses instances onusiennes qui ait été rendue publique, mais quelques exemples peuvent  donner une idée de la lecture qu´en faisaient ses autorités  : dans la Rubrique du Professeur Paul Tavernier de 1997, on y lit par exemple que les Etats-Unis opposent  au sein du Conseil de Sécurité leur droit de véto concernant deux résolutions relatives à la construction d´habitations à Jérusalem-Est :  dans l´une d´elle, « le second projet (S/1997/241) recueille 13 voix contre 1 (Etats-Unis) et une abstention (Costa Rica) (SPV/3756) ». Cf. 43, AFDI (1997), p. 510, note 47. Dans son article sur la déclaration de Balfour, le professeur Jean Salmon indique que  la résolution 43/176 adoptée le 15 décembre 1988 à Genève intitulée « Question de Palestine » est adoptée par 138 voix pour, 2 contre (Etats-Unis et Israël) et 2 abstentions (Canada et Costa Rica) ».  Cf. J. SALMON,  « La proclamation de l´Etat palestinien », 34, AFDI (1988), pp. 37-62, p. 38.

 

Note 6 : Le Costa Rica, sous la houlette du Président Oscar Arias Sanchez (2006-2010) avait procédé durant les années précédentes à 2008 à l´établissement des relations diplomatiques  avec l´Egypte (13 septembre 2006), Bahreïn (22 septembre 2006), le Koweït (22 de septembre 2006), la Jordanie (10 janvier  2007), le Liban (24 août 2007), le Yémen (4 septembre 2007) et Oman (20 décembre 2007).

 

Note 7: Article de Bruno Stagno: Palestina y la CPI, La República, (Costa Rica) du 3/12/2012. Reproduit (texte en espagnol) à la fin de cette note.

 

Note 8: Cf. sur les effets de cette cette déclaration  A. PELLET, « The declaration of Palestine and the jurisdiction of the International Criminal Court », 8, Journal of International Criminal Justice, Issue 4 (2010), pp. 981-999.

 

Note 9 : Cf. J. SALMON,  « La proclamation de l´Etat palestinien », 34, AFDI (1988), pp. 37-62, p. 62

 

(*) Professeur de droit international public, Faculté de Droit, Universidad  de Costa Rica

 

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