Le principe de l’"exception d’inexécution" des obligations contractuelles comme moyen de défense

Publié le 24/08/2015 Vu 111 364 fois 18
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Quand le principe de l’"exception d’inexécution" permet-il au débiteur d'échapper à l'exécution de ses obligations contractuelles ?

Quand le principe de l’"exception d’inexécution" permet-il au débiteur d'échapper à l'exécution de se

Le principe de l’

Selon l’article 1134 du Code civil : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

Les contrats ont donc force de loi pour les parties : les obligations nées d’un contrat s’imposent avec la même force que si elles étaient édictées par une loi.

Lors de l’exécution d’un contrat, les parties sont liées entre elles par des obligations contractuelles interdépendantes et réciproques entre elles.

Le contrat est alors appelé synallagmatique.

Concrètement, dans le cadre d’un contrat engageant deux cocontractants, chacune des deux parties est redevable d’une prestation envers l’autre partie et, à ce titre, l’exécution d’une obligation contractuelle de l’une ne vaut que si l’autre exécute sa propre obligation et ce de manière réciproque.

A titre d'exemples : un vendeur peut refuser de livrer la chose tant que l’acheteur n’a pas payé le prix, un client peut refuser de payer son vendeur s'il n'a pas été livré dans le délai convenu.

Par conséquent, si l’une des parties n’exécute pas une de ses obligations essentielles, le principe de l'exception d’inexécution peut être invoqué par l’autre partie comme moyen de pression et de défense, en vue de s'exonérer de l'exécution de ses propres obligations contractuelles ou à contraindre l'autre partie cocontractante à exécuter son obligation.

On ne peut refuser d‘exécuter une obligation pour manquement à une obligation accessoire.

En pratique, le principe de l'exception d'inexécution consiste en une sorte de système de réciprocité du respect des obligations contractuelles par les parties au contrat et permet d'assurer le respect du principe général de bonne foi dans les contrats synallagmatiques.

La mise en œuvre de l'exception d'inexécution n'est subordonnée à aucune demande en justice, ni à l'envoi d'une mise en demeure préalable au débiteur de l'obligation contractuelle inexécutée.

Cette règle déroge ainsi au principe selon lequel nul ne peut se faire justice à lui-même.

Il représente donc une voie de justice privée laissée à l’entière discrétion de celui qui l’invoque, sans décision préalable des juges.

Celui qui invoque le principe de l'exception d'inexécution se dénomme : l'exipiens.

Ce principe se distingue d'autres moyens juridiques similaires tels que la résolution du contrat ou encore le droit de rétention, qui permettent d'aboutir à des effets similaires.

D’ailleurs, à la différence des autres moyens de défense précités, le principe de l’exception d’inexécution n’est explicité en tant que tel dans aucun texte de loi bien qu'il soit reconnu pour certains types de contrats tels que :

- le contrat de vente, dont l'article 1612 du code civil dispose que "le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose, si l'acheteur n'en paye pas le prix, et que le vendeur ne lui ait pas accordé un délai pour le paiement".

- le contrat en matière d’échanges, dont l'article 1704 du code civil dispose que " Si l'un des copermutants a déjà reçu la chose à lui donnée en échange, et qu'il prouve ensuite que l'autre contractant n'est pas propriétaire de cette chose, il ne peut pas être forcé à livrer celle qu'il a promise en contre-échange, mais seulement à rendre celle qu'il a reçue".

- le dépôt salarié ;

- le contrat d’assurance.

La jurisprudence a étendu le principe de l’exception d’inexécution à tous les contrats synallagmatiques de sorte qu'il est devenu un moyen de défense efficace et spécial.

Toutefois, l‘exception d'inexécution ("exceptio non adempleti contractus") est subordonnée à un certain nombre de conditions.

En effet, afin de pouvoir s'appliquer l’exception d’inexécution suppose l'existence d'obligations contractuelles :

- inexécutées ;

- interdépendantes et réciproques (donnant-donnant). Il peut arriver que des obligations nées de contrats différents entre les mêmes parties soient tout de même interdépendantes, par la volonté des parties ou par disposition de la loi ;

- à exécution simultanée, c'est à dire sans délai d'exécution.

Le cas échant, la preuve de l’exception d’inexécution incombe à la partie qui l'invoque.

L’exception d’inexécution entraine la suspension de l'exécution de l'obligation contractuelle, sauf si l’inexécution a été partielle ou bien que l’inexécution est imputable en réalité à la partie qui l'invoque.

Pour conclure, si l'un des contractants n'exécute pas son obligation, l'autre contractant peut user de l'exception d'inexécution pour :

- faire pression sur son cocontractant afin de le contraindre à s'exécuter ;

- suspendre la réalisation de ses propres obligations contractuelles. Le contrat reprendra son cours normal quand la partie défaillante exécutera son obligation ;

- demander la résolution judiciaire du contrat, c'est à dire l'anéantissement rétroactif du contrat et la remise en l’état des parties, comme si le contrat n’avait jamais existé ;

- le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice (qui suppose en principe alors l'envoi d'une mise en demeure préalable) ;

- obtenir, si possible, l'exécution forcée des obligations contractuelles inexécutées.

Toutefois, les juges se réservent le droit d'apprécier souverainement l’importance et la gravité de l’inexécution contractuelle et d’exercer un contrôle des faits au cas par cas (Cour d'Appel de Paris, 28 janvier 2015, RG n°10/15692).

