La transmission de son patrimoine de son vivant est possible.
Elle peut être faite soit par le biais d'une donation dite simple ou soit par une donation-partage.
La donation simple est le contrat aux termes duquel le donateur cède, de son vivant, un bien au profit d'une personne de son choix : le donataire.
La donation simple se distingue de la donation-partage en ce que cette dernière suppose que le donateur répartisse ses biens de son vivant entre ses héritiers descendants ou successibles et au profit de tiers à sa succession.
La donation partage peut porter sur la transmission d'une entreprise, de parts ou d'actions de société dans laquelle le bénéficiaire disposerait de fonctions de direction.
Ainsi, la donation-partage donne lieu à la constitution de lots égaux ou inégaux pour avantager l'un des bénéficiaires mais à condition de ne pas entamer la part des réservataires.
On parle alors d'allotissement.
Par ailleurs, il convient de souligner qu’il existe deux types de donation-partage différents :
- la donation-partage cumulative ;
- la donation-partage conjonctive.
La donation-partage cumulative est celle consentie par l’un des parents sur ses biens personnels alors que la donation-partage conjonctive est celle par laquelle des père et mère confondent leurs biens respectifs en une masse unique pour en faire ensemble le partage entre leurs enfants.
Dans le cadre de la donation-partage, le partage est définitif lorsqu’il est validé et accepté par les bénéficiaires et ne peut donc être remis en cause lors du décès du donateur.
En effet, les héritiers ou les bénéficiaires d’une donation-partage ne sont jamais tenus de rapporter leurs lots et les biens reçus dans la masse successorale à partager entre les ayants-droit.
A cet égard, la Cour de cassation a jugé que :
« Les biens qui ont fait l'objet d'une donation-partage ne sont pas soumis au rapport qui n'est qu'une opération préliminaire au partage en ce qu'il tend à constituer la masse partageable ». (Cass. Civ. I, 16 juillet 1997, pourvoi n° 95-13.316)
Ainsi, après décès du donateur, seuls les biens non inclus dans la donation partage sont concernés par les opérations de partage de la succession.
Toutefois, il est recommandé d’équilibrer la valeur des donations consenties aux héritiers afin d’éviter que des contestations éventuelles naissent entre eux à cet égard après le décès du donateur.
En effet, si, après avoir clôturé le partage, on s'aperçoit d'une inégalité dans les attributions, les héritiers ont la possibilité de soulever des contestations.
Le cas échéant, la contestation d’une donation-partage peut se faire soit par le biais de :
- une action en comblement de partage (1)
- une action en réduction de la donation-partage (2)
- une action en nullité de la donation-partage (3)
1. L’action en comblement de partage :
L’action en comblement du partage est ouverte dés lors que l’héritier lésé a reçu 25 % de moins que son dû.
La lésion peut provenir soit d’une erreur dans l’établissement de l’actif partageable, soit d’une mauvaise évaluation de certains biens. (Cass. Civ. I, 18 décembre 1990)
A cet égard, l’article 889 du code civil dispose que :
« Lorsque l'un des copartageants établit avoir subi une lésion de plus du quart, le complément de sa part lui est fourni, au choix du défendeur, soit en numéraire, soit en nature. Pour apprécier s'il y a eu lésion, on estime les objets suivant leur valeur à l'époque du partage.
L'action en complément de part se prescrit par deux ans à compter du partage ».
Ainsi, par exemple, si un héritier qui reçoit un bien ne valant que 180.000 euros, alors qu’il aurait dû recevoir l’équivalent de 250.000 euros. Il peut donc demander que ses cohéritiers complètent sa part.
Pour vérifier l’existence de la lésion, les juges du fond ne sont pas tenus de vérifier par voie d’expertise l’existence de la lésion. (Cass. Civ. I, 19 octobre 1960)
La lésion s’apprécie à la date du partage et non à compter du décès du donateur ou du dernier survivant des donateurs en cas de donation-partage conjontive.
2. L’action en réduction de la donation-partage:
L’action en réduction suppose qu’il ne reste plus rien à partager au décès du donateur.
Elle peut être ouverte dans deux cas, à savoir, lorsque :
- l’un des héritiers n'a pas participé à l'acte de donation partage ;
- l’évaluation du bien immobilier donné dans l'acte est fausse ou erronée.
