Lexbase : Pensez-vous que le recours au chômage partiel soit une solution efficace ? Permet-il, en particulier, d'éviter les licenciements économiques ?
Michèle Bauer : Non. Le chômage partiel est présenté comme un outil de protection de l'emploi, il a été conçu pour éviter les licenciements économiques.
En pratique, je pense que le chômage partiel n'empêche pas les licenciements économiques, il semble plutôt en être l'annonciateur. Le seul bénéfice du chômage partiel est, sans doute, de retarder au maximum les licenciements économiques (de 6 à 12 mois).
Lexbase : N'existe-t-il pas d'autres recours pour une entreprise en difficulté ? Et, notamment, la réduction du temps de travail ?
Michèle Bauer : Les entreprises en difficulté peuvent recourir à la réduction du temps de travail dans les conditions édictées par la loi du 20 août 2008 (10) : en principe l'aménagement du temps de travail est mis en place par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou par une convention ou un accord de branche, à défaut par un décret.
La mise en place de cette réduction du travail nécessite une concertation, une négociation entre les représentants des salariés et l'employeur qui devra expliquer les difficultés économiques rencontrées et la nécessité d'aménager le temps de travail pour éviter les licenciements.
De plus, les négociations risquent d'être difficiles, puisque la réduction du travail entraînera inévitablement une baisse de la rémunération.
Lexbase : Ne conviendrait-il pas d'encourager davantage les entreprises à mettre à profit la période de chômage partiel afin de renforcer l'employabilité de leurs salariés ?
Michèle Bauer : Bien entendu, il serait bon que les entreprises mettent à profit cette période de chômage partiel pour renforcer l'employabilité de leurs salariés, c'est ce que préconise la Délégation générale à l'emploi et à la formation Professionnelle (DGEFP du 25 novembre 2008, préc.).
Dans le but d'appliquer de manière dynamique le chômage partiel, la DGEFP demande aux entreprises de permettre au salarié de tirer profit de la période de chômage partiel en se formant par l'intermédiaire du DIF (droit individuel à la formation), par exemple. Ce dispositif permettrait d'atténuer les effets du chômage partiel.
Pour autant, j'ai quelques doutes sur l'effectivité de cette préconisation de la DGEFP. En effet, les entreprises qui ont recours au chômage partiel sont fragiles économiquement et il sera difficile pour elles de financer une formation, car elles ne souhaiteront pas amoindrir un peu plus leur trésorerie.
Pour pallier cet inconvénient, le Gouvernement a annoncé la création d'un Fonds d'investissement social (11) pour coordonner les efforts en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle, en consolidant différentes sources de financement de l'Etat et des partenaires sociaux, chacun conservant, bien entendu, la responsabilité pleine et entière de ses financements. Au total, ce fonds pourrait atteindre environ 2,5 à 3 milliards d'euros.