Il convient de s’intéresser à un arrêt qui a été rendu par la Cour d’Appel de Bourges dans le cadre d’une installation de panneaux photovoltaïques, sujet passionnant qui fait encore immanquablement couler beaucoup d’encre.
Dans cet arrêt, Monsieur X avait acquis à crédit un système solaire photovoltaïque moyennant une somme non-négligeable de 20 000,00 €, comprenant la pose de 12 panneaux de 250 Watts, avec la réalisation des démarches administratives et le raccordement de l’installation au réseau E.D.F.
Pour autant, le maire de la commune a frappé d’opposition la déclaration préalable et c’est dans ces circonstances que l’acquéreur a saisi le tribunal d’instance dans la mesure ou l’installation était inachevée alors que pour autant le financement avait été octroyé, les fonds libérés et les premières échéances prélevées,
Cette jurisprudence est intéressante sur non pas deux mais trois questions principales.
Premièrement, la question est de savoir quel est le droit applicable ; sommes-nous sur terrain du droit de la consommation ou bien encore en droit commercial ?
Autrement dit, la question est de savoir si un particulier, qui installe un certain nombre de panneaux photovoltaïques et qui a vocation à revendre sa production à E.D.F. peut-il se voir octroyer la qualité de commerçant ?
Dans pareil cas, ce dernier serait-il condamné à ne plus pouvoir utiliser à son profit les dispositions protectrices du Code de la consommation ?
Deuxièmement, la question est de savoir si l’absence de raccordement au réseau E.R.D.F. est justement une cause de résolution du contrat ?
Enfin, et surtout, troisièmement, il importe de s’interroger sur le sort du prêt bancaire qui va de pair car, bien souvent, ce genre d’installations fait l’objet d’un financement adéquat.
Cet arrêt est intéressant puisqu’il considère, au visa de l’article L 110-1, premier, du Code du commerce, suivant lequel la loi répute acte de commerce tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre, que le contrat relatif à la pose de panneaux photovoltaïques, accompagné de la réalisation des démarches administratives auprès de E.R.D.F., a vocation à générer une production d’électricité, laquelle était intégralement revendue à E.D.F. pendant une durée de 20 ans.
A bien y comprendre, tout laisse à penser que le particulier en question avait vocation à vendre l’intégralité de sa production électrique sans pouvoir en disposer lui même, ce qui lui ferait perdre la qualité de consommateur,
Dès lors, la Cour d’Appel considère qu’il résulte de cette revente totale, que le contrat liant l’acquéreur et le vendeur installateur revêt une nature commerciale, de telle sorte que le contrat ne peut être examiné à l’aune des dispositions du Code de la consommation.
Il serait alors de même concernant le contrat de financement de l’opération qui revêt également une lecture commerciale par accessoire.
Pour autant, le particulier n’est pas démuni,
En effet, même dans m’hypothèse ou le droit de la consommation serait inapplicable au cas d’espèce, il n’en demeure pas moins que Monsieur X demeure bien fondé à bénéficier des dispositions du Droit des contrat pour caractériser les manquements de l’entreprise de pose de panneaux photovoltaïques,
Même si, dans ce cas d’espèce comme dans bon nombre de cas, ladite société de pose de panneaux photovoltaïques a entretemps fait, comme d’un rien, l’objet d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire.
Dans la mesure ou l’entreprise de pose n’a pas raccordé l’installation au réseau ERDF, Monsieur X serait bien fondé à engager une action aux fins de résolution ou de résiliation du contrat et d’en tirer toutes les conséquences à l’encontre de l’établissement bancaire qui a financé l’opération.
Dans cette affaire, selon le bon de commande en date du 8 juin 2013, Monsieur J avait commandé auprès d’une société EUROFRANCE SOLAIRE, l’installation d’un système solaire photovoltaïque moyennant un prix de 20 000,00 €.
Afin de financer ces travaux, il avait accepté le 12 juin suivant de la banque SOFINCO, une offre préalable de crédit affectée d’un montant en capital de 20 000,00 € au taux annuel de 7,55% remboursable en 120 échéances (sic).
Le 14 août 2013, le maire de la commune a pris une décision administrative s’opposant à la déclaration préalable des travaux présentés par Monsieur J, compte-tenu de l’importante visibilité des panneaux sur la toiture.
