Le droit au respect de la vie privée : définition, conditions et sanctions

Publié le Modifié le 29/03/2017 Vu 483 435 fois 161
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Quelles sont les règles juridiques relatives à la protection de la vie privée ?

Quelles sont les règles juridiques relatives à la protection de la vie privée ?

Le droit au respect de la vie privée : définition, conditions et sanctions

Chacun de nous a le droit de garder secrète l'intimité de son existence, afin de ne pas être livré en pâture à la curiosité publique.

Personne ne peut donc s'immiscer dans ce domaine contre le gré de l'intéressé.

Cette liberté a toujours été menacée et l'est encore plus aujourd'hui, avec l'accroissement de la pression sociale, la relâche de la contrainte morale et le développement des techniques de divulgation et d'investigation, telles qu'en témoignent mes nombreuses actions judiciaires dans lesquelles j'interviens ou j'ai eu l'occasion d'intervenir.

Un petit rappel des règles relatives à la protection de la vie privée s'impose.

I – La protection de la vie privée

L'article 9 alinéa 1 du code civil dispose que :

« Chacun a droit au respect de sa vie privée. »

Ainsi, chacun a, sur le fondement de l'article 9 du code civil, le droit de s'opposer à la reproduction de son image ou la diffusion de tout commentaire relatif à sa vie privée.

Il n'existe pas de définition légale de la « vie privée », cependant les juges ont délimité les contours de cette notion en considérant comme des atteintes à la vie privée toutes les informations faisant intrusion dans l'intimité de la personne, notamment :

  • Les relations sexuelles : tout individu a le droit d'organiser librement sa vie sexuelle. A ce titre, l'information sur l'homosexualité rentre dans le cadre du respect de la vie privée et de la non-discrimination ;
  • La vie sentimentale : l'immixtion dans la vie sentimentale d'une personne (liaison, divorce, rupture etc …) peut faire l'objet de poursuites judiciaires ;
  • La vie familiale : l'ingérence dans la vie familiale, et en particulier la divulgation d'informations telles que la correspondance, la domiciliation, les lieux de vacances, la maternité, le PACS, est prohibée. Sont ainsi répréhensibles les photographies représentant une personne se trouvant dans un lieu privé (à plus forte raison à domicile) ;
  • Situation financière : la révélation d'informations sur la situation financière d'un individu et de sa famille tombe sous la protection de la vie privée ;
  • Souvenirs personnels : les anecdotes et confidences appartiennent au domaine de la vie privée. Seule la personne concernée est en droit de décider de leur publication ;
  • Etat de santé : le secret médical, s'appliquant à tous les professionnels de santé, est une obligation de discrétion visant au respect de la vie privée des patients.
  • Convictions politiques ou religieuses : les opinions politiques et croyances religieuses des personnes font l'objet d'une obligation au secret.

L'atteinte à la vie privée est distincte de la diffamation, entendue comme l'allégation ou l'imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération.

La jurisprudence sanctionne tous les modes de divulgation : affichage, exposition publique du portrait (CA Paris, 1re ch., 19 avr. 1985), diffusion du journal, de la revue ou du livre, projection à l'écran, à la télévision, sur un site Internet (CA Paris, 10 févr. 1999), dans un jeu informatique (Cass. 1re civ., 16 juill. 1998), et le fait d'avoir recueilli l'information de façon licite n'assure pas l'immunité de l’auteur de l’atteinte (Cass. civ., 31 mai 1988).

La jurisprudence est constante : comme toute autre personne celui qui est connu d'un large public a le droit « d'être laissé tranquille » dans sa vie privée.

Le droit au respect de la vie privée n'est pas absolu ; il est empreint d'une flexibilité nécessaire à « la balance des intérêts en présence ».

Ainsi personne ne peut se plaindre d'une atteinte à laquelle elle a préalablement et expressément consenti et si l'intérêt légitime de l'information justifie la publication litigieuse.

La charge de la preuve incombe au défendeur (CA Versailles, 4 nov. 1999).

En effet, la protection cesse chaque fois que le public a un intérêt légitime à connaître les activités, le comportement, la situation, la condition, la manière d'être d'une personne.

La puissance publique s'immisce dans la vie privée, le plus souvent, en raison de son propre droit à la preuve : enquêtes, droit de communication, perquisitions, saisies, fouilles, contrôle d'identité...

