Héritage : le partage d'une indivision successorale

Publié le Modifié le 24/06/2015 Vu 47 804 fois 18
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Comment se partage l'héritage entre les héritiers du défunt ?

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Héritage : le partage d'une indivision successorale

La notion d'indivision peut intervenir dans différents cas de figure. Cette situation de propriété en commun peut en effet être le résultat d'une succession, d'une donation, de la dissolution d'une société, amis aussi d'un acte d'acquisition. 

L'indivision est la situation juridique d'un bien sur lequel plusieurs personnes exercent conjointement des droits de même nature. 

Le droit de chaque indivisaire porte sur l'ensemble du bien indivis et non sur une portion déterminée.

Nous n'envisagerons dans le présent article que la question de l'indivision successorale et plus particulièrement celle de son partage.

Le droit de tout indivisaire de demander le partage est un droit absolu, impératif et imprescriptible.

Objet de nombreux contentieux, le partage d'une indivision successorale passe souvent par la case Tribunal.

Trop souvent le contenu du droit de demander le partage est méconnu ou ignorer par les ayants droits (I).

A ce sujet, il convient aussi de constater que malheuresement les Notaires sont défaillants dans leur mission de conseil et d'information à envers leurs client.

La procédure de partage est légalement encadrée et mérite un petit rappel des règles principales (II)

I - LE DROIT DE DEMANDER LE PARTAGE DE L’INDIVISION SUCCESSORALE

Le droit de demander le partage amiable ou à défaut judiciaire revêt trois caractères essentiels qu'il convient d'envisager successivement : c'est un droit absolu (1), impératif (2) et imprescriptible (3).

1.1 - Droit absolu

Le droit de demander le partage peut être qualifié d'absolu au sens qu'il est indépendant de toute volonté contraire qui prétendrait s'y opposer.

Il s'impose, tout d'abord, aux coïndivisaires, qui ne peuvent empêcher l'un d'entre eux de sortir de l'indivision, et cela quelle qu'en soit la raison.

Même si cette demande n'est motivée que par la seule intention de nuire aux coïndivisaires, ces derniers ne peuvent s'y opposer : l'abus de droit est expressément écarté en la matière (CA Nancy, 16 nov. 1961).

Le droit de chaque indivisaire de demander le partage s'impose, ensuite, au juge lui-même. Dès lors qu'il est saisi d'une demande en partage par un indivisaire, le juge ne peut qu'ordonner le partage demandé.

Un testament, pas plus qu'un autre acte juridique, ne saurait imposer une indivision perpétuelle manifestement contraire au principe d'ordre public énoncé à l'article 815 du Code civil.

Même si, aux termes de ce texte, un jugement ou une convention peuvent "surseoir" au partage, celui-ci ne peut être écarté définitivement par une manifestation quelconque de volonté. Ce point ne fait aucun doute et a été fixé depuis longtemps par la Cour de cassation (Cass. civ., 29 juin 1933).

1.2 - Droit impératif

Le droit de demander le partage est impératif au sens où l'on ne peut y déroger, sauf au moyen des conventions auxquelles l'article 815 in fine du Code civil fait référence.

Cela signifie que seul un acte juridique satisfaisant aux prescriptions des articles 1873-2 et suivants du Code civil pourra faire obstacle au droit de tout indivisaire de demander le partage.

De plus, même lorsqu'elle est conclue conformément aux articles 1873-2 et suivants du Code civil, une convention n'écarte la possibilité de demander le partage que de manière temporaire. Le partage peut toujours être provoqué soit, si la convention a été conclue pour une durée qui ne peut excéder cinq ans, à l'expiration de ce délai, voire avant s'il y a de justes motifs (C. civ., art. 1873-3, al. 1er) ; soit, si la convention a été conclue pour une durée indéterminée, à tout moment, pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps (C. civ., art. 1873-3, al. 2).

De manière plus générale, le droit de demander le partage est impératif en ce sens qu'il n'est pas subordonné à la survenance d'un acte ou d'un fait juridique quelconque, autre, bien entendu, que la demande de l'indivisaire qui entend sortir de l'indivision.

