Il convient de s’intéresser à la régularité du commandement de payer valant saisie.
En effet, au terme de l’article 4 du décret du 27 juillet 2006, la procédure d’exécution est engagée par la signification du commandement de payer valant saisie, prévue à l’article 13.
Il est donc extrêmement clair que la procédure d’exécution en matière de saisie immobilière est engagée par la signification du commandement. Ainsi, la saisie immobilière est un acte d’exécution forcée et par là même, il interrompt le délai de prescription de forclusion.
Ce commandement de payer valant saisie est délivré à la requête du créancier poursuivant au débiteur, à moins que le bien soit entre les mains d’un tiers détenteur et que le créancier ne fasse valoir un droit de suite, auquel cas il y aura alors délivrance de deux commandements : un commandement de payer au débiteur principal, puis un commandement de payer valant saisie au tiers débiteur.
Un certain nombre d’obligations s’impose au créancier, lorsqu’il procède à la délivrance du commandement de payer valant saisie au débiteur.
En premier lieu, il doit signifier le titre exécutoire.
En effet, la jurisprudence, dans un arrêt, (cf. Cour de Cassation, Deuxième Chambre Civile du 4 décembre 2003), précise que « lorsque le titre servant de fondement aux poursuites de saisie immobilière ne consiste pas dans une obligation notariée, il doit être signifiée en même temps que le commandement de saisie, s’il ne l’a pas été antérieurement ».
En deuxième lieu, le destinataire du commandement est naturellement le débiteur, mais il convient de distinguer deux hypothèses.
Tout d’abord, dans le cas où un immeuble appartenant en propre à l’un des époux constitue la résidence de la famille, le commandement est dénoncé à son conjoint, au plus tard le premier jour ouvrable suivant la signification de l’acte.
Cette information apparaît en effet nécessaire pour permettre au conjoint de prendre toute disposition de nature à protéger le logement familial.
Ainsi, il pourra par exemple acquitter la dette sur ses propres deniers ou solliciter l’autorisation du juge compétent aux fins de prendre des décisions rendues nécessaires par la saisie, en application des articles 217, 219 et 1426 du Code Civil.
A ce titre, il convient de s’intéresser à l’apport d’un des arrêts qui a été rendu le 30 avril 2009, (cf. Cour de Cassation, Deuxième Chambre Civile, 30/04/2009 N°08-12.105), qui a précisé que le poursuivant n’a pas dénoncé le commandement de payer valant saisie au concubin du débiteur.
En effet, la question se posait, du fait de l’article 13, alinéa 3, du décret du 27 juillet 2006, qui dispose que lorsque l’immeuble est en propre de l’un des époux, le commandement doit être dénoncé au conjoint au plus tard le premier jour ouvrable suivant la signification de l’acte.
Ce délai étant, depuis le décret du 12 février 2010, prévu à peine de caducité du commandement.
Il est alors question de savoir si, par conjoint, il convenait d’entendre le terme conjoint dans une acception générique, comme concernant tout compagnon entretenant des relations stables et durables avec le débiteur et logeant avec lui dans son immeuble, ou s’il ne s’agissait que de la définition juridique, liée au mariage, du conjoint. La Cour de Cassation n’a pas souhaité procéder à une extension en adoptant le sens générique du mot conjoint et a opté pour une interprétation stricte du vocable conjoint, en ne le retenant que pour toutes les personnes unies par les liens sacrés du mariage.
Par ailleurs, si l’immeuble est commun aux deux époux, aux termes de l’article 2895 du Code Civil, la saisie des immeubles communs est poursuivie contre les deux époux.
Ainsi, premier acte d’exécution forcée de la procédure depuis la réforme 2006, ce commandement de payer valant saisie, doit tout d’abord être délivré, non pas par un clerc assermenté, mais bel et bien par un huissier de justice, puisque c’est ce qui est prévu par les textes.
Toutefois, si la question sur le plan juridique ne se discute pas, l’appréciation concrète peut donner lieu à contentieux.
En effet, il n’est pas rare, lorsque le commandement de payer est signifié, que celui-ci soit délivré d’un document de procès-verbal de remise, et que par la suite, dans un deuxième temps, ce document, ainsi que le procès-verbal de remise est remis au débiteur principal et à son conjoint.
