Le principe de l’"exception d’inexécution" des obligations contractuelles comme moyen de défense

Publié le 24/08/2015 Vu 111 419 fois 18
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Quand le principe de l’"exception d’inexécution" permet-il au débiteur d'échapper à l'exécution de ses obligations contractuelles ?

Quand le principe de l’"exception d’inexécution" permet-il au débiteur d'échapper à l'exécution de se

Le principe de l’

Selon l’article 1134 du Code civil : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

Les contrats ont donc force de loi pour les parties : les obligations nées d’un contrat s’imposent avec la même force que si elles étaient édictées par une loi.

Lors de l’exécution d’un contrat, les parties sont liées entre elles par des obligations contractuelles interdépendantes et réciproques entre elles.

Le contrat est alors appelé synallagmatique.

Concrètement, dans le cadre d’un contrat engageant deux cocontractants, chacune des deux parties est redevable d’une prestation envers l’autre partie et, à ce titre, l’exécution d’une obligation contractuelle de l’une ne vaut que si l’autre exécute sa propre obligation et ce de manière réciproque.

A titre d'exemples : un vendeur peut refuser de livrer la chose tant que l’acheteur n’a pas payé le prix, un client peut refuser de payer son vendeur s'il n'a pas été livré dans le délai convenu.

Par conséquent, si l’une des parties n’exécute pas une de ses obligations essentielles, le principe de l'exception d’inexécution peut être invoqué par l’autre partie comme moyen de pression et de défense, en vue de s'exonérer de l'exécution de ses propres obligations contractuelles ou à contraindre l'autre partie cocontractante à exécuter son obligation.

On ne peut refuser d‘exécuter une obligation pour manquement à une obligation accessoire.

En pratique, le principe de l'exception d'inexécution consiste en une sorte de système de réciprocité du respect des obligations contractuelles par les parties au contrat et permet d'assurer le respect du principe général de bonne foi dans les contrats synallagmatiques.

La mise en œuvre de l'exception d'inexécution n'est subordonnée à aucune demande en justice, ni à l'envoi d'une mise en demeure préalable au débiteur de l'obligation contractuelle inexécutée.

Cette règle déroge ainsi au principe selon lequel nul ne peut se faire justice à lui-même.

Il représente donc une voie de justice privée laissée à l’entière discrétion de celui qui l’invoque, sans décision préalable des juges.

Celui qui invoque le principe de l'exception d'inexécution se dénomme : l'exipiens.

Ce principe se distingue d'autres moyens juridiques similaires tels que la résolution du contrat ou encore le droit de rétention, qui permettent d'aboutir à des effets similaires.

D’ailleurs, à la différence des autres moyens de défense précités, le principe de l’exception d’inexécution n’est explicité en tant que tel dans aucun texte de loi bien qu'il soit reconnu pour certains types de contrats tels que :

- le contrat de vente, dont l'article 1612 du code civil dispose que "le vendeur n'est pas tenu de délivrer la chose, si l'acheteur n'en paye pas le prix, et que le vendeur ne lui ait pas accordé un délai pour le paiement".

- le contrat en matière d’échanges, dont l'article 1704 du code civil dispose que " Si l'un des copermutants a déjà reçu la chose à lui donnée en échange, et qu'il prouve ensuite que l'autre contractant n'est pas propriétaire de cette chose, il ne peut pas être forcé à livrer celle qu'il a promise en contre-échange, mais seulement à rendre celle qu'il a reçue".

- le dépôt salarié ;

- le contrat d’assurance.

La jurisprudence a étendu le principe de l’exception d’inexécution à tous les contrats synallagmatiques de sorte qu'il est devenu un moyen de défense efficace et spécial.

Toutefois, l‘exception d'inexécution ("exceptio non adempleti contractus") est subordonnée à un certain nombre de conditions.

En effet, afin de pouvoir s'appliquer l’exception d’inexécution suppose l'existence d'obligations contractuelles :

- inexécutées ;

- interdépendantes et réciproques (donnant-donnant). Il peut arriver que des obligations nées de contrats différents entre les mêmes parties soient tout de même interdépendantes, par la volonté des parties ou par disposition de la loi ;

- à exécution simultanée, c'est à dire sans délai d'exécution.

Le cas échant, la preuve de l’exception d’inexécution incombe à la partie qui l'invoque.

L’exception d’inexécution entraine la suspension de l'exécution de l'obligation contractuelle, sauf si l’inexécution a été partielle ou bien que l’inexécution est imputable en réalité à la partie qui l'invoque.

Pour conclure, si l'un des contractants n'exécute pas son obligation, l'autre contractant peut user de l'exception d'inexécution pour :

- faire pression sur son cocontractant afin de le contraindre à s'exécuter ;

- suspendre la réalisation de ses propres obligations contractuelles. Le contrat reprendra son cours normal quand la partie défaillante exécutera son obligation ;

- demander la résolution judiciaire du contrat, c'est à dire l'anéantissement rétroactif du contrat et la remise en l’état des parties, comme si le contrat n’avait jamais existé ;

- le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice (qui suppose en principe alors l'envoi d'une mise en demeure préalable) ;

- obtenir, si possible, l'exécution forcée des obligations contractuelles inexécutées.