Le 27 novembre 2013, Monsieur J mettait la société de pose de panneaux photovoltaïques en demeure de venir démonter les panneaux photovoltaïques installés à son domicile.
Faute de réponse, ce dernier a, par acte en date des 20 et 21 février 2014, assigné cette société, représentée par son liquidateur, ainsi que la société de financement, devant le tribunal d’instance aux fins d’annulation du contrat principal et du contrat de crédit affecté.
Pour autant, Monsieur J, se voyait débouté par le tribunal d’instance le 27 mai 2015, amenant ce dernier à frapper d’appel la décision en litige.
Dans le contentieux engagé devant la Cour, immanquablement la société de financement devient le principal adversaire pour la simple et bonne raison que dans ce même laps de temps procédural la société de pose de panneaux photovoltaïques étant en liquidation judiciaire, celle-ci se désintéresse immanquablement du problème.
La créance, éventuellement déclarée au passif, ne faisant que s’ajouter à la longue liste des créanciers chirographaires qui ne sont malheureusement jamais désintéressés dans le cadre de la procédure.
La Cour d’Appel retient qu’il est constant que, selon le bon de commande en date du 21 juin 2013, Monsieur J a passé commande auprès de la société EUROFRANCE SOLAIRE pour la pose de 12 panneaux photovoltaïques de panneaux de 250 Watts, bénéficiant de garantie de 25 ans et comprenant la réalisation des démarches administratives à E.R.D.F.
Ce contrat faisait notamment suite à un courrier du 14 mai précédent, dans lequel la société en question confirmait qu’elle se chargeait des démarches administratives auprès de la mairie, étant rappelé que le projet portait sur l’installation d’un système photovoltaïque pour la revente d’électricité à E.R.D.F. pendant 20 ans,
Il ressort par ailleurs du même contrat que la production d’électricité générée par l’installation en question serait intégralement revendue à E.D.F. pendant 20 ans, de telle sorte qu’il apparait des circonstances de la cause que l’installation litigieuse ne pouvait permettre à Monsieur J de bénéficier à titre personnel d’une partie de l’électricité produite.
Dès lors, c’est au visa de l’article L 110-1 du Code de la Consommation que la Cour considère que le contrat liant Monsieur J à la société revêt une nature commerciale et que sa validité ne peut donc être examinée à l’aune des dispositions du Code de la consommation, en étant de même concernant le contrat de financement de l’opération qui revêt une nature commerciale par accessoire.
C’est sur ce fondement que la Cour d’Appel rejette la demande d’annulation du contrat souscrit par Monsieur J, en raison du non-respect des dispositions du Code de la consommation.
Pour autant, Monsieur J n’est pas démuni juridiquement ni contre l’entreprise de pose de panneaux photovoltaïque ni contre l’établissement de crédit qui a financé l’opération,
En effet, subsidiairement aux dispositions du Code de la consommation, Monsieur J a également soutenu une demande subsidiaire de résolution du contrat, en application des articles 1184 alinéa 2 du Code civil, désormais dans son ancienne rédaction, puisque la Cour rappelle, sur la base d’un attendu de principe, qu’en application de ce texte, la partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix, ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution, avec dommages et intérêts.
La Cour considère que le contrat conclu entre Monsieur J et la société de pose de panneaux photovoltaïques comportait l’obligation pour cette dernière de procéder, non seulement à l’installation de panneaux photovoltaïques, mais, également, de réaliser toutes les démarches administratives nécessités par le projet, ainsi que le raccordement au réseau E.D.F.
Cette conclusion juridique s’impose sur la base d’un certain nombre d’éléments factuels et probatoires évoqués par Monsieur J, notamment des échanges de mails ou de formulaires spécifiques à cette fin.
S’il est constant que même si les panneaux photovoltaïques ont été installés sur la toiture de l’habitation de Monsieur J, il n’en demeure pas moins que l’autorisation administrative de la mairie a été refusée le 20 août 2013, selon les termes suivants « considérant le projet de panneaux photovoltaïques implantés sur la toiture côté rue, considérant que le projet est très visible du domaine public serait de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinant »,
En l’état de ce refus administratif il s’ensuit que les panneaux litigieux n’ont jamais pu être raccordés au réseau E.R.D.F afin de permettre l’activité de production d’électricité envisagée et qu’ils doivent au contraire être retirés à la demande de la mairie.