Pour mémoire, l’article 1078 du code civil dispose que :
« Nonobstant les règles applicables aux donations entre vifs, les biens donnés seront, sauf convention contraire, évalués au jour de la donation-partage pour l'imputation et le calcul de la réserve, à condition que tous les héritiers réservataires vivants ou représentés au décès de l'ascendant aient reçu un lot dans le partage anticipé et l'aient expressément accepté, et qu'il n'ait pas été prévu de réserve d'usufruit portant sur une somme d'argent ».
L’action en réduction de la donation-partage permettra, par exemple, de demander à ses cohéritiers mieux gratifiés dans l'acte de partage, de reverser à l'héritier lésé soit une partie des biens qu’ils ont reçus soit une soulte, c’est-à-dire une somme d’argent destinée à équilibrer les lots et compenser les disparités.
La contestation ne pourra être faite qu’au décès du donateur.
Toutefois, si la donation-partage a été "conjonctive" c'est à dire consentie aux enfants par les deux parents, aucune contestation ne pourra être formulée avant le décès du dernier parent (article 1077-2, alinéa 2 du code civil).
En effet, il faut attendre que les deux parents soient décédés pour que les héritiers puissent exercer leurs droits réservataires dans l'une et l'autre des successions.
L'action en réduction se prescrit par cinq ans à compter de l’ouverture de la succession ou dans un délai de deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu connaissance de l’atteinte portée à leurs réserves.
Le délai de l’action ne doit jamais excéder dix ans à compter du décès du donateur.
Pour ce faire, les biens compris dans une donation partage sont fictivement réunis, pour le calcul de la quotité disponible et de la réserve, pour leur valeur au décès du donateur.
Cette exception suppose que les trois conditions suivantes soient remplies :
- tous les héritiers réservataires, vivants ou représentés au décès, du donateur aient été allotis dans le partage anticipé ;
- ils aient expressément accepté la donation-partage ;
- il n’ait pas été prévu de réserve d’usufruit dans l’acte.
Par ailleurs, la Cour de cassation a jugé que :
« en cas de demande en réduction d'une donation-partage conjonctive, tous les biens compris dans le partage anticipé doivent, pour le calcul de la réserve et de la quotité disponible, être évalués à la date du décès du survivant des donateurs » (Cass. Civ. I, 16 juin 2011, pourvoi n° 10-17.499)
Concrètement, il ressort de cet arrêt que :
- lorsque tous les héritiers réservataires ne participent pas à la donation partage, l’estimation de la valeur des biens transmis est faite au moment du décès et dans le cadre de l’action en réduction de la donation-partage.
- lorsque tous les héritiers ont participé à une donation-partage qui remplit les conditions de l’article 1078 du code civil précité, la valeur des biens transmis sera évaluée à la date de la donation dans le cadre de l’action en réduction de la donation-partage (sauf si une clause de l’acte de donation le prévoit différemment).
3. L’action en nullité de la donation-partage
La donation-partage peut être annulée en raison de :
- un vice de forme ;
- une incapacité de l'une des parties ;
- un vice du consentement pour cause de dol (manœuvre frauduleuse ayant pour objet de tromper l'une des parties en vue d'obtenir son consentement), de violence (fait de nature à inspirer une crainte telle que la victime donne son consentement) ou d'erreur (appréciation inexacte d'un élément de l'acte).
La donation-partage peut également être annulée si l'un des cohéritiers a été oublié lors de l'opération.
Toutefois, le partage peut être maintenu si l'héritier consent à recevoir sa part, en nature ou en valeur, et qu'il renonce à faire une demande d'annulation.
Par ailleurs, la Cour de cassation considère que la nullité d'une donation partage ne peut être qu'une nullité relative, c’est à dire susceptible d’une action pendant cinq ans et seulement de la part de personnes y ayant personnellement un intérêt.
En effet, il a été jugé que « c'est à bon droit que la cour d'appel énonce que l'inclusion d'un bien propre à l'un des héritiers dans la masse à partager est de nature à entraîner la nullité d'un acte de partage pour absence de cause. Une telle nullité est une nullité relative de sorte que cette action intentée plus de cinq ans après la conclusion de l'acte, est irrecevable comme prescrite ». (Cass. Civ. I, 29 septembre 2004, pourvoi n° 03-10.766)
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Anthony Bem
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