Pour mémoire, le ‘’Système de Traitement des Infractions Constatées’’ (STIC) est un fichier qui répertorie des informations sur les personnes ayant fait ou faisant l’objet d’une procédure d’enquête ou d’instruction.
Ce fichier recense à la fois les personnes mises en cause dans ces procédures et les victimes des infractions.
Le STIC facilite ainsi la constatation des infractions à la loi pénale, le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs et permet l'exploitation des données à des fins de recherches statistiques.
Au départ, le STIC était donc conçu comme un moyen permettant d’identifier les auteurs d’infractions pénales, grâce à des recoupements avec des affaires précédentes et d’établir des statistiques fiables d’analyse de l’activité de police.
Mais avec la loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, le STIC s’est vu doter d’une deuxième fonction.
En effet, depuis l’entrée en vigueur de cette loi, le STIC peut être consulté dans le cadre des enquêtes administratives devant précéder le recrutement, l’agrément ou l’habilitation des personnels de professions très diverses.
Il en est ainsi des personnes souhaitant travailler dans les zones aéroportuaires, des agents de police municipale, des gardes champêtres, des préfets, des magistrats, des personnels de surveillance et de gardiennage, ou encore des ambassadeurs.
Ainsi, aux termes d’un rapport présenté en 2009, la CNIL estimait que « la consultation du STIC à des fins d’enquête administrative est susceptible de concerner aujourd’hui plus d’un million d’emplois. » (Rapport de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) : Conclusions du contrôle du système de traitement des infractions constatées "STIC", 2009)
A titre d’exemple, cette consultation du STIC est effectuée préalablement à la délivrance d’un badge aux salariés des entreprises exerçant leur activité dans les zones de sûreté à accès réglementé des aérodromes.
En effet, l’article R.213-3-3 du code de l’aviation civile subordonne l’accès de ces employés en zone de sûreté à accès réglementé d'un aérodrome à la possession d’un titre de circulation délivré par le préfet exerçant des pouvoirs de police sur l'aérodrome lorsque l'entreprise ou l'organisme concerné est situé sur l'emprise de celui-ci.
La délivrance de cette habilitation est précédée d’une enquête administrative donnant lieu notamment à la consultation du fichier STIC de la personne devant être habilitée, dans le but de vérifier que le comportement de cette dernière n’est pas incompatible avec l’exercice des fonctions ou des missions envisagées.
Cette consultation du fichier STIC avant la délivrance d’un badge d’accès en zone aéroportuaire est principalement dictée par les impératifs de sécurité des zones sensibles que constituent les aéroports.
Cependant, la consultation du fichier STIC peut emporter de lourdes conséquences pour les salariés effectuant une première demande ou un renouvellement de badge d'accès à une zone aéroportuaire : suspension de contrat de travail, perte d’emplois, refus d’embauche, etc…
Or, il arrive que les données enregistrées dans le fichier STIC ne soient pas mises à jour ou soient erronées.
Dès lors, la loi prévoit des garanties pour les personnes enregistrées dans le fichier STIC, notamment pour celles qui travaillent pour des entreprises exerçant leur activité dans les zones de sûreté à accès réglementé des aérodromes.
Ainsi, si une enquête administrative peut donner lieu à la consultation du fichier STIC, la loi précise que l'accès à l'information est limité à la seule connaissance de l'enregistrement de l'identité de la personne concernée dans le traitement en tant que mis en cause.
En outre, la consultation du fichier STIC doit être faite par des agents de la police et de la gendarmerie nationales ou par des personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités.
De ce fait, en l’absence d’une habilitation spéciale pour la consultation du fichier STIC, toute décision fondée sur cette consultation sera annulée.
C’est ce qui résulte d’un arrêt du 10 décembre 2013 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a donné gain de cause à un agent de sécurité qui avait demandé la délivrance d’une carte professionnelle, en jugeant que ce dernier était fondé à soutenir qu’en l’absence d’habilitation spéciale « le préfet du Var a eu accès irrégulièrement aux données du fichier STIC le concernant et ne pouvait dès lors se fonder sur ces informations pour prendre sa décision ».
Par voie de conséquence, la cour administrative de Marseille a annulé la décision du préfet du Var qui a refusé de délivrer une carte professionnelle à l’agent de sécurité en se fondant sur la consultation du fichier STIC de ce dernier sans justifier d’une habilitation spéciale. (Cour administrative d’appel de Marseille, 7ème chambre, 10 décembre 2013)
Une autre garantie prévue par la loi au profit des personnes susceptibles de faire l’objet d’une enquête administrative donnant lieu à la consultation du fichier STIC est que le préfet sollicité pour la délivrance ou le renouvellement d’un badge d’accès ou d’une carte professionnelle ne saurait fonder sa décision de refus exclusivement sur la consultation du fichier STIC.
C’est ainsi qu’aux termes d’un jugement du 14 juin 2006, le Tribunal administratif de Marseille a annulé une décision prise par l'autorité préfectorale de refus d'agrément d'une personne pour exercer une activité de sécurité au motif que :
« L’administration s’est bornée à la seule consultation du STIC, lequel ne présente pas au demeurant le caractère de fiabilité nécessaire des données sans procéder à un examen plus approfondi de [la situation personnelle du requérant] … ; que le préfet doit ainsi être regardé comme s’étant basé exclusivement sur le STIC ; qu’il a ainsi commis une erreur de droit ». (Tribunal administratif de Marseille, 14 juin 2006, n°0500162)
Il résulte de ce jugement que dans le cadre d’une enquête administrative diligentée à l’occasion d’une demande d’habilitation, d’agrément, et de recrutement, l’administration ne peut pas prendre sa décision en se fondant uniquement sur le fichier STIC.
En effet, avant de se prononcer, l’administration doit non seulement apprécier l’importance à accorder au fichier STIC en fonction de la nature, de l’ancienneté et de la gravité des faits, mais aussi obtenir des informations complémentaires sur la personne devant être habilitée.
Pour conclure, il convient donc de retenir que si l’administration peut consulter le fichier STIC d’une personne avant toute prise de décision de recrutement, de délivrance d’un agrément ou d’une habilitation pour l’exercice de certaines professions, cette consultation doit se faire dans le respect de certaines conditions.
En cas de non respect de ces conditions, il est possible, avec l’assistance d’un avocat spécialisé, d’obtenir l’annulation d’une décision administrative de rejet d’habilitation, d’agrément ou de refus de renouvellement prise sur le fondement du fichier STIC.
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Anthony Bem
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