Pour mémoire, alors que la liberté d’expression est sacrée en droit français, l’article 38 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse :
« Il est interdit de publier les actes d'accusation et tous autres actes de procédure criminelle ou correctionnelle avant qu'ils aient été lus en audience publique et ce, sous peine d'une amende de 3 750 euros. ».
Cet article justifie l’ingérence dans la liberté d’expression par un souci de protéger la présomption d’innocence des accusés et de garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire.
Ainsi, il s’agit d’éviter que les journalistes ne livrent au public leurs propres conclusions, faussement étayées par une vision probablement partisane et partielle d’un dossier, alors qu’une enquête pénale et une instruction de l’affaire sont en cours et que le tribunal n’a encore pris aucune décision de condamnation.
Il s’agit également d’empêcher que les journalistes viennent perturber le bon déroulement des procédures pénales, tant au stade de l’enquête qu’à celui du jugement et ne portent pas d’atteinte au droit de chacun à un procès équitable.
De ce fait, le journaliste qui obtient des informations de la part de policiers, de magistrats ou d’avocats, c’est à dire de personnes ayant directement accès à l’instruction et qui les diffuse avant la comparution de l’accusé ou du prévenu devant les juridictions répressives peut faire l’objet de poursuites pénales et, le cas échéant, de condamnations.
En l’espèce, le célèbre hebdomadaire Le Point a publié deux articles dans lesquels étaient reproduits des extraits d’actes d’une procédure pénale concernant Monsieur X avant sa comparution devant le tribunal correctionnel.
Monsieur X a alors introduit une action en justice contre le rédacteur de ces articles, la société exploitant l’hebdomadaire et le directeur de la publication de celui-ci en réparation du dommage qu'il prétendait avoir subi du fait de la publication des articles de presse litigieux.
La Cour d’appel a accueilli favorablement cette demande estimant que la reproduction par le journal d'actes de procédure portait une atteinte grave aux droits de la défense de Monsieur X et à son droit de bénéficier d'un procès équitable.
Les juges d’appel ont donc condamné solidairement l’auteur des articles, la société Le Point et son directeur de la publication à réparer le préjudice moral subi par Monsieur X, outre la publication judiciaire de la décision de justice rendue dans l’hebdomadaire et sur le site internet de celui-ci.
La Cour de cassation a confirmé la décision d’appel compte tenu que :
d’une part, les extraits publiés présentaient Monsieur X comme étant coupable des faits qui lui sont reprochés ;
d’autre part, ces extraits ont été publiés la veille de la comparution de Monsieur X devant le tribunal correctionnel, et à deux mois d’une autre audience. Â
Ainsi, la Cour de cassation a jugé que :
« la publication desdits actes portait atteinte au droit de Monsieur X à un procès équitable dans le respect de son droit à la présomption d'innocence et des droits de sa défense ».
Par conséquent, la publication d’extraits d'actes d'une procédure pénale dans la presse ou sur internet peut porter atteinte au principe de la présomption d’innocence et entraîner la condamnation de leurs auteurs à en réparer toutes les conséquences dommageables au profit de la victime.
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Anthony Bem
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