Facebook soumis à la compétence du juge français

Publié le 06/03/2016 Vu 2 232 fois 0
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Dans un arrêt du 12 février 2016, la Cour d’appel de Paris (Pôle 2 – Chambre 2) a déclaré abusive, la clause attributive de compétence au profit des tribunaux d’Etat et fédéraux situés dans le comté de Santa Clara, en Californie, pour tout litige relatif à l’application des clauses du contrat prévue à l’article 15 des conditions générales de la société Facebook Inc.

Dans un arrêt du 12 février 2016, la Cour d’appel de Paris (Pôle 2 – Chambre 2) a déclaré abusive, la

Facebook soumis à la compétence du juge français

Dans un arrêt du 12 février 2016, la Cour d’appel de Paris (Pôle 2 – Chambre 2) a déclaré abusive, la clause attributive de compétence au profit des tribunaux d’Etat et fédéraux situés dans le comté de Santa Clara, en Californie, pour tout litige relatif à l’application des clauses du contrat prévue à l’article 15 des conditions générales de la société Facebook Inc.

L’origine de sa saisine :

Un utilisateur a ouvert un compte Facebook le 15 octobre 2008.

Le 27 février 2011, son compte a été désactivé. Facebook lui reprochant d’avoir publié sur son mur une photo de l’œuvre du peintre Courbet “l’origine du monde”.

Le 4 octobre 2011, le plaignant a assigné la société Facebook France, établissement français de la société Facebook UK Ltd, pour obtenir la réactivation de son compte.

Le plaignant a ensuite assigné en intervention forcée la société Facebook Inc.

Par une ordonnance rendue le 5 mars 2015, le TGI de Paris a entre autres :

-       déclaré abusive la clause attributive de compétence au profit des juridictions californiennes prévue à l’article 15 des conditions générales du contrat souscrit par Monsieur X. auprès de la société Facebook Inc ;

-       dit que cette clause est réputée non écrite ;

-       dit que le tribunal de grande instance de Paris est compétent pour connaître du litige introduit par Monsieur X. à l’encontre de la société Facebook Inc ;

Mécontente, la société Facebook Inc a interjeté appel de cette décision le 16 avril 2015.

A titre principal, la société Facebook Inc arguait d’une part du fait que le contrat signé entre la société et le plaignant n’était pas un contrat de consommation en raison de la gratuité de son service, et, d’autre part, du fait que la clause de compétence doit être appréciée par rapport à la loi qui régit le contrat, c’est-à-dire la loi californienne.

A titre subsidiaire, la société Facebook Inc soutenait que la clause litigieuse ne pouvait constituer une clause abusive dès lors qu’elle ne produisait aucun déséquilibre entre les parties.

En réponse, le plaignant soutenait qu’il était un consommateur et, ne s’était pas servi de Facebook pour une activité de photographe, son seul métier étant celui d’enseignant de sorte que la clause attributive de compétence était une clause abusive.

Les fondements textuels de son arrêt :

Aussi, une fois saisie la Cour d’appel reprend l’argument du juge de première instance selon lequel « si le service proposé est gratuit pour l’utilisateur, la société Facebook Inc retire des bénéfices importants de l’exploitation de son activité, via notamment les applications payantes, les ressources publicitaires et autres, de sorte que sa qualité de professionnel ne saurait être sérieusement contestée ; qu’il n’est pas plus contestable que le contrat souscrit est un contrat d’adhésion sans aucune latitude autre que l’acceptation ou le refus ».

La Cour a recours à l’article 15 du règlement CE n°44/2001 du 22 décembre 2000 aux termes duquel :

« 1. En matière de contrat conclu par une personne, le consommateur, pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice des dispositions de l'article 4 et de l'article 5, point 5:

a) lorsqu'il s'agit d'une vente à tempérament d'objets mobiliers corporels;

b) lorsqu'il s'agit d'un prêt à tempérament ou d'une autre opération de crédit liés au financement d'une vente de tels objets;

c) lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l'État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.

2. Lorsque le cocontractant du consommateur n'est pas domicilié sur le territoire d'un État membre, mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, il est considéré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet État.

3. La présente section ne s'applique pas aux contrats de transport autres que ceux qui, pour un prix forfaitaire, combinent voyage et hébergement ».

Elle a aussi recours à l’article 16 dudit règlement, aux termes duquel :

« 1. L'action intentée par un consommateur contre l'autre partie au contrat peut être portée soit devant les tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel est domiciliée cette partie, soit devant le tribunal du lieu où le consommateur est domicilié.

2. L'action intentée contre le consommateur par l'autre partie au contrat ne peut être portée que devant les tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel est domicilié le consommateur.

3. Les dispositions du présent article ne portent pas atteinte au droit d'introduire une demande reconventionnelle devant le tribunal saisi d'une demande originaire conformément à la présente section ».

Elle a également recours aux articles L132-1 R 132-2 du code de la consommation, 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil.

Ceci la conduit à conclure que « la clause attributive de compétence au profit des juridictions californiennes contenue dans le contrat a pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu’elle a également pour effet de créer une entrave sérieuse pour un utilisateur français à l’exercice de son action en justice ; ».

In fine, cette décision marque une évolution considérable. Dorénavant, Facebook ne saurait se retrancher derrière les clauses de ses conditions générales, pour vous opposer la compétence des tribunaux californiens. Elle ouvre de grands espoirs, notamment, sur la question de l’utilisation des données personnelles. 

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