Conditions de validité et nullité d'un commandement de payer d'huissier valant saisie immobilière

Publié le Modifié le 22/06/2017 Vu 242 904 fois 288
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Quelles sont les conditions de validité et de nullité du commandement de payer valant saisie immobilière dressé par un huissier de justice aux fins de recouvrement d'une créance ?

Quelles sont les conditions de validité et de nullité du commandement de payer valant saisie immobilière dr

Conditions de validité et nullité d'un commandement de payer d'huissier valant saisie immobilière

Lorsqu'une personne est redevable d'une autre, cette dernière – le créancier – peut mettre en œuvre des mesures d'exécution forcée, afin de récupérer ce qui lui est dû – sa créance.

Le créancier disposant d’un titre exécutoire a la possibilité de faire vendre le bien immobilier de son débiteur aux enchères publiques, à la barre du tribunal.

S’il s’agit d’une méthode de recouvrement tragique pour les débiteurs, puisqu'elle permet la vente de leur résidence principale, c’est aussi l’une des plus efficaces pour les créanciers tels les établissements bancaires qui y ont systématiquement recours pour obtenir le remboursement de prêts immobiliers dont les échéances ne seraient plus honorées.

Toutefois, cette procédure est strictement encadrée par la loi.

En premier lieu, la validité de la procédure de saisie immobilière est conditionnée à celle du commandement de payer valant saisie immobilière.

En effet, avant toute procédure de saisie immobilière, le créancier doit obligatoirement faire signifier à son débiteur un commandement de payer valant saisie immobilière par voie d'huissier.

Or, le commandement de payer valant saisie immobilière peut comporter des vices, erreurs, anomalies ou oublis susceptibles d'entraîner l'annulation de la procédure de saisie.

Ainsi, dès lors qu’un élément laisse à penser que le commandement de payer valant saisie immobilière n’est pas régulier, il y a lieu de le contester devant le juge car, le cas échéant, dans la mesure où le commandement est irrégulier, la procédure est nulle dans son intégralité.

À cet égard, il convient de souligner que le caractère technique de la matière nécessite d'avoir recours aux services d'un avocat spécialisé dans les voies d'exécution et les saisies immobilières.

Nous envisagerons donc successivement ci-après une liste non exhaustive des principaux vices susceptibles d'affecter un commandement de payer valant saisie immobilière :

- nécessité de respecter le formalisme légal obligatoire :

Conformément à l'article 648 du code de procédure civile, tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs :

1. Sa date ;

2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement.

3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice ;

4. Si l'acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social.

En outre, l'article R 321-3 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que le commandement doit préciser à peine de nullité :

1° La constitution d'avocat du créancier poursuivant, laquelle emporte élection de domicile ;

2° L'indication de la date et de la nature du titre exécutoire en vertu duquel le commandement est délivré ;

3° Le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts moratoires ;

4° L'avertissement que le débiteur doit payer ces sommes dans un délai de huit jours, qu'à défaut de paiement, la procédure à fin de vente de l'immeuble se poursuivra et qu'à cet effet, le débiteur sera assigné à comparaître à une audience du juge de l'exécution pour voir statuer sur les modalités de la procédure ;

5° La désignation de chacun des biens ou droits sur lesquels porte la saisie immobilière, telle qu'exigée par les règles de la publicité foncière ;

6° L'indication que le commandement vaut saisie de l'immeuble et que le bien est indisponible à l'égard du débiteur à compter de la signification de l'acte et à l'égard des tiers à compter de la publication de celui-ci au fichier immobilier ;

7° L'indication que le commandement vaut saisie des fruits et que le débiteur en est séquestre ;

8° L'indication que le débiteur garde la possibilité de rechercher un acquéreur de l'immeuble saisi pour procéder à sa vente amiable ou de donner mandat à cet effet et la mention que cette vente ne pourra néanmoins être conclue qu'après autorisation du juge de l'exécution ;

9° La sommation, lorsque le bien fait l'objet d'un bail, d'avoir à indiquer à l'huissier de justice les nom, prénom et adresse du preneur ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social ;

10° L'indication qu'un huissier de justice pourra pénétrer dans les lieux afin de dresser un procès-verbal de description de l'immeuble ;

11° L'indication du juge de l'exécution territorialement compétent pour connaître de la procédure de saisie et des contestations et demandes incidentes y afférentes ;

12° L'indication que le débiteur qui en fait préalablement la demande peut bénéficier, pour la procédure de saisie, de l'aide juridictionnelle s'il remplit les conditions de ressources prévues par la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de cette loi ;

13° L'indication, si le débiteur est une personne physique, que s'il s'estime en situation de surendettement, il a la faculté de saisir la commission de surendettement des particuliers instituée par l'article L. 331-1 du code de la consommation.

Sur ce dernier point, la commission dispose d'un délai de trois mois à compter du dépôt du dossier pour examiner la recevabilité de la demande en vérifiant que le demandeur se trouve dans une situation de surendettement.

