Ce n’est pas tous les jours que le Conseil d’Etat rend un arrêt relatif au domaine médico-social, qui plus est publié au recueil Lebon.
En l’espèce, une personne âgée bénéficiaire d’une prestation d’un service d’aide à domicile (SAAD) avait subi des préjudices, suite à une chute provoquée par une perte d’ équilibre de l’aide-soignante qui la soutenait. Le SAAD était géré par un CCAS, établissement public administratif au sens de l’article L.123-6 du Code de l’action Sociale et des familles.
Le Tribunal administratif de Rennes et la Cour Administrative d’Appel de Nantes avaient débouté la demanderesse sur le fondement d’une absence de manquement du CCAS à ses obligations contractuelles.
Dans son arrêt en date du 5 juillet 2017 (n°399977), le Conseil d’Etat, alors qu’aucune des parties n’avait avancé ce moyen, s’emparait de la question d’ordre public du champ d’application de la loi et précisait tout d’abord qu’un SAAD géré par un établissement public revêt la qualification de service public administratif.
En outre, « les usagers de ce service public ne sauraient être regardés comme placés dans une situation contractuelle vis-à-vis de l’établissement concerné, alors même qu’ils concluent avec celui-ci un contrat de séjour, ou qu’est élaboré à leur bénéfice un document individuel de prise en charge ».
La solution est donc sans ambiguïté : le contrat de séjour n’a pas de valeur contractuelle au sens du droit administratif.
La question est désormais de savoir si cette solution s’applique à tous les ESSMS publics (EHPAD notamment) ou aux seuls SAAD.
En effet, le Conseil d’Etat fonde sa décision sur l’article L.311-4 du CASF, relatif au contrat de séjour et applicables à tous les ESSMS concerné par la conclusion d’un tel contrat, mais également sur l’article L.123-6 du même code, qui qualifie expressément le CCAS d’établissement public administratif.
En outre, les conclusions du rapporteur public semblent exclure la qualification de « contrat de séjour » aux SAAD, faute de séjour, ce qui pourrait impliquer a contrario que ce contrat peut être qualifié comme tel au sens du droit administratif dans les établissements de soin, comme par exemple un établissement pour personnes âgées médicalisé. Aussi convient-il de ne pas se montrer trop affirmatif sur la portée de cet arrêt à tous les ESSMS publics, notamment en ce qui concerne les EHPAD.
Toujours est-il qu’en l’espèce, la requérante devra prouver la faute de l’établissement public en vertu des règles de droit administratif de droit commun.
Notons que devant les juridictions de droit privé, la victime est également soumise à la preuve de la faute de l'établissement, la jurisprudence soumettant les ESSMS à une obligation de moyens (https://www.legavox.fr/blog/maitre-sylvain-bouchon/chute-fugue-agression-resident-responsabilite-21530.htm)
Me Sylvain Bouchon
Avocat au barreau de Bordeaux
Droit médico-social
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