La 12ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d’Etat de la CEMAC le 06 mai 2015 tenue à Libreville au Gabon a retenu une grande attention dans la sous-région. Elle était attendue depuis deux ans. Ceci est normal. La Conférence des Chefs d’Etat (CCE) est pour la CEMAC le plus haut lieu de prise des décisions dans la Communauté. C’est le premier Organe communautaire, lequel, au sens de l’article 12 du Traité révisé de la CEMAC, « détermine la politique de la Communauté et oriente l’action du Conseil des Ministres de l’UEAC et du Comité Ministériel de l’UMAC. (...) fixe le siège des Institutions, des Organes et des Institutions Spécialisées de la Communauté. (...) nomme et révoque leurs dirigeants conformément aux dispositions prévues par leurs textes constitutifs respectifs ».
La session annuelle, une au moins, et plus s’il le faut, qui réunit les Chefs d’Etats de cette Communauté est l’occasion pour ces derniers de prendre la température du fonctionnement de la CEMAC et d’instruire les responsables des institutions et Organes sur les prochaines orientations des actions intégratives. C’est aussi l’occasion des grandes "nominations", celles des dirigeants des Organes et Institutions communautaires spécialisées. Ainsi, le 06 mai dernier, des "nominations" ont été effectuées et deux Camerounais ont vu leur nom apparaitre dans le communiqué final de la CCE. Il s’agit du :
- Secrétaire Général de la Commission Bancaire de l’Afrique Centrale (COBAC) : Monsieur BOUBAKARY YERIMA HALILOU ;
- Secrétaire Général du Parlement Communautaire : Monsieur Parfait ETONG ABENA.
Il convient de préciser que sur le plan juridique, relativement au vocabulaire de la nomination, seul un acte communautaire ayant force juridique et signé de la Conférence des Chefs d'Etats de la CEMAC peut constituer un acte de nomination, et non le communiqué final sanctionnant une session de cet Organe communautaire. Il s’agit là encore tout au moins d’une désignation, et non d’une nomination. Ainsi sont donc attendus, les différents actes additionnels nommant ces deux Secrétaires, Acte normatif devenu par l’usage l’acte de nomination des grands responsables de la Communauté.
On notera la clameur médiatique qui a salué la seconde "nomination", celle du Secrétaire Général du Parlement Communautaire. Cet accueil est certainement lié au prestige de l’Institution d’affectation. En effet, le Parlement communautaire (PC) est la 3ème Institution communautaire, après l’Union économique et l’Union monétaire de la CEMAC. Il arrive avant les deux Cours, la Cour de justice et le Cour des comptes (Traité révisé). C’est aussi l’Institution la plus jeune de la Communauté, car elle n’a pu réellement exister comme telle qu’en 2010, après une période transitoire. Pendant cette période, une Commission interparlementaire (CIP) a été mise en place, comme l’exigeait l’article 44 de l’Additif au Traité de Ndjamena. Depuis, le Parlement Communautaire fonctionne, et exerce ses activités statutaires, souvent, ce qui est fort regrettable, dans un certain silence, sans communication médiatique, à son siège dans la presqu’île de Malabo, en République de Guinée Equatoriale. Le Parlement Communautaire est régi, en principe, comme les autres Institutions communautaires, par une Convention. Mais, il faut dire, d’entrée de jeu, qu’il est difficile sur le plan juridique, d’indiquer, avec assurance, le texte qui régit le Parlement de la CEMAC.
En effet, sur le plan historique, alors que Traité de la CEMAC avait été signé en 1994 (Traité de N’Djamena), une fois la procédure de ratification par les différents Parlements nationaux achevée, les quatre grandes Institutions communautaires se préparaient au lancement effectif de leurs activités. Dans cette optique, en l’an 2000, les Conventions de ces Institutions avaient été adoptées et ratifiées, à l’exception de la Convention régissant le Parlement de la CEMAC. Elle fut finalement adoptée à Brazzaville le 28 janvier 2004. La CIP avait donc fonctionné, avec comme bases légales, les articles 2 et 4 du Traité de Ndjamena, 25 et 44 de l’additif à ce Traité, à partir de 2004, cette Convention. Bien avant, la CIP s’était dotée d’un règlement intérieur, en date du 21 juin de l’an 2000. Dans un article précédent, publié sur ce
blog, j’indiquais qu’il n’est pas possible de donner une réponse précise à la question des textes portant le droit positif de la CEMAC aujourd’hui, pour fixer sur l’ordre juridique communautaire à cette date. Des réformes institutionnelles, qui sont d’abord des réformes textuelles, ont été déclenchées en 2007 et ne sont toujours pas achevées. Même si diverses mesures de cette réforme sont déjà mise en œuvre (comme transformation du Secrétariat Exécutif de la CEMAC en Commission de la CEMAC, 2007), on notera que les textes fondamentaux révisés, à savoir, le Traité et les cinq Conventions organiques, étaient encore en cours de ratification dans les Parlements Nationaux. Au moins jusqu’en 2012, cette ratification n’était pas effective pour tous les Etats, ce qui avait justifié un appel de la CCE en direction des Etats membres, invités alors à « à accomplir cette formalité dans les meilleurs délais ».
Aucune information n’a été donnée à ce sujet lors de la Session extraordinaire de la CCE de 2013 ni lors de la session ordinaire du 6 mai 2015. Notre cher pays avait accompli son obligation de ratification bien avant, par décret n° 2011-239 en date du 9 août 2011. Il y a donc lieu de croire que la ratification n’est toujours pas achevée, à moins que tout soit finalement remis en question avec les réflexions sur une possible fusion entre la CEEAC et la CEMAC. Si tel est le cas, alors, on est en droit de penser que le Parlement de la CEMAC fonctionne sur la base d'une Convention certes adoptée, mais en cours de ratification. Il dispose également de son Règlement Intérieur. Ainsi, comme la Communauté elle-même, on y recourera, avec en appui le Règlement intérieur du Parlement de la CEMAC, pour renseigner sur cette Institution et plus précisément sur son Secrétaire Général. Au gré de l’actualité créée le 6 mai 2015 dernier avec la nomination d’un compatriote à ce poste, il peut s’avérer opportun d’avoir une connaissance précise de ses fonctions au regard du droit communautaire institutionnel. En attendant ce prochain sujet, nous disons bon vent au nouveau Promu!