La décision déclarant la recevabilité de la demande entraîne notamment la suspension et l'interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur.

Cette suspension et cette interdiction ne peuvent excéder deux ans.

Toutefois, lorsqu'en cas de saisie immobilière la vente forcée a été ordonnée, le report de la date d'adjudication ne peut résulter que d'une décision du juge chargé de la saisie immobilière, saisi à cette fin par la commission, pour causes graves et dûment justifiées.

Cette suspension et cette interdiction emportent interdiction pour le débiteur de faire tout acte qui aggraverait son insolvabilité, de payer, en tout ou partie, une créance autre qu'alimentaire.

- nécessité de signification préalable d'un titre exécutoire (jugement ou acte de notaire) :

Selon la jurisprudence, « lorsque le titre servant de fondement aux poursuites de saisie immobilière ne consiste pas dans une obligation notariée, il doit être signifiée en même temps que le commandement de saisie, s’il ne l’a pas été antérieurement » (Cass. Civ. II, 4 décembre 2003).

Lorsque la représentation est obligatoire, le jugement doit en outre être préalablement notifié aux représentants dans la forme des notifications entre avocats, faute de quoi la notification à la partie est nulle.

Mention de l'accomplissement de cette formalité doit être portée dans l'acte de notification destiné à la partie.

De plus, l'acte de notification d'un jugement à une partie ou d'un acte notarié doit indiquer de manière très apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé.

Enfin, l'acte de notification d'un jugement ou
 d'un acte notarié doit indiquer que l'auteur d'un recours abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile et au paiement d'une indemnité à l'autre partie.

- nécessité de signification du commandement de payer valant saisie immobilière au conjoint :

Au cas où un bien immobilier appartient en propre à l’un des époux et constitue la résidence de la famille, le commandement de payer valant saisie immobilière doit être dénoncé au conjoint, au plus tard le premier jour ouvrable suivant la signification de l’acte, en application de l'article R321-1 alinéa 3 du Code des procédures civiles d'exécution.

Cette information est en effet nécessaire afin de permettre au conjoint de prendre toute disposition de nature à protéger le logement familial tel que s'acquitter du montant de la dette sur ses propres deniers ou solliciter l’autorisation du juge pour prendre des décisions rendues nécessaires par la saisie, conformément aux articles 217, 219 et 1426 du Code civil.

En effet, selon l'article 217 du Code civil :

« Un époux peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si celui-ci est hors d'état de manifester sa volonté ou si son refus n'est pas justifié par l'intérêt de la famille.

L'acte passé dans les conditions fixées par l'autorisation de justice est opposable à l'époux dont le concours ou le consentement a fait défaut, sans qu'il en résulte à sa charge aucune obligation personnelle ».

 

Par ailleurs, si l’immeuble est commun aux deux époux, le commandement de payer valant saisie immobilière doit être signifié aux deux époux.

- nécessité de signification du commandement de payer valant saisie immobilière par un huissier de justice et non par un clerc assermenté :

Une difficulté peut exister entre la signature de celui qui a rempli et remis le commandement de payer et celui qui a rempli le procès-verbal de remise.

Or, l’huissier de justice est seul compétent pour procéder à la signification du commandement de payer, et non pas son clerc assermenté.

Cependant, la signification du commandement de payer valant saisie immobilière est souvent effectuée par le clerc.

Le commandement de payer valant saisie immobilière est entaché d’une irrégularité s’il mentionne par exemple « que cet acte avait été remis par huissier de justice ou par clerc assermenté dans les conditions ci-après indiquées » et que la signature de l’huissier de justice ne figurait que sous la mention « visa de l’huissier de justice des mentions relatives à la signification ».

De même, il peut y avoir confusion entre le procès-verbal de remise, qui visait expressément la remise par huissier de justice ou par clerc assermenté et l’acte de signification remis par l’huissier de justice et signé de sa main.  (Cass. Civ. II, 14 octobre 2010, numéro 09-69 580).

Ainsi, l’acte de signification du commandement valant saisie, signé par l’huissier de justice, ne saurait en tant que tel suffire et il est toujours nécessaire de vérifier que c’est bel et bien ce dernier qui a personnellement délivré l’acte.

- Nécessité de vérification de la publication du commandement  dans les 2 mois de sa notification :

Enfin, par précaution, il est recommandé de vérifier que le commandement a bien été publié dans les 2 mois de sa délivrance au bureau des hypothèques compétent.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
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1 Publié par Maitre Anthony Bem
17/08/2015 18:57

Bonjour Guigui,

En effet, vous pourriez faire annuler ce commandement de payer pour vice de forme.

Il n'y a pas de modèle.

Le recours à un avocat est nécessaire bien que non obligatoire.

Peu d'huissier de justice pourrait valablement faire ce type de recours car cela n'est pas de leur compétence.

Le montant en jeu risque d'être inférieur au coût de l'avocat.

