L’antienne est connue : le secteur de l’aide à domicile en mode prestataire souffre de difficultés chroniques dans l’ensemble de l’Hexagone.
Une situation qui n’échappe naturellement pas aux Conseils départementaux, chargés de la tarification des SAAD.
Le secteur est en outre en plein chamboulement, puisque depuis l’entrée en vigueur de la loi ASV, l’ensemble des SAAD a basculé dans le régime de l’autorisation, la bascule des ex agréés ne s’étendant pas automatiquement jusqu’à l’habilitation à l’aide sociale. (https://www.legavox.fr/blog/maitre-sylvain-bouchon/saad%C2%A0-chamboulement-maintenant-22234.htm)
Un cahier des charges national issu du décret du 22 avril 2016 soumet tous les SAAD aux mêmes obligations d’organisation et de fonctionnement.
Face aux défis du handicap et du grand âge, les autorités de la Santé se trouvent donc confrontées à une gageure : pérenniser une offre de qualité et accessible à tous dans un secteur déficitaire, alors qu’elles disposent elles-mêmes de ressources de moins en moins extensives.
La notion de mission d’intérêt général, en particulier son acception au sens du droit européen, peut alors constituer une solution.
La notion de SIEG
Parmi les options de reprise en main, la notion de Service d’intérêt économique général (SIEG) peut constituer une solution d’efficacité en terme de tarification.
Cette notion, issue du droit européen, permet de déroger au principe cardinal de la libre concurrence à l’intérieur de l’Europe.
En particulier, la notion de SIEG permet de ne pas risquer la requalification en aides d’état de subventions accordées à certains services. Selon l’arrêt Altmark (CJCE, 24 juillet 2003, C-280-00), les compensations de service public échappent à la qualification d’aide d’état lorsqu’elles se limitent à offrir une contrepartie aux charges supplémentaires induites par les obligations de service public inhérente à la mission confiée par l’autorité publique à l’opérateur.
L’arrêt Altmark pose plusieurs conditions très strictes pour l’application du concept de SIEG.
Lorsque celles-ci sont remplies, une subvention accordée à un ou certains SAAD en contrepartie de ses obligations de service public échappe à l’illégalité au sens du droit de la concurrence européen, dont les dispositions, rappelons-le, s’imposent aux règlements nationaux et aux juridictions administratives françaises.
Un service peut être bénéficiaire d’une subvention à condition d’avoir été clairement mandaté en ce sens par une autorité.
Quel rapport avec les SAAD ?
La notion de compensation des obligations de service public peut permettre, dans certaines situations, de déroger au principe de tarification horaire. Il s’agit d’une dérogation marginale, certes, mais loin d’être anodine eu égard aux montants en jeu. Par voie de conséquence, cette notion de SIEG permet en outre une valorisation du plan APA avantageuse pour l’usager. Seul un Contrat d’Objectifs et de Moyens (CPOM) permet de mettre en œuvre le mécanisme.
Mise en œuvre du mécanisme
Une instruction de la Direction générale de la Cohésion sociale relative aux CPOM prise en application de la Loi ASV énonce clairement que le CPOM spécifique des SAAD vaut mandatement SIEG au sens du droit européen.
En outre, le Code de l’Action Sociale et des Familles énumère lui-même une dizaine de mentions qui doivent impérativement figurer dans le CPOM au titre du mandatement (art L.313-11-1 du CASF).
Parmi celles-ci, figurent notamment
- Le nombre et les catégories de bénéficiaires pris en charge au titre d’une année
- Le territoire desservi et les modalités horaires de prise en charge
- Les objectifs poursuivis et les moyens mis en œuvre
- Les modalités de calcul de l’allocation et de la participation des personnes utilisatrices
- Les paramètres de calcul, de contrôle, de révision et de récupération des financements alloués par le Département, etc..
Ainsi, il convient d’être extrêmement rigoureux dans la rédaction du CPOM pour éviter tout risque de récupération d’une subvention allouée au titre du SIEG.
Mon cabinet se tient à votre disposition pour toute information.
Me Sylvain Bouchon