Toutefois, les juges se réservent le droit d'apprécier souverainement l’importance et la gravité de l’inexécution contractuelle et d’exercer un contrôle des faits au cas par cas (Cour d'Appel de Paris, 28 janvier 2015, RG n°10/15692).

Enfin, pour mémoire, une partie contractante ne peut jamais être sanctionnée en cas de force majeure, c'est à dire en cas d'impossibilité d'exécution de ses obligations du fait d'un événement imprévisible, irrésistible et extérieur.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
Avocat à la Cour
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1 Publié par Visiteur
12/05/2017 00:18

Bonjour Maître, Dans un contrat de travaux , l exécutant posé unilatéralement un matériel de chauffage non acte dans le devis. Au niveau des quantités de matériaux nécessaires, le chiffre à été multiplie par 5.
Alors exception d inexecution possible? Merci bien

2 Publié par Visiteur
31/05/2017 14:11

Bonjour,

Ma question concerne mon logement.

En effet, depuis des mois je subis une fuite de mon plafond de la cuisine. Le propriétaire a été relancé à plusieurs reprises mais aucune action concrète n'a été faite, si ce n'est envoyer des plombier (2 fois) constater la fuite pour finalement dire qu'ils ne peuvent rien faire.

J'ai envoyé un recommandé avec accusé de réception les mettant en demeure de mettre en place les actions nécessaires.

Au préalable, j'avais pris l'initiative d'aller voir chez le voisin du dessus, mais nous n'avons pas repéré la fuite.

Lorsque j'appelle l'office HLM, ils me demandent de dire au voisin du dessus de les appeler pour planifier un RDV (puisqu'à priori le seul fait qu'ils sachent qu'il y ait une fuite notamment comme ils ont envoyé des techniciens ne leur suffit pas).

Que me conseillez-vous d'entreprendre?

3 Publié par Visiteur
12/09/2017 07:01

Bonjour
Est-il vrai que je peux arrêter de payer le remboursement de crédits revolving car les taux d'intérêts sont trop élevés, et que cela est illégal ? Merci pour votre réponse

4 Publié par Visiteur
26/10/2017 21:36

Bonjour,

Par convention notariale, mon ex-mari s'est engagé pendant une durée de cinq ans à s'acquitter du remboursement de notre emprunt immobilier ( il bénéficie exclusivement de la jouissance du bien) Il ne s'acquitte plus du remboursement immobilier et a déposé un dossier de surendettement qui est recevable...
Quel est mon recours? La convention est elle caduque? Puis je prétendre à un loyer?

5 Publié par Visiteur
13/03/2018 09:23

Bonjour Maître et merci pour votre dévouement.
J'ai une question d'ordre commerciale :
la société pour laquelle je travail a conclu un contrat d'entretien pour un copieur auprès de la société X. Nous ne sommes plus satisfait de leur service car ils ne respectent plus les clauses du contrat (livraison tardive =5 a 6 jours au lieu de 48h maximum, maintenance préventive non faite, nous payons une option pour que les problème de la machine leur soit envoyé directement de la machine à chez eux, pour raccourcir les délais d'intervention, mais ils ne prennent pas compte de ces alertes car "trop de demande" il faut leur appeler...) bref pouvons nous ici, utiliser le principe de l’inexécution contractuelle pour rompre le contrat avant son terme ?
Je vous remercie

6 Publié par Maitre Anthony Bem
13/03/2018 09:36

Bonjour KC974,

En effet, il me semble que vous pouvez utilement vous prévaloir du principe de l’inexécution contractuelle pour rompre le contrat de prestation de services avant son terme.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
06/09/2018 09:14

Bonjour,

Une convention signée entre deux parties, l'une devant exécuter une mission et l'autre la rémunérer, la partie devant rémunérer ne veut pas payer mentionnant que la mission n'est pas effectuée. En a t elle le droit? Et si oui comment doit elle le dénoncer?
D'avance je vous en remercie

8 Publié par L.F
05/06/2020 14:18

Maître,
Bonjour,

Mon interrogation concerne mon bailleur.
En effet ce dernier a été notifié par des courriers épistolaires, dont pétition, puis plaintes auprès de la justice dont une perquisition qui a révélé des faits graves(documents sensibles d'un voisin volés et retrouvés au domicile du voisin dont on se plaint).
Notre bailleur social nous a informé d'une simple mise en demeure en terme d'avertissement.
Le dessein de notre requête était la résiliation de bail si lon considère la clause quant à la rébellion de bail si la sécurité des biens et des personnes est mis à mal.
Comment soumettre le bailleur à l'exécution de ses obligations ?
Je vous remercie par avance de l'attention que vous porterez à ma missive.
Cordialement.

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