Ces pouvoirs exorbitants sont conformes à la Constitution et à la Convention européenne s'ils sont reconnus dans un texte de loi (qui ne doit être ni général ni imprécis) et s'ils sont impérativement nécessaires à une des fins édictées par la Convention européenne, par exemple :

  • perquisitions (Cass. crim., 5 déc. 2000)
  • visites domiciliaires (Cass. crim., 7 mars 2000)
  • expertise sanguine (Cass. 1re civ., 22 févr. 2000)
  • empreintes digitales (TGI Marseille, 23 mars 1995).

En matière de sécurité routière il a été jugé que ne constitue pas une atteinte illicite à la vie privée le constat par les fonctionnaires de police d'un excès de vitesse à l'aide d'un cinémomètre associé à un appareil de prise de vue (Cass. crim., 15 nov. 2000 ; 12 févr. 1997).

Selon l'article 9 du code civil, la seule constatation de l'atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation (Cass. 1re civ., 5 nov. 1996).

L'importance du préjudice détermine le montant des dommages et intérêts. Ce montant ne doit pas varier en fonction de la gravité de la faute commise (CA Paris, 26 avr. 1983). Mais la gravité de la faute amplifie le plus souvent le préjudice.

Par ailleurs, diverses infractions pénales concourent à la protection de la vie privée :

  • délit de violation de domicile (articles  226-4, et 432-8 du code pénal) ;
  • délit de violation du secret des correspondances (articles 226-15 et 432-9 du code pénal) ;
  • délit de violation du secret professionnel (articles 226-13 du code pénal et 11, al. 2 du CGI, art. L. 103 du Livre des proc. Fisc).

De plus, l’article. 226-1 du code pénal punit l'atteinte volontairement portée à l'intimité de la vie privée d'une personne en écoutant, en enregistrant ou en transmettant au moyen d'un procédé quelconque, sans son consentement, ses paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, ainsi qu'en fixant ou en transmettant son image lorsqu'elle se trouve dans un lieu privé.

Il peut s'agir de microphones, magnétophones, tables d'écoute... et pour l'image, d'appareil photographique, de caméra, d'appareil émetteur de télévision...

La personne dont l'image est captée, enregistrée ou transmise doit être dans un lieu privé.

« Le lieu privé doit être conçu comme un endroit qui n'est ouvert à personne sauf autorisation de celui qui l'occupe d'une manière permanente ou temporaire ».

Ainsi, il existe un véritable arsenal législatif et jurisprudentiel qui vise à protéger le droit au respect de la vie privée.

II - Les sanctions de l’atteinte à la vie privée

Toute victime d'une atteinte à la vie privée peut obtenir du juge :

  • des mesures propres à limiter la diffusion de l'atteinte (saisie, séquestre, suppression des passages litigieux, publication d'un encart, astreinte...) ;
  • des dommages-intérêts pour indemniser le préjudice subi ;
  • l'insertion de la décision de justice dans la presse.

Sur le plan pénal, les peines applicables diffèrent selon que le coupable est une personne physique ou une personne morale. 



Une personne physique encourt un an d'emprisonnement et une amende de 45.000 euros.

De plus, l'article 226-31 du code pénal prévoit les peines complémentaires suivantes :

  • interdiction des droits civiques, civils et de famille ;
  • interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ;
  • interdiction pour une durée de cinq ans au plus de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation ;
  • affichage ou diffusion de la décision prononcée ;
  • confiscation de l'instrument qui a servi ou était destiné à commettre l'infraction, de l'enregistrement ou du document obtenu illicitement.

Une personne morale encourt notamment une amende égale au quintuple de celle prévue pour les personnes physiques, c'est-à-dire 225.000 euros.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
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1 Publié par Visiteur
29/09/2017 10:46

Bonjour Maître,
En pleine séparation de mon concubin, nous sommes tous les deux propriétaires de notre logement. J'avais expressément signifié à mon ex ainsi qu'à l'agence immobilière qu'il a mandaté à mon insu que je ne voulais pas qu'ils viennent chez moi (chez nous). Peut-on parler dans ce cas d'atteinte à la vie privée envers l'agent immobilier qui s'est introduit chez moi sans mon accord ?
merci pour votre réponse
cordialement

2 Publié par Maitre Anthony Bem
01/10/2017 18:30

Bonjour danaiade,

Il y aurait éventuellement pu y voir une violation de domicile, mais l'atteinte au droit au respect de la vie privée n’est pas susceptible de pouvoir s’appliquer utilement envers l'agent immobilier dans votre cas.

Cordialement.