1.3 - Droit imprescriptible

Quel que soit le laps de temps écoulé depuis le début de l'indivision, tout indivisaire conserve toujours la possibilité de demander le partage.

Dans un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation, le 12 décembre 2007, il est encore rappelé le principe qu’il n'existe pas de prescription extinctive de l'action en partage  :

« Attendu que nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision ; que le droit de demander le partage étant imprescriptible, celui-ci peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention ».

En revanche, la prescription acquisitive (usucapion) au profit d'autrui peut faire obstacle à la demande en partage formée par un indivisaire.

Un tiers, ou un coïndivisaire, qui aurait joui de manière privative d'un bien indivis, peut l'usucaper.

Un partage ne saurait alors lui être imposé. Le bien usucapé est sorti de l'indivision et n'a pas à être rapporté à la masse indivise pour faire l'objet d'un partage. Il résulte en effet de l'article 816 du Code civil que le partage ne peut être demandé s'il y a eu “possession suffisante pour acquérir la prescription”. Cette disposition présente l'avantage pratique de rendre incontestable le droit de chaque héritier lorsqu'un partage a été effectué sans qu'il soit possible d'en apporter la preuve. C'est le cas, en particulier, d'un partage de biens mobiliers, qui peut résulter du seul acte matériel de distribution des meubles entre les copartageants (CA Poitiers, 9 mai 1893).

Pour pouvoir être opposée avec succès aux autres indivisaires, la prescription acquisitive doit toutefois remplir les conditions exigées par la loi. La possession doit notamment être dénuée de toute équivoque (C. civ., art. 2229).

Or, les actes de possession accomplis par un coïndivisaire sont quasi nécessairement équivoques dans la mesure où ils ne révèlent qu'une possession indivise, et non exclusive, qui ne pourrait aboutir qu'à un droit lui-même indivis, et non exclusif.

Les juges du fond doivent donc rechercher si le propriétaire indivis qui invoque à son profit l'usucapion s'est comporté en propriétaire exclusif (Cass. 3e civ., 25 févr. 1998).

Il a ainsi été jugé que la preuve du caractère exclusif de la possession n'était pas rapportée par l'indivisaire qui invoquait l'usucapion alors qu'il avait manifesté à plusieurs reprises son désir de voir procéder au partage et qu'il avait tenté d'acheter la part de certains de ses coïndivisaires (CA Fort-de-France, 3 avr. 1987).

II – LA PROCEDURE DE LIQUIDATION-PARTAGE DE L'INDIVISION SUCCESSORALE

La procédure de liquidation-partage de l'indivision successorale se dénomme la « licitation ».

Lorsqu'il y a lieu à licitation, elle est amiable ou judiciaire selon la nature du partage à l'occasion duquel elle intervient.

Aucune condition particulière n'est requise si la licitation amiable se fait de gré à gré. En revanche, si les parties à un partage amiable choisissent la licitation par adjudication ou si le partage est judiciaire, le tribunal ordonne, dans les conditions qu'il détermine, la vente par adjudication des biens devant être licités ( art. 1377, al. 1er du Code de procédure civile).

La vente est faite, pour les immeubles, selon les règles prévues aux article 1271 à 1281 du Code de procédure civile et, pour les meubles dans les formes prévues aux articles 110 à 114 et 116 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 (art. 1377 al. 2 du Code de procédure civile).

Le domaine du droit au partage de l'indivision successorale s'applique à tous les biens faisant l'objet d'une dévolution successorale au profit de deux ou plusieurs personnes : cohéritiers ab intestat, colégataires universels ou à titre universel et colégataires d'une même chose.

Le tribunal peut reporter le partage pendant 2 ans maximum si sa réalisation risque de porter atteinte à la valeur du bien ou si l’un des indivisaires ne peut s’installer sur une exploitation agricole dépendant de la succession qu’à l’expiration de ce délai.

