Pendant longtemps, les hommes ont considéré les animaux comme des êtres juridiquement indignes de protection.
Il a fallu attendre le XVIIIème siècle pour que la situation commence à évoluer, sous l’influence notamment des penseurs et philosophes tels que Jean-Jacques Rousseau, Jeremy Bentham et Emmanuel Kant.
Kant développa une théorie autour de la question de la protection des animaux en partant du postulat que « l'homme qui est capable de cruauté avec eux, sera aussi capable de dureté avec ses semblables. On peut déjà juger du coeur d'un homme au traitement qu'il réserve aux animaux. » (E. Kant, Leçons d’éthique, 1775-1780).
La loi Grammont du 2 juillet 1850 donnera raison à Kant en sanctionnant les mauvais traitements infligés aux animaux en public, dans le but de protéger la sensibilité humaine contre le spectacle de la souffrance des bêtes.
Depuis lors, la législation protectrice des animaux a évolué, de sorte qu’aujourd’hui le fait, publiquement ou non, d'exercer des sévices graves ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique est pénalement sanctionné.
Si désormais les animaux sont protégés en raison de leur nature d’êtres sensibles et non plus pour des raisons de protection de la sensibilité des hommes, la conception humanitaire qui a été à l’origine de la protection animale pourrait un jour conduire à la prise en considération des liens de plus en plus affectifs entre humains et robots et à la protection juridique de ces derniers contre les atteintes à leur intégrité.
En effet, avec l’introduction des robots humanoïdes de service, notamment pour les jeunes élèves, les personnes âgées, celles en état d’altération des facultés mentales et demain le grand public, la conception des robots s’approchera des scenarii de la littérature et du cinéma de science-fiction.
Une étude présentée par trois chercheurs de l’université de Duisbourg en Allemagne a d’ailleurs conclu que les hommes sont capables de ressentir de la compassion pour un robot soumis à un mauvais traitement.
Pour en arriver à cette conclusion, les chercheurs ont d'abord montré à des personnes une vidéo d'un robot en forme de dinosaure qui était traité de manière tantôt violente tantôt affectueuse.
Questionnés par les chercheurs après la projection, les patients ont confié qu'ils avaient mal vécu les scènes où le robot était maltraité.
Pendant ces moments, leur niveau d'attention, mesuré tout au long du visionnage, était plus élevé que pendant les passages où le robot était cajolé.
Plus surprenant encore, les chercheurs ont observé que les patients avaient la même réaction nerveuse devant des vidéos d'humains secoués, poussés ou étouffés avec un sac en plastique.
Ces observations scientifiques qui plaident pour la protection juridique des robots n’ont rien d’étonnant quand l’on sait que, plus les robots rendront des services aux humains dans leur vie quotidienne, plus ils seront regardés avec anthropomorphisme, c’est-à-dire plus on leur attribuera des caractéristiques comportementales ou morphologiques humaines.
Par exemple, se servant de NAO, les chercheurs Susan Anderson, philosophe à l'Université du Connecticut, et Michael Anderson, informaticien à l'Université de Hartford, sont parvenus à le programmer afin de le rendre capable de prendre une décision éthique.
Ainsi, face à un patient qui refuse de prendre ses médicaments, le robot peut réaliser un arbitrage entre le risque de sauter une dose et le respect de l'autonomie du patient.
Si le risque de non-conformité est faible, c’est-à-dire si la prise du médicament n’est pas vitale, le robot qui amène les cachets peut simplement se retirer.
Mais si le fait de ne pas prendre le médicament risque de faire perdre conscience à la personne, le robot peut insister pour qu'elle les prenne et s’il ne parvient pas à convaincre le patient, il prévient le médecin responsable.
Certes, ces observations tirées d’études scientifiques ne permettent pas d’assimiler les robots à des humains ni à des animaux.
Néanmoins elles pourraient conduire à réprimer le fait de porter des atteintes à l’intégrité des robots, non pas pour protéger les robots eux-mêmes en tant qu’objets dignes de protection, mais pour protéger la sensibilité des humains et conserver une société civilisée.
Le code pénal fournit déjà une partie de la solution en ce qu’il punit de peines d’emprisonnement et d’amendes les destructions, dégradations et détériorations des biens d’autrui.
Mais, au vu du développement de robots ressemblant de plus en plus à des humains, et capables de déclencher de l'empathie et des émotions, ces règles ne sauraient suffire et rendront nécessaire d’élaborer un régime spécial de protection juridique des robots.
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Anthony Bem
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