Il convient donc dès lors de considérer dans ces conditions que la société de pose de panneaux photovoltaïques n’a pas réalisé la prestation à laquelle elle s’était contractuellement engagée, ce qui justifie largement la réalisation du contrat passé avec Monsieur J, en application de l’article 1184 du Code civil.
Dans la mesure où le contrat principal est annulé, il n’est que juste que le contrat de financement souscrit auprès de la société de financement, accessoire au contrat principal, soit également résolu.
Ainsi, cet arrêt est extrêmement intéressant car il vient sanctionner le prestataire de service qui, s’il a posé les panneaux photovoltaïques, avait également l’obligation de procéder aux démarches administratives, notamment la déclaration préalable auprès des services d’urbanisme de la commune et d’assurer le raccordement E.R.D.F.,
L’entreprise de pose n’ayant pas achevé ses diligences, la résolution du contrat s’impose,
Par voie de conséquence, la pose de panneaux ne s’entend pas seulement de la seule pose matérielle des panneaux photovoltaïques puisque l’obligation principale de pose s’accompagne également d’un certain nombre d’obligations accessoires, de prestations de service, s’entendant comme les démarches administratives permettant la parfaite réalisation du projet et le parfait raccordement auprès d’E.D.F., avec l’autorisation des services urbanistiques de la commune.
Il y a donc effectivement matière procéder à la résolution judiciaire du contrat, sinon, au visa des dispositions du Code de la consommation, à tout le moins au visa des dispositions du Code civil régissant le droit général des contrats.
Par effet « domino », cela a également pour effet, de prononcer la résolution judiciaire du contrat de financement, ce qui peut amener l’établissement bancaire à mettre fin naturellement au prélèvement, à rembourser l’ensemble des échéances qui auraient pu courir depuis le démarrage du crédit.
Pour autant, cela n’enlève rien au fait que l’établissement bancaire peut aussi engager sa responsabilité pour avoir commis quelques manquements à ses propres obligations,
En effet, la Haute Juridiction retient qu’il appartenait à la société de financement de s’assurer, préalablement au déblocage des fonds entre les mains de l’installateur, que la livraison était bien réalisée,
A bien y comprendre, par livraison réalisée il convenait pour l’établissement bancaire de s’assurer que toutes les autorisations administratives requises pour l’installation financée avaient été obtenues,
Or, en se dispensant de cette vérification, la société de financement a une faute qui doit la priver de la possibilité de réclamer à Monsieur J le remboursement des sommes que l’établissement a directement versé à la société de pose de panneaux photovoltaïques qui a entretemps fait l’objet d’une liquidation judiciaire.
Les conséquences pour l’établissement de crédit sont multiplies, tout comme les sanctions d’ailleurs,
En effet, la Cour de cassation considère qu’en raison de la résolution du contrat de crédit, la société de financement est alors condamnée à rembourser à Monsieur J, les mensualités et intérêts prélevés sur son compte au titre de ce contrat, à mettre un terme à tout prélèvement sur ce compte, outre pour cette dernière de procéder aux démarches nécessaires aux fins de l’obtention de la mainlevée de l’inscription de Monsieur J au fichier des incidents de paiement de la banque de France, ce qui semble n’être qu’un juste retour des choses.
Par voie de conséquence, si le particulier qui installe les panneaux photovoltaïques afin de procéder à une revente totale auprès d’E.D.F. perd le droit d’évoquer les dispositions du Code de la consommation, il n’en demeure pas moins que ce dernier, par les dispositions découlant du droit général des contrats, est en mesure d’obtenir la résolution du contrat.
En effet, si l’obligation principale consiste bien en la pose de panneaux, il convient également de prendre en considération les obligations accessoires de raccordement auprès d’E.D.F, et de procéder aux déclarations urbanistiques de rigueur,
Enfin, l’établissement bancaire engage également sa responsabilité propre et se retrouve tenue à, sinon un devoir de curiosité, à tout le moins à une véritable obligation de vérification de l’accomplissement de l’ensemble des obligations principales et accessoires par l’entreprise de pose de panneaux qui sollicite la libération des fonds au motif pris de la livraison de l’installation,