Il n’est pas rare qu’ensuite, soit remis au créancier ladite signification, ainsi qu’un acte attestant de la signification par huissier, lequel est signé, non pas sur place, lorsque la signification est faite entre les mains du débiteur, mais bel et bien un peu après, dans l’étude de l’huissier de justice.
Une difficulté peut exister entre la signature de celui qui a rempli et remis le commandement de payer et celui qui a rempli le procès-verbal de remise, le document attestant de la saisie, remis au créancier par l’huissier, qui est classiquement signé par ce dernier en son étude peu de temps après les diligences.
Toutefois, sur le terrain pratique, il est bien évident que cela peut donner lieu à contentieux et à discussion, puisque s’il est bien évident que l’huissier de justice est seul compétent pour procéder à la signification du commandement de payer, et non pas son clerc assermenté, il n’est pas rare qu’en pratique, dans certains cas de figure, celle-ci soit effectuée par le clerc.
Ainsi, dans une affaire où le saisi soutenait que le commandement de payer valant saisie immobilière était entaché d’une irrégularité de fond, dès lors qu’il mentionnait « que cet acte avait été remis par huissier de justice ou par clerc assermenté dans les conditions ci-après indiquées » et que la signature de l’huissier de justice ne figurait que sous la mention « visa de l’huissier de justice des mentions relatives à la signification ».
Ainsi, le saisi s’est naturellement intéressé aux conditions de signification du document et pour le saisi, il ne s’agissait là qu’un de simple visa par l’huissier de justice des mentions faites sur l’original de l’acte, lequel avait été délivré par le clerc assermenté, conformément aux termes de l’article 7, alinéa 2 de la Loi du 27 décembre 1923. De telle sorte que l’acte aurait été signifié de manière irrégulière et par là même le commandement de payer valant saisie serait parfaitement irrégulier.
Pour citer un arrêt, qui a été rendu par la Deuxième Chambre Civile de la Cour de Cassation, qui a été rendu le 14 octobre 2010 sous le numéro 09-69 580.
Dans cette affaire, il y avait matière à confusion entre le procès-verbal de remise, qui visait expressément que cela était remis par huissier de justice ou par clerc assermenté et l’acte de signification, remis au créancier par l’huissier de justice et signé de sa main. En effet, dans cette affaire, une banque avait délivré, le 15 octobre 2008, à une S.C.I. un commandement de payer valant saisie. La S.C.I. avait alors saisi le juge de l’exécution, désormais le juge de l’orientation, avant l’audience d’orientation, d’un incident, en invoquant la nullité du commandement pour avoir été délivré par un clerc assermenté.
En effet, il est bien évident que l’acte de signification du commandement valant saisie, signé par l’huissier de justice, ne saurait suffire et qu’il convient de vérifier que c’est bel et bien lui qui a personnellement délivré l’acte.
Ainsi, dans cet arrêt, il ressort clairement qu’en l’état de l’attestation qui a été faite par l’huissier de justice, qui précisait clairement que c’est lui effectivement qui avait personnellement délivré l’acte, la Cour de Cassation a suivi les juges du fonds pour avoir débouté le saisi de sa contestation, retenant que l’acte de signification du commandement valant saisie était signé par l’huissier de justice en dessous de son nom et que celui-ci confirmait dans une attestation sur l’honneur, dont le juge avait souverainement apprécié la force probante, avoir personnellement délivré l’acte.
Par voie de conséquence, cette procédure de saisie immobilière trouve sa première expression dans le premier acte d’exécution forcée, lequel est le commandement de payer valant saisie.
Dès le premier acte, il convient naturellement de ne pas attendre l’audience d’orientation pour soulever un certain nombre de contestations et dès les premiers actes de la procédure diligentée par le créancier, il n’est pas vain, bien au contraire, de procéder aux vérifications d’usage concernant l’ensemble des documents, étant précisé que la validité du commandement de payer doit être vérifiée.
Dès lors qu’un élément laisse à penser que celui-ci n’est pas régulier, il y a lieu de le contester car dans pareil cas, dans la mesure où le commandement de payer est irrégulier, la procédure est nulle dans son intégralité.