Un gérant, caution personnelle d’un emprunt bancaire conclu par sa société, peut se dégager d’un engagement manifestement disproportionné à ses biens et revenus.
En l'espèce, la banque CIC (Societe Bordelaise de Crédit) avait assigné la gérante d’une société qui s’était portée caution personnelle d’un emprunt consenti à sa société et à la suite à la mise en liquidation judiciaire de cette société.
Les juges du tribunal de commerce de Paris se sont fondés sur les dispositions de l’article L 341-4 du code de la consommation qui dispose qu’« un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où elle est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».
Ils ont jugé que :
« le principe de proportionnalité est ainsi étendu à toutes les personnes physiques ayant conclu un cautionnement avec un créancier professionnel quel que soit l’objet de la dette cautionnée et qu’il n’y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas.
Attendu que la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT ne justifie pas avoir, préalablement à la conclusion des cautionnements dont l’exécution est poursuivie, demandée à Mme X de déclarer le montant de ses revenus et de son patrimoine .
Attendu que la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT n’apporte pas la preuve que Mme X possèderait au jour des poursuites dont elle fait l’objet un patrimoine lui permettant de faire face à son obligation ;
Attendu dès lors que les cautionnements conclus par Mme X sont manifestement disproportionnés à ses biens et ses revenus ;
En conséquence le tribunal dira que la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT ne peut se prévaloir des engagements de caution et déboutera la SOCIETE BORDELAISE DE CREDIT de ses demandes ».
Cerise sur le gateau, Madame X a aussi obtenu du tribunal qu'il condamne la banque à lui rembourser une partie des honoraires de son avocat.
Il résulte de cette décision que :
- la caution gérante de société étant une personne physique, les dispositions de l'article L. 341-4 du Code de la consommation sont applicables à son engagement ;
- le principe de l'article L. 341-4 du Code de la consommation selon lequel la sanction du caractère manifestement disproportionné de l'engagement de la caution est l'impossibilité pour le créancier professionnel [la banque] de se prévaloir de cet engagement devait être appliqué strictement.
En conclusion, les juges sanctionnent les banques eu égard au caractère manifestement disproportionné de l'engagement de la caution par rapport à ses biens et revenus.
Les banques ne peuvent donc pas réclamer les dettes dues par les entreprises défaillantes auprès de leurs dirigeants lorsque le cautionnement personnel et solidaire de ces derniers est disproportionné à leurs biens et leurs revenus.
Il convient en outre de souligner que les juges ont rejeté les arguments invoquée par la banque, à savoir que :
- elle n’était tenue d’aucun devoir de mise en garde à l’endroit d’une caution-dirigeante de société ;
- le préjudice, qui ne consistait que dans une perte de chance, ne pouvait donc équivaloir à la dette de la caution.
Dorénavant, les cautions dirigeantes peuvent invoquer de manière certaine et rédhibitoire la disproportion de leurs revenus avec l’engagement de caution afin d’échapper totalement à leur dette envers la banque créancière.
Les banques n’ont plus qu’à bien se tenir et s’assurer systématiquement que les actes de caution qu’elles font signer à leurs clients soient bien proportionnés aux revenus et biens de ces derniers.
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Anthony Bem
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