Il convient de s’intéresser à un arrêt rendu par la Cour d'Appel d'Aix en Provence en septembre 2018 qui vient aborder la problématique spécifique du sort de la caution lorsque le débiteur principal est décédé.
Par acte sous seing privé en date du 29 juin 2011, Monsieur C s’était porté caution de Madame P dans le cadre d’un contrat de location qui lui avait été consenti le 1er juin 2011 par Monsieur D propriétaire.
Madame T avait été défaillante dans un premier temps puis est malheureusement décédée.
C’est dans ces circonstances que par jugement en date du 30 décembre 2013, Monsieur C avait été condamné solidairement avec Madame P à payer au bailleur les sommes de :
Ø 2 520 euros à titre d’arriéré de loyer
Ø 6 236,72 euros à titre de réparation locative
Ø 128 euros au titre de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères
Ø 780 euros à titre de dommages et intérêts outre 600 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile
Or le jugement faisait bien état que Madame P, débiteur principal, était décédée en décembre 2012.
Le bailleur s’est donc retourné contre la caution sans se préoccuper du sort des éventuels héritiers du débiteur principal,
La caution a fait face à ses engagements et s’est retrouvée à désintéresser complètement le bailleur.
S’est alors posée la question de se retourner contre les parents du débiteur principal afin que ces derniers supportent les obligations de leur fille.
Monsieur C a fait assigner les parents du débiteur principal devant le Tribunal d'Instance et par jugement en date du 15 décembre 2016, ils ont été condamnés solidairement à payer à Monsieur C l’ensemble des sommes réglées.
Les parents du débiteur principal ont frappé d’appel la décision et ont sollicité la réformation du jugement déféré en demandant à la Cour d'Appel de déclarer inopposable le 1er jugement du 30 décembre 2013 au motif que Madame P était décédée en cours de procédure sans que ces derniers ne soient assignés en intervention forcée.
Ils considéraient que dans la mesure où Monsieur C, ancien compagnon de Madame P avait été parfaitement informé du décès de cette dernière, il aurait dû en informer la juridiction et son bailleur.
Il est assez spécieux qu’ils viennent reprocher à la caution de ne pas avoir informé le tribunal et le bailleur du triste sort du débiteur principal, afin de les faire appeler en cause en qualité d’héritiers.
Pour autant cette argumentation ne saurait prospérer.
Sur le terrain factuel, Monsieur C avait quitté Madame P bien avant son décès et celle-ci occupait seule le bien.
Elle était donc bel et bien le débiteur principal,
Il est particulièrement curieux de constater que les parents du débiteur principal considéraient que n’ayant pas été assignés en intervention forcée lors de la première procédure, le jugement ne pouvait qu’être déclaré inopposable à leur encontre et donc Monsieur C ne pouvait les poursuivre.
Pour autant la Cour d'Appel ne s’y trompe pas,
Elle considère que c’est à bon droit, au visa de l’article 2309 du Code Civil, que le premier juge a rappelé que la caution qui a fait l’objet d’un jugement de condamnation pour la somme totale de 9 990 euros est fondée à se retourner contre le débiteur principal en l’espèce ses héritiers et que ces derniers ne sont pas fondés à solliciter l’inopposabilité du jugement du 30 décembre 2013.
Ainsi le jugement déféré est confirmé en toutes ses dispositions.
Cet arrêt est intéressant car il explique bien lorsque le débiteur principal est décédé, la caution a le droit de se retourner contre ses héritiers.
Article rédigé par Maître Laurent LATAPIE,
Avocat, Docteur en Droit,