Enfin, pour mémoire, une partie contractante ne peut jamais être sanctionnée en cas de force majeure, c'est à dire en cas d'impossibilité d'exécution de ses obligations du fait d'un événement imprévisible, irrésistible et extérieur.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
Avocat à la Cour
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1 Publié par Visiteur
08/09/2016 15:47

Bonjour,
ma question est:
si jamais cette exception d'inexécution n'est pas mentionnée dans le contrat (dans mon cas c'est un contrat de vente), est-il toujours possible de suspendre l'objet à délivrer?

2 Publié par Maitre Anthony Bem
08/09/2016 22:43

Bonjour Alx,

L'exception d'inexécution n'a pas à être mentionnée dans le contrat.

Il toujours possible de suspendre la livraison d'un objet à défaut de paiement.

Cordialement.

3 Publié par Visiteur
13/09/2016 08:15

Merci de votre réponse

4 Publié par Visiteur
13/09/2016 08:18

mon autre question est:

donc, même s'il y a un délai global de paiement, et qu'il y a un intérêt moratoire en cas de non-paiement, la suspension de la livraison est toujours possible?

Merci

5 Publié par Visiteur
31/12/2016 09:25

Bonjour maître,

J'ai une question à vous poser.

Avant tou que je suis il m'est nécessaire de vous signifier que je suis handicapé (RQTH), pour troubles de l'attention, mémoire, et fatigues.

J'ai été contacté hier par une filiale de la française des jeux (supergagnant, 11 rue Tronchet Paris 75008)qui m'a demandé mon numéro de carte bancaire, pour participer à l'euromillion, argumentant que j'avais été choisi pour recevoir plusieurs dizaines coupons "gagnants". Au moment de la conversation, il n'a été nullement le fait qu'il y aurait un abonnement renouvelable.
Il était tard , j'étais très fatigué, et j'ai donné mon numéro de carte machinalement.

J'ai fais le tour des avis concernant ce jeu, qui passe majoritairement pour une arnaque.

J'ai donc contacté la société par mail pour signifier mon refus de participer à ce jeu aux motifs que:

-Mon interlocutrice ne m'avait jamais parlé d'un engagement quelconque concernant ce jeu.
-Aucun documents (validation d'enregistrement, contrat commercial de toute sorte), m'ait été envoyé.

J'ai donc appelé le service afin de leur signifier mon mécontentement, et les menace de les poursuivre en justice, pour plusieurs motifs:

-obligation contractuelle sans contrat, et sans consentement écrit.
-abus de faiblesse.
-Vice de formes (l'information concernant mon abonnement n'a jamais été citée, ou clairement exprimée)

Enfin je souhaite vous proposer une question:

La française des jeux peut-elle m'obliger à payer les 3 mois sus mentionnés, bien qu'il n' aient jamais été cités?
Y a t'il un moyen de les obliger à supprimer mon profil, en plus du droit commercial, et des libertés informatiques?

Je mélange très certainement les choses, mais je crois que certains de mes arguments restent pertinents.

A l'heure où je vous parle,je vais recontacter e service que j'ai eu au téléphone hier, d'ici une dizaine de minutes.


Au plaisir d'avoir une réponse de votre part.

Cordialement,

Un visiteur

6 Publié par Maitre Anthony Bem
31/12/2016 11:14

Bonjour Clement,

Il s'agit en effet d'une arnaque.

Vous pouvez en effet obtenir la suppression de vos données à caractère personnel auprès de cette société.

À défaut, je suis sûr que la CNIL se fera un plaisir de vous aider à obtenir la suppression de vos coordonnées de leur fichier client.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
18/01/2017 19:22

Bonjour Maître,

Tout d'abord, merci pour toutes les informations que vous fournissez, elles permettent d'éclairer les articles de lois souvent "opaques" pour le citoyen "lambda".

Voici ma situation : Ma voisine occupant le logement en dessous de celui dont je suis locataire est victime d'un dégât des eaux par le plafond de puis 5 mois. Après plusieurs visites de plombiers infructueuses dans son appartement et le mien pour localiser l'origine de la fuite, j'ai été obligé de couper l'eau chez moi afin de ne pas inondé en permanence ma voisine.
Cela fait donc 5 mois que je paye un loyer que je ne peux occuper car dans l'impossibilité d'utilisé de l'eau. Je vis donc à ailleurs et paie donc ce loyer pour rien.

Un plombier mandaté par l'assurance de la copropriété a finalement localisé la fuite et a pu réparé. Je vais donc pouvoir regagné les locaux dans quelques semaines une fois les travaux d’embellissement terminés.

Ma question est la suivante : Puis-je demandé un remboursement des loyers ou un dédommagement pour les 5 mois d'impossibilité de vivre dans le logement sachant que c'est moi qui est coupé l'eau ?

En vous remerciant par avance de l'attention que vous porterez à ma situation, je vous prie de recevoir mes salutations les plus respectueuses.

Un visiteur

8 Publié par Maitre Anthony Bem
18/01/2017 23:03

Bonjour Yohan,

Afin de me permettre de prendre connaissance de votre situation personnelle en détail et de disposer de toutes les informations nécessaires pour vous répondre, je vous propose de me contacter en privé pour une consultation.

A cet égard, je vous invite à choisir l'une de mes différentes modalités de consultation en cliquant sur "services" en haut de cette page.

Cordialement.

9 Publié par Visiteur
07/04/2017 11:43

La question est de savoir si un bailleur refusé de rendre la caution est-ce que le locataire peut légalement refuser de payer le dernier moi ? Sachant que la société immobilière n'est qu'une mandataire et que la propriétaire n'est plus à son adresse...

10 Publié par Visiteur
08/04/2017 16:50

Bonjour Maître,
ma question est la suivante quels sont les changements qu'enjoindre les articles 1219 et 1220 du code civil (modifié par l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016)?

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