Le tribunal peut aussi repousser le partage à la demande du conjoint survivant ou des enfants mineurs du défunt pendant 5 ans maximum, renouvelable jusqu'au décès du conjoint survivant ou jusqu’à la majorité du plus jeune enfant pour certains biens (exploitation agricole, local d’habitation ou à usage professionnel, part d’un groupement agricole d’exploitation en commun).

Si un indivisaire ne veut pas demeurer dans l'indivision, le tribunal peut lui attribuer sa part en nature (quand cela est possible) ou en argent versé par les autres indivisaires.

L'article 45 du Code de procédure civile précise que le ressort du tribunal de grande instance territorialement compétent est celui dans le ressort duquel la succession est ouverte.

Or, selon l'article 720 du Code civil une succession s'ouvre au dernier domicile du défunt, c'est-à-dire au lieu où, au moment même de sa mort, il avait son principal établissement.

Lorsqu'une personne meurt chez elle, à l'endroit où elle a toujours vécu, il paraît évident qu'elle n'a jamais eu l'intention de le transférer ailleurs. En revanche, si une personne meurt en un lieu où elle a vécu longtemps après avoir eu un domicile d'origine différent, il sera plus difficile de trancher. 

Dans ce cas, la jurisprudence admet que la succession d'une personne qui meurt en un lieu autre que son domicile s'ouvre à celui-ci, même si elle a résidé assez longtemps au lieu de son décès (Cass. req., 22 juill. 1813 – Cass. req., 11 avr. 1910).

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
Avocat à la Cour
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1 Publié par Visiteur
31/12/2014 22:55

Prescription d'une demande de rapport?

2 Publié par Visiteur
09/06/2016 12:53

MERCI Maitre , MERCI à tous ceux qui tentent d’aider, d’initier, de vulagriser le Droit pour aider tous ceux qui sont sensés connaitre la loi sans avoir fait de longues études en Droit . Vos explications sont precieuses pour les pauvres béotiens qui ne comprennent rien de ce qui lui arrive.
Pourriez vous me dire, si il est vrai que « cette procédure dangereuse et ruineuse doit n’etre lancée qu’en dernier recours ? » c’est vrai ou pas car j’ai lu cela quelque part .
Si, je comprends bien, une personne malhonnête peut fort bien se servir de cette loi ? En effet, imaginons un etre qui s’empare des documents d’une famille, qui se fait calife à la place du calife, du père ou de la mere qui est, soit lui soit elle depuis toujours gestionnaire de cette famille , cherche le moyen d’éviter d’offrir la possibilité à un cohéritier de regarder ce qui l’a fait avec les comptes ? Il lui suffit alors de se servir de cette procédure afin d’eviter que : l’enfant du couple ne puisse pénétrer dans le domicile en ne répondant pas aux courriers y compris recommandés. Il se porte fort selon l’expression consacré, mais sans l’accord du descendant direct qui est en minorité puisqu’ils sont 3 coheritiers dont un seul issu de la famille nucleaire. Il attend tout simplement…il lui suffit juste de persister à ne pas répondre et le tour est joué ? A la fin, il ne reste rien ou justes des dettes sur la succession, qu’importe que l’inventaire des meubles soit faux, personne ne s’en soucis et au final TOUT est bradé aux enchères ? Sans que jamais personne ne demande à cette personne ( qui n’a jamais été nommé par un juge de tutelle, qui s’est juste imposé) de justifier de ce qui l’a fait ? avant l’arrivée d’un tuteur dont le mandat s’achève au dc de la personne protégée et dont il prend le relais ?
Si, c’est ça, faut donner la recette ! c’est là une façon tres adroite de se servir de la loi comme bouclier ?
Par ailleurs, un notaire qui n’est pas le notaire historique de la famille va :
1/ nommé cette personne, autrement dit celui qui se fait rapporteur d’affaire ;alors que je lui dis pourtant qu’il y a des problèmes
2/ ce meme notaire ne va plus vouloir demeurer le notaire de l’enfant issu du couple ? de celui qui se plaint ?
Quels sont les paramètres ou/et les lois si il y en a ? Qui autorisent un notaire à nommer un tel ou un tel ? au détriment de l’autre ? est ce un choix arbitraire ?