3 Publié par Visiteur
02/10/2017 09:12

Bonjour Maitre,
nous sommes actuellement en train de mettre notre maman sous tutelle(alzheimeravec certificat d un médecin expert) mon père s'y oppose comme il s'oppose a sa mise en maison de retraite rendu obligatoire au vu de son état (là aussi les médecins sont en accord avec nous)apparemment mon père se fait monter la tête par ses voisins (la dame travaille a la Mairie et lui dit ce qu'il peut faire, sauf qu'ils ne connaissent pas l'altération de la santé mentale de celui çi qui est aussi reconnu par son médecin traitant qui nous a fait une certificat pour sauvegarde de justice.Quels sont nos recours envers ces voisins indélicats?Merci

4 Publié par Maitre Anthony Bem
02/10/2017 12:31

Bonjour lilette,

Afin de me permettre de prendre connaissance de votre situation personnelle en détail et de disposer de toutes les informations nécessaires pour vous répondre en toute connaissance de cause, je vous propose de me contacter en privé pour une consultation.

A cet égard, je vous invite à choisir l’une de mes différentes modalités de consultation en cliquant sur « consultation » en haut de cette page.

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
14/10/2017 11:16

Bonjour,mon frère de 18 ans se permet de rentrer sans permission dans ma chambre lorsque je n'y suis pas pour fouiller.est-ce puni par la loi?

6 Publié par Visiteur
19/10/2017 19:27

J'étais condamné sans être avertis en 2008 par une peine de prison; en 2015 j'ai fait opposition à ce jugement, le jour du procés, on m'a signifié que mon dossier est égaré au tribunal jusqu'à ce jour et ma situation n'a pas évolué. Que puis-je faire parce que je suis recherché?

le 19/10/2017

7 Publié par Visiteur
01/11/2017 12:02

Bonjour Maitre,
ce n'est pas très malin de ma part mais j'ai fait semblant de filmer mes voisins pour leur faire croire que je disposerai d'un enregistrement des troubles sonores qu'ils peuvent causer... cependant je n'ai à aucun moment eu l'intention de réaliser cet enregistrement et je n'avais d'ailleurs même pas mis de cassette dans la caméra. Ils ont porté plainte pour atteinte à la vie privée. A aucun moment mes voisins me voyant faire n'ont exprimé la volonté de ne pas être filmé (j'étais à 5 mètres au vu et su de tous) ce qui peut laisser supposer un consentement présumé (?)
Suis je attaquable? Y a-t-il ne serait ce que la tentative qui puisse m'être reprochée même si volontairement je n'avais pas mis de cassette dans la caméra sachant de toute manière que je ne pourrai pas utiliser un enregistrement comme preuve du trouble sonore?
Merci.

8 Publié par Visiteur
10/11/2017 19:14

Bonsoir Maître,

Je suis sur un blog sous un pseudo. Un internaute a écrit un livre. Pour sa livraison, lui ayant acheté un livre, je lui ai donné mon adresse. Il voulait passer me rendre visite, mais lui ai signifié de s'en abstenir. Or, depuis, il s'est procuré mon adresse mail, et par trois fois, j'ai reçu sous son nom, avec quelques autres adresses... des pétitions idiotes à signer!? A-t-il le droit d'utiliser mon adresse email sans mon autorisation!? J'ignore comment il se l'est procurée! Merci de votre réponse.

9 Publié par Maitre Anthony Bem
10/11/2017 21:43

Bonjour Kitty,

Il n’existe pas d’interdiction d'utiliser une adresse email sans l’autorisation du titulaire.

Cordialement.

10 Publié par Visiteur
13/11/2017 10:48

bonj hier ma belle soeur m a appeller enfait c est une fraterie de 8 enfants donc un deces avec 6 enfants ma belle mere agee de 96 ans a etait placer en ephad refuse de nous donner tout les renseignement ssur le prix elle procuration sur les comptes et se dit seule a prendre les decision et ne veut pas donner l etat des comptes banquaires ni le non du notaire qui ou un testament serait fait la elle vide la maison nous a fait un courrier pour prendre rdv avec elle ou voir si des choses nous interresse mais a dresser une list de meubles qui soit dit fait partie du testament et pour elle donc elle les prend nous on ne veut rien car cela n a aucune valeur ssachant que mon beau pere lui a vait preter 200.000fr somme jamais rendue et dit effaccer elle a enregistrer notre conversation a mon insue et me la dit a la fin et qu elle allaer porter plainte car nous nous sommes un peut dit des mots peut gentils que l on dit quand on est en colere est que je risque des poursuites elle est tellement tordue que je me mefie merci si vous pouvez me repondre

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