Cordialement.

2 Publié par Visiteur
20/08/2015 10:17

Maître,

Quel est le délai qui doit être respecté entre un commandement de payer valant saisie immobilière et sa dénonciation au gérant de la société débitrice?


Cordialement,

3 Publié par Visiteur
03/09/2015 23:30

Bonjour , j'ai reçu un commandement de payer des loyers d'habitation .Ma question est dois je payer également l'article 8 ainsi que le coût de l'acte . Financièrement , c'est déjà assez difficile . Merci

4 Publié par Soso0505
12/09/2015 18:16

Bonjour Maître,

Je lis tous vos articles et ce dans tous les domaines car ils sont précis, clairs a la portée du plus grand nombre et en plus je trouve un côté dynamique dans vos articles et je vous en remercie.
J'ai une question cet article est il toujours d'actualité en septembre 2015, car il me semble qu'un arrêt de la cour de cassation ne fait plus perde son caractère exécutoire a un acte notarié dépourvu a la fois des procurations en annexe et / ou de l'absence de mention au rang des minutes desdites procurations. Il semble si bien sur j'ai bien lu et compris l'arrêt, que dorénavant les irrégularités lies au formalisme ne sont plus retenues donc en faveur des créanciers. Avec mes excuses pour avoir répondu sur votre article sur le commandement a payer et non sur l'acte notarié valant titre exécutoire. Dans l'attente de vous lire, merci pour vos articles passes et avenir en ce qui me concerne surtout a venir parce que les autres je les ai tous lus et plusieurs fois.
Sonia

5 Publié par Maitre Anthony Bem
12/09/2015 19:08

Bonjour Soso0505,

A priori, cet article est toujours d'actualité car j'ignore de quel arrêt vous faites état.

Merci de me communiquer les références de l'arrêt de la cour de cassation afin que je puisse le cas échéant actualiser mon propos.

Enfin, je vous remercie de votre fidélité.

Cordialement.

6 Publié par Soso0505
13/09/2015 16:48

Bonjour Maître,

Merci d'avoir répondu rapidement.
J'ai trouvé l'arrêt dont j'ai oublié de vous mentionner les références, il s'agit de l'arrêt de la Cour de cassation, chambre civile 1, Audience publique du 15 janvier 2015, N° de pourvoi: 13-12479. Il sera intéressant d'avoir votre retour, et cela me permettra de savoir s'il y a eu un changement de position de la cour de cassation. Enfin, j'espère sincèrement n'avoir pas compris l'arrêt et que donc votre article est toujours d'actualité et ce dans l'intérêt des débiteurs, à contrario cela aura pour conséquences de rajouter le fossé qu'il existe entre débiteur et créancier tout en favorisant le créancier. Merci d'avance Maître pour vos éclaircissements.
Je m'excuse de ne pas avoir mis de formule de politesse en fin de mon précédent commentaire.
Bien cordialement,
Sonia

7 Publié par Visiteur
13/09/2015 23:38

Bonjour Maître, j'ai également reçu une injonction pour saisie mobilière j'aimerai savoir s'il on peut tout simplement trouver un arrangement a l'amiable comme un règlement en plusieurs fois ou s'il fallait tout payer d'un coup ? Étant donné que j'ai envie d'éviter cette saisie et que je souhaite régler cette dette.

Cordialement.

8 Publié par Maitre Anthony Bem
14/09/2015 09:38

Bonjour Soso0505,

Je vous confirme que mon article sur les vices en matière de saisie immobilière est toujours d'actualité car l'arrêt de la Cour de cassation du 15 janvier 2015 que vous citez ne concerne que la question de l'annexion des procurations pour la signature des actes notariés.

En effet, aux termes de cette décision, la cour de cassation a jugé que l'inobservation des règles de formes prescrites pour l'annexion des procurations ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique et donc exécutoire.

Le fossé entre les droits des créanciers poursuivants et ceux des débiteurs saisis ne s'est donc pas creusé avec cet arrêt.

Cordialement.

9 Publié par Maitre Anthony Bem
14/09/2015 09:40

Bonjour Bettychou,

Vous pouvez parfaitement proposer et négocier avec votre créancier ou l'huissier de justice en charge du recouvrement un accord amiable afin de vous permettre de régler votre dette en plusieurs échéances mensuelles et éviter une mesure de saisie.

Cordialement.

10 Publié par Soso0505
14/09/2015 15:22

Bonjour Maître,

Merci pour vos éclaircissements. Donc il a bien eu un changement par rapport a votre article cite ci dessous :
"L'acte notarié dépourvu des procurations en annexes est dénué de force exécutoire". Article juridique publié le 09/07/2012 à 23:21.

En résumé, depuis cette dernière jurisprudence de 2015, il reste uniquement la mention d'inscription au rang des minutes, mention obligatoirement indiquéee dans le corps de l'acte notarié.
Un obstacle de moins aux créanciers poursuivants....
Bien cordialement,
Sonia

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