3 Publié par Maitre Anthony Bem
09/06/2016 19:32

Bonjour Erine,

Je vous remercie de votre message.

La procédure de liquidation partage judiciaire ne doit être lancée qu’en dernier recours en effet car elle est notamment longue, coûteuse et moins satisfaisante sur le plan financier qu'un accord amiable.

Une personne malhonnête peut tout à fait se prévaloir de la loi.

Pour le reste, afin de me permettre de prendre connaissance de votre situation personnelle en détail et de disposer de toutes les informations nécessaires pour vous répondre en toute connaissance de cause, je vous propose de me contacter en privé pour une consultation.

A cet égard, je vous invite à choisir l'une de mes différentes modalités de consultation en cliquant sur "services" en haut de cette page.

Cordialement.

4 Publié par Landebr
05/09/2016 12:42

Bonjour cher Maître,
Je rejoins les commentaires d'Erine, et vous remercie pour toutes vos informations, claires et précises.
Dans le cas ou le défunt a laissé un testament, les biens sont-ils considérés être dans l'indivision jusqu'au partage, ou sont-ils considérés comme étant la propriété des légataires dès le décès ?
Dans mon cas, le testament est de plus inapplicable car entamant amplement ma réserve héréditaire et celle de ma soeur au profit de ma belle-mère.
Je vous remercie pour votre contribution à ce site.

5 Publié par Maitre Anthony Bem
05/09/2016 21:15

Bonjour Landebr,

Merci pour vos encouragements.

Je vous confirme que même dans le cas où le défunt a laissé un testament, les biens sont considérés être en indivision tant que le partage de la succession n'a pas été réalisé amiablement ou judiciairement entre les héritiers réservataires.

Cependant, j'attire votre attention sur le fait que la règle est théorique.

Cordialement.

6 Publié par Visiteur
14/10/2016 11:44

Merci beaucoup pour cet article très clair.
POur ma part j'ai une question concernant le cas ou un bien est possédé en nu-propriété par 4 indivis avec un usufruitier. Deux des indivis et l'usufruitier sont vendeurs. Les deux derniers ne le sont pas. Si nous devions aller devant le juge, pourrait-on demander une licitation ? Qui doit la demander ? Les nu-propriétaires vendeurs, l'usufruitier, les trois ? Le juge peut-il refuser la licitation du fait de l'usufruit ?

7 Publié par Maitre Anthony Bem
15/10/2016 00:09

Bonjour JH Fleury,

Dans le cas où un bien est possédé en nu-propriété par 4 indivis avec un usufruitier, un seul des indivisaire suffit pour saisir le juge d'une demande de licitation du bien.

Le juge ne peut pas refuser la licitation du bien du fait de l'usufruit si l'usufrutier est d'accord pour la vente du bien.

Cordialement.

8 Publié par Visiteur
15/10/2016 12:48

Un grand merci pour votre réponse, une fois de plus très claire. J'ai consulté d'autres de vos articles et je vous félicite pour ce travail long, régulier et très précis.
Cdt

9 Publié par Maitre Anthony Bem
15/10/2016 13:28

Bonjour JH Fleury,

Merci beaucoup pour vos encouragements.

Ps correction : un seul des indivisaires

Cordialement.

10 Publié par Visiteur
05/11/2016 22:48

Bonjour Maître,
Merci pour votre éclairage sur ces questions de succession. Etant actuellement dans les affres d'une succession (depuis 6 ans), j'ai demandé à sortir de l'indivision pour provoquer le partage à l'amiable, en expliquant dans mon assignation que l'un des indivisaires bloquait le règlement de la succession. Ce dernier s'est fâché, et m'assigne pour demander ma condamnation à des dommages et intérêts, m'accusant d'avoir fait un usage abusif de mon droit et d'avoir voulu lui nuire (Ce qui n'a jamais été mon intention). Que dois-je en penser?
Bien à vous.

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