La bataille d'Azincourt fut perdue en 1415 parce que la chevalerie française, sur ses lourds destriers, fut fauchée par les flèches des Anglais utilisant des arcs à longue portée.
L'époque actuelle, faite de mouvements, d'innovation, de transversalité se prête finalement également assez peu à la lourdeur institutionnelle pour privilégier modularité et vivacité.
Il n'est plus besoin de rappeler que l'avocat doit communiquer ; s'il faut le rappeler, c'est que c'est déjà trop tard.
La communication aujourd'hui est volatile, se fait au travers des réseaux sociaux qui, eux-mêmes, naissent vivent et puis meurent.
C'est ce qu'avait pressenti le Conseil national des barreaux lorsqu'il avait créé la blogosphère des avocats en 2007, pour que chaque avocat, y compris perdu dans sa petite ville de province, puisse s'adresser à chacun, partout, via Internet.
C'était une belle idée qui a rencontré un certain succès et qui, probablement, aurait pu être remaniée pour augmenter encore le référencement et l'impact des blogs.
Mais, déjà, suivant les mots-clés qui sont utilisés, le justiciable qui cherche au hasard des flux, peut trouver sur un blog d’avocat une réponse et c'est une bonne chose pour la profession.
Le Conseil national des barreaux a décidé de fermer cette blogosphère, sous un prétexte un peu fallacieux.
À la manière des gouvernances actuelles natives de l’édredon : sans consulter ceux qui l’utilisaient sans rien dire ; tel un boa silencieux.
Il prétendra que c'est la faute de l'hébergeur en mauvaise santé financière, mais je crois que ce sont des salades, sauce mauvaise vinaigrette.
Parallèlement, en effet, le Conseil national des barreaux essaie de développer vox-avocats où il se trouve une rubrique croupion blog sans fonctionnalités.
C'est là encore une bonne idée dans le principe, mais conçue pour les notaires.
Quelque chose qui ne part du besoin de chaque avocat, qui est décidé, là-haut et dont on pressent l’insuccès à venir.
C'est en effet un intranet, une liaison entre les avocats, ce qui existe déjà, par exemple sur Facebook, en plus actuel.
L'ergonomie est triste et pour tout dire paraît bien dépassée, comme les fonctionnalités.
Bien sûr, on vous dira que demain ; vous connaissez la chanson e-barreau.
Même moi, qui ait atteint un âge auquel certains sont déjà à la retraite, (mais je ne dirai pas du mal de la fonction publique), je sais déjà que mon nom figurera sur les listings comme inscrit, mais sans activité.
Et l'on peut déjà se poser la question suivante : pourquoi toujours, comme la chevalerie d'Azincourt, vouloir créer des outils dépassés lors même de leur naissance (et je ne parle pas du boîtier Navista) plutôt que d'utiliser mieux ce qui existe, qui est en harmonie avec les comportements professionnels actuels, mais qui nécessite de se rapprocher des utilisateurs pour améliorer, toujours l’outil et en faire la caisse de résonance de la communication de la profession ? Pourquoi toujours vouloir marcher, avec forte gloriole, vers un échec annoncé ?
S'il y a bien en effet une constante aujourd'hui, quand nous rencontrons une difficulté informatique, c'est qu'il faut aller s'enquérir de la solution auprès des plus jeunes.
C'est le monde à l'envers me direz-vous ; oui, mais c'est notre monde.
Puisque la profession d'avocat est en guerre économique, est-il nécessaire de rappeler que la guerre aujourd'hui est guerre de mouvements, voire guerre urbaine, voire encore guérilla.
Peut-être le Conseil national des barreaux imagine-t-il comme au XVIIIe siècle une armée d'avocats s'en allant au combat ; Messieurs les Anglais, tirez les premiers ?
Mais en termes économiques, et d'ailleurs cela vaut de manière générale, il est plus sain de s'appuyer sur le petit et le mobile que de créer des tours de Babel, fussent-elles informatiques.
Enfin, si vous voulez passer une joyeuse soirée sur le réseau social des avocats ; allez sur vox-avocats !
C’est pour lui que meurt la blogosphère.
Le justiciable ne dira pas merci au Conseil national des bureaux ; pardon, barreaux